[01/30/2023] Day 8: Alieu Kosiah speaks

Questions procédurales

Le PrĂ©sident a invitĂ© les parties Ă  se dĂ©terminer sur les requĂŞtes formĂ©es par Me Gianoli, qui a notamment sollicitĂ© l’audition de deux nouveaux tĂ©moins. Le Procureur et les avocats des parties ont civiles ont renvoyĂ© la Cour aux courriers qu’ils lui ont adressĂ©s. Me Jakob a reprochĂ© Ă  la dĂ©fense d’avoir formĂ© ces requĂŞtes dans le seul but de retarder les dĂ©bats et leur issue et a affirmĂ© qu’il y avait lieu de s’y opposer fermement vu leur nature dilatoire. 

* * *

Interrogatoire d’Alieu Kosiah

Questions relatives à l’ethnie Mandingo

La Cour interroge Alieu Kosiah :

InvitĂ© Ă  dĂ©finir les Mandingos, Alieu Kosiah a expliquĂ© qu’il s’agissait de l’une des quinze ethnies du LibĂ©ria et que les Mandingos faisaient partie, au mĂŞme titre que les Lormas, les Kissis et les Gbandis, du groupe ethnique Mende. Selon lui, les Mandingos sont majoritairement des commerçants vers qui il faut se tourner notamment pour vendre des diamants. Alieu Kosiah a expliquĂ© que les Mandingos contrĂ´laient 95% du système de transport avant la guerre et contrĂ´lent Ă  ce jour 99.9% des garages. Il a ajoutĂ© qu’il y avait Ă©galement des Mandingos dans les pays voisins, tels que le SĂ©nĂ©gal, la Gambie, le Mali, la CĂ´te d’Ivoire et la GuinĂ©e. 

Le PrĂ©sident a demandĂ© au prĂ©venu quelle Ă©tait la diffĂ©rence essentielle entre les Kissis et les Mandingos. Alieu Kosiah a rĂ©pondu que la diffĂ©rence principale Ă©tait que Mandingos et Kissis ne pratiquaient pas la mĂŞme religion. Les Mandingos sont musulmans, alors que les Kissis sont chrĂ©tiens et pratiquent les rites de la Poro Society. Le prĂ©venu a nĂ©anmoins dĂ©clarĂ© avoir vu des mosquĂ©es dans des villages Kissis du Lofa, de sorte que certains Kissis sont musulmans selon lui. 

InterrogĂ© sur la diffĂ©rence essentielle entre les Mandingos et les Lormas, Alieu Kosiah a indiquĂ© que, comme pour les Kissis, les Lormas ne parlent pas le mĂŞme dialecte, sont chrĂ©tiens Ă  99% et pratiquent des rites traditionnels. 

QuestionnĂ© sur la diffĂ©rence essentielle entre les Mandingos et les Krahns, le prĂ©venu a expliquĂ© que les Krahns Ă©taient plus Ă©loignĂ©s des Mandingos puisqu’ils ne faisaient pas partie du mĂŞme groupe ethnique. InterrogĂ© sur les caractĂ©ristiques physiques permettant d’identifier l’appartenance Ă  un groupe, Alieu Kosiah a dĂ©clarĂ© qu’il Ă©tait possible de reconnaĂ®tre un Mandingo d’après son apparence physique. 

Le PrĂ©sident a demandĂ© au prĂ©venu s’il se considĂ©rait comme un Mandingo typique. Alieu Kosiah a rĂ©pondu qu’il Ă©tait Mandingo, bien qu’il ne soit pas un bon musulman, et que tous les Mandingos avaient le sens des affaires. Il a ajoutĂ© qu’il n’était pas un bon commerçant, contrairement Ă  son frère. Sur question, Alieu Kosiah a indiquĂ© qu’il ne se considĂ©rait pas comme un bon commerçant car lorsque quelqu’un lui demande de l’argent, il lui en donne au lieu de dire non.

InvitĂ© Ă  expliquer comment il Ă©tait arrivĂ© Ă  la conclusion que les Mandingos avaient Ă©tĂ© victimes d’un gĂ©nocide, le prĂ©venu a affirmĂ© qu’il n’était pas un expert juridique et qu’il s’était fondĂ© sur ses Ă©motions. Il a ajoutĂ© qu’il n’entrevoyait aucune justification au fait que les Mandingos aient Ă©tĂ© pris pour cibles en 1990. S’agissant des victimes Krahns en revanche, Alieu Kosiah a indiquĂ© que cela pouvait s’expliquer par le fait que Samuel Doe Ă©tait au pouvoir et que les Krahns ont tuĂ© de nombreuses personnes en 1984, notamment des Gios. 

Sur question, Alieu Kosiah a confirmĂ© que des membres de sa famille avaient Ă©tĂ© victimes du NPFL, notamment son frère Musa Kosiah tuĂ© en 1990. InvitĂ© Ă  donner davantage de dĂ©tails sur la mort de son frère, le prĂ©venu a expliquĂ© que ce dernier avait Ă©tĂ© capturĂ© alors qu’il se rendait Ă  Basso et Ă©tait portĂ© disparu depuis ce jour. Le prĂ©venu a Ă©galement Ă©voquĂ© l’un de ses grands cousins du nom d’Alieu Kosiah tuĂ© par des Gios dans une embuscade, ainsi que son oncle aveugle qui a disparu avec sa femme et ses enfants. Alieu Kosiah a ensuite mentionnĂ© son ami Mohamed, surnommĂ© Nelson Mandela car il Ă©tait très intelligent. Ce dernier vivait chez son grand-oncle lorsque les NPFL sont arrivĂ©s, ont pris leur maison et les ont tuĂ©s. 

Le Président a demandé au prévenu si la seule solution était pour lui la fuite face à l’arrivée des NPFL. Alieu Kosiah a répondu que dans la mesure où les Mandingos étaient tués partout dans le Nimba, le bon sens appellerait à traverser la frontière guinéenne pour se mettre en sécurité. Cela étant, certains Mandingos sont restés dans leurs villages. Selon le prévenu, parmi les 800 personnes tuées, certaines auraient pu éviter la mort en prenant la fuite. Il a ajouté que la commandante responsable de cette attaque n’était pas Martina Johnson contrairement aux accusations de Civitas Maxima qui l’a prise pour cible en raison du fait qu’elle vivait en Belgique.

Le PrĂ©sident a rappelĂ© au prĂ©venu ses dĂ©clarations selon lesquelles les Mandingos avaient Ă©tĂ© pris pour cibles car ils travaillaient dur et faisaient prospĂ©rer leur pays et lui a demandĂ© si les Mandingos reprĂ©sentaient une Ă©lite selon lui. Alieu Kosiah a rĂ©pondu que 90% des Mandingos faisaient partie de la classe moyenne avant la guerre. A titre d’exemple, il a indiquĂ© que lui et sa famille mangeaient trois fois par jour avant la guerre, alors que leurs voisins Manos ne cuisinaient que tous les deux jours. 

Le PrĂ©sident a rappelĂ© au prĂ©venu qu’il a dĂ©clarĂ© devant le MPC que les Mandingos disposaient de davantage de richesses (moyens de transport, gĂ©nĂ©rateurs, diamants) et que la rĂ©gion de Foya Ă©tait surnommĂ©e le KoweĂŻt. A la question de savoir si les Mandingos Ă©taient l’élite de Foya avant l’arrivĂ©e des NPFL, Alieu Kosiah a rĂ©pondu qu’il Ă©tait Ă©tabli que les Mandingos dominaient l’économie. Il a ajoutĂ© que lorsque Taylor a attaquĂ© le Sierra Leone en 1990, il y avait trois villes prospères : Foya, GuĂ©ckĂ©dou et Kwandu. Selon le prĂ©venu, tout ce que les NPFL ont pillĂ© Ă  Kwandu a Ă©tĂ© apportĂ© Ă  Foya, raison pour laquelle Foya Ă©tait surnomĂ©e le KoweĂŻt. 

InterrogĂ© sur un certain Kromah qui aurait Ă©tĂ© Ă  l’origine des accusations contre lui selon ses prĂ©cĂ©dentes dĂ©clarations, Alieu Kosiah a dĂ©clarĂ© qu’il s’agissait de « l’un de nos frères Â» qui parlait parfois un peu trop mais qui n’avait rien Ă  voir avec cette affaire. 

Le PrĂ©sident a indiquĂ© au prĂ©venu que selon HB, les Mandingos le considĂ©raient comme un hĂ©ros. Alieu Kosiah a affirmĂ© que HB Ă©tait un individu spĂ©cial qu’il avait rencontrĂ© 4 ou 5 fois Ă  rĂ©sidence d’Alhaji Kormah. Le prĂ©venu a dĂ©clarĂ© : « S’il dit que j’étais un hĂ©ros, alors lui aussi en Ă©tait un car nous faisions le mĂŞme travail. Il y a plusieurs manières de mener une guerre, parfois avec des armes, parfois avec un stylo. HB Ă©tait sur le front des Ă©crits Â». 

Me Gianoli interroge Alieu Kosiah : 

Me Gianoli a demandĂ© Ă  Alieu Kosiah s’il Ă©tait juste de comprendre que les Mandingos Ă©taient connus pour ĂŞtre des commerçants. Le prĂ©venu a confirmĂ© que les Mandingos travaillaient en tant que commerçants avant, pendant et après la guerre et que mĂŞme les livres d’histoire se rĂ©fĂ©raient aux Mandingos comme Ă©tant des commerçants. 

A la question de savoir s’il pensait que les Mandingos Ă©taient supĂ©rieurs aux autres ethnies, Alieu Kosiah a rĂ©pondu par la nĂ©gative. Il a indiquĂ© que selon lui, les LibĂ©riens considĂ©raient les Mandingos comme des Ă©trangers et les appelaient les citoyens de 1990, car Samuel Doe avait ordonnĂ© d’arrĂŞter de tuer les Mandingos lorsque les tueries faisaient rage en 1990 en affirmant qu’ils Ă©taient aussi des citoyens du pays. Alieu Kosiah a tirĂ© des parallèles avec le gĂ©nocide des Tutsis et la guerre en CĂ´te d’Ivoire. Il a indiquĂ© que le prĂ©sident Ouattara Ă©tait Mandingo et que lorsque ce dernier a gagnĂ© les Ă©lections, Gbagbo a dĂ©clarĂ© qu’il ne pouvait pas donner le pouvoir Ă  un Mandingo. Selon le prĂ©venu, la tension est toujours prĂ©sente et est liĂ©e Ă  des aspects Ă©conomiques plutĂ´t que religieux. 

A la question de savoir si les Mandingos ont Ă©tĂ© considĂ©rĂ©s comme des citoyens dès 1990, Alieu Kosiah a rĂ©pondu par la nĂ©gative et a expliquĂ© que les journaux avaient dĂ©formĂ© les propos de Doe en dĂ©signant les Mandingos comme les citoyens de 1990. Selon le prĂ©venu, les Mandingos se faisaient huer et interpeller dans les rues. Les gens leur demandaient : Â« Si vous vous considĂ©rez comme des citoyens de ce pays, pourquoi vous le fuyez ? Â». 

Me Gianoli a demandĂ© Ă  Alieu Kosiah si, selon lui, tous les citoyens du LibĂ©ria Ă©taient Ă©gaux, indĂ©pendamment de leur culture, ethnie et religion. Le prĂ©venu a dĂ©clarĂ© que tel n’était pas le cas avant la guerre, puisque les Mandingos Ă©taient discriminĂ©s. Il a donnĂ© l’exemple des contrĂ´les aux checkpoints : alors que les Mandingos devaient attendre trois heures avant de pouvoir passer, les autres n’attendaient qu’une dizaine de minutes. 

Le MPC n’a pas eu de questions. 

Me Werner interroge Alieu Kosiah :

InterrogĂ© sur le nom de la commandante NPFL qui a attaquĂ© BackĂ©dou, Alieu Kosiah a dĂ©clarĂ© qu’il ne connaissait pas son nom mais qu’il pouvait donner un description. Selon lui, il s’agissait d’une femme Gio, mince et de peau claire. Il a ajoutĂ© que Martina Johnson n’était pas 100% Mandingo, mais seulement du cĂ´tĂ© de son père, et qu’elle n’avait pas pu commettre des crimes Ă  Callway alors qu’elle combattait dans le cadre de l’opĂ©ration Octopus. 

Me Jakob interroge Alieu Kosiah : 

QuestionnĂ© sur les relations entre les Mandingos du LibĂ©ria et les Mandingos de GuinĂ©e, Alieu Kosiah a expliquĂ© que lorsque le pays a Ă©tĂ© divisĂ©, il y avait des cousins et des neveux de chaque cĂ´tĂ© de la frontière de sorte que les Mandingos ont des membres de leur famille de l’autre cĂ´tĂ© de la frontière, au mĂŞme titre que les Kissis, les Krahns, les Manos et les Gios, mais seuls les Mandingos sont considĂ©rĂ©s comme des Ă©trangers. A la question de savoir si ces liens familiaux Ă©taient de nature Ă  faciliter les Ă©changes commerciaux, Alieu Kosiah a rĂ©pondu que les Ă©changes entre les deux pays avaient continuĂ© pendant la guerre, y compris sous le NPFL. 

InvitĂ© Ă  prĂ©ciser le prĂ©nom du frère qui parlait un peu trop et dont le nom de famille est Kromah, Alieu Kosiah a dĂ©clarĂ© qu’il n’était selon lui pas nĂ©cessaire de donner son prĂ©nom et a prĂ©cisĂ© qu’il n’avait aucun lien avec la procĂ©dure. 

Me Gianoli rĂ©interroge Alieu Kosiah : 

InvitĂ© Ă  prĂ©ciser Ă  quelle faction appartenait Martina Johnson, Alieu Kosiah a indiquĂ© qu’elle faisait partie du NPFL et qu’elle Ă©tait commandante d’artillerie. Il a ajoutĂ© que Chief Varney, le commandant adjoint des INPFL, avait attaquĂ© Monrovia lors de l’opĂ©ration Octopus. Selon lui, les INPFL Ă©taient commandĂ©s par Prince Johnson qui a dĂ©cidĂ© Ă  la dernière minute de ne pas participer Ă  l’opĂ©ration Octopus, de sorte que Chief Varney s’est chargĂ© de diriger l’opĂ©ration. 

Questions relatives Ă  la faction ULIMO 

La Cour interroge Alieu Kosiah :

InterrogĂ© sur la raison pour laquelle il Ă©tait l’un des rares Mandingos au sein de l’AFL, Alieu Kosiah a indiquĂ© qu’il n’était pas le seul Mandingo et que toutes les ethnies Ă©taient reprĂ©sentĂ©es, sous rĂ©serve des Gios et des Manos. QuestionnĂ© sur la stabilitĂ© qu’il pouvait apporter Ă  son peuple en intĂ©grant l’AFL, le prĂ©venu a expliquĂ© qu’à l’époque, il Ă©tait jeune et avait le sentiment que l’AFL ne protĂ©geait pas les Mandingos, car de nombreux Mandingos ont Ă©tĂ© tuĂ©s par les NPFL Ă  cause d’erreurs commises par l’AFL. Ainsi, en rejoignant l’AFL, il pensait que cette faction protĂ©gerait son peuple. 

Sur question, Alieu Kosiah a confirmĂ© qu’il pensait bien connaĂ®tre l’histoire de l’ULIMO. InterrogĂ© sur la manière dont il recevait des informations en tant que CO dans l’ULIMO, le prĂ©venu a expliquĂ© que les ULIMO avaient des radios Ă  Voinjama, Zorzor, Fassama, Lofa Brige, Swan [phon.], Monrovia et Conakry. 

QuestionnĂ© sur le nombre de membres fondateurs de l’ULIMO, Alieu Kosiah a dĂ©clarĂ© qu’il n’était pas en mesure de rĂ©pondre Ă  cette question, mais qu’il pouvait expliquer la manière dont l’ULIMO a Ă©tĂ© fondĂ© en se rĂ©fĂ©rant aux dĂ©clarations de Kwamex Fofana. Ainsi, Karpeh aurait dit Ă  Fofana que le gouvernement sierra-lĂ©onais avait donnĂ© l’autorisation pour la crĂ©ation d’un groupe armĂ© et demandĂ© que Fofana dresse une liste de noms de personnes capables de manier des armes. Selon Alieu Kosiah, les noms de Frikala [phon.], qui a Ă©tĂ© tuĂ© avant l’arrivĂ©e des ULIMO au LibĂ©ria, et Tikala [phon.], le benjamin de Frikala, figuraient sur cette liste. Alieu Kosiah a ajoutĂ© que selon lui, 4’000 combattants ULIMO ont rejoint le LibĂ©ria, alors qu’ils n’étaient que 1’000 au Sierra Leone. 

QuestionnĂ© sur le pourcentage de combattants Mandingos au sein de l’ULIMO, le prĂ©venu a indiquĂ© qu’il estimait les ULIMO composĂ©s de 40% de Krahns, 40% de Mandingos et 20% d’autres ethnies. 

InterrogĂ© sur les buts visĂ©s par la fondation des ULIMO en lien avec les intĂ©rĂŞts des Mandingos, Alieu Kosiah a prĂ©cisĂ© que l’ULIMO (anciennement le LUDF) a Ă©tĂ© fondĂ© par des Krahns, plus prĂ©cisĂ©ment par Albert Karpeh, et non par des Mandingos. Le prĂ©venu a dĂ©clarĂ© que l’information selon laquelle les LUDF et les MRN avaient fusionnĂ© pour crĂ©er les ULIMO Ă©tait fausse. Il a expliquĂ© que Karpeh avait Ă©tĂ© tuĂ© six ou huit mois après la fondation des LUDF en raison des rivalitĂ©s entre les deux groupes Krahns : les Krahns Konabo (groupe de Doe) et les Krahns Gbabo (groupe de Karpeh). Selon Alieu Kosiah, Karpeh a Ă©tĂ© tuĂ© par une balle perdue tirĂ©e par Kobra. Le PrĂ©sident a invitĂ© le prĂ©venu Ă  rĂ©pondre Ă  sa question. Alieu Kosiah a dĂ©clarĂ© que Mandingos et Krahns avaient fait l’objet de tueries et ont fui le pays dès lors qu’il faisait sens que les deux ethnies joignent leurs forces. 

RĂ©interrogĂ© sur les buts visĂ©s par la crĂ©ation des ULIMO, Alieu Kosiah a dĂ©clarĂ© que les LUDF poursuivaient deux buts : aider la Sierra Leone Ă  combattre les RUF et saisir l’opportunitĂ© de revenir au LibĂ©ria pour chasser Taylor. 

QuestionnĂ© sur les buts spĂ©cifiques des ULIMO au sein du Lofa, le prĂ©venu a rĂ©pondu qu’il ignorait si des buts spĂ©cifiques Ă©taient poursuivis dans le Lofa, mais que l’objectif Ă©tait de prendre le plus de territoire possible Ă  Taylor. Il a ajoutĂ© qu’en Sierra Leone, l’un des buts consistait Ă  prendre Gbarnga afin d’empĂŞcher les RUF d’obtenir des ravitaillements de cette zone. 

InterrogĂ© sur les raisons qui l’ont poussĂ© Ă  rejoindre les ULIMO, Alieu Kosiah a rĂ©pondu qu’il voulait s’assurer que Taylor ne parvienne pas Ă  ses fins après tout ce qu’il avait fait subir Ă  son peuple. Le ConfrontĂ© Ă  ses dĂ©clarations devant le MPC, selon lesquelles il a rejoint les ULIMO car il Ă©tait un ancien soldat et que cela lui permettait de vivre, Alieu Kosiah a dĂ©clarĂ© qu’il avait peur d’être pris pour un NPFL ou un RUF par les forces spĂ©ciales sierra-lĂ©onaises de sorte que la crĂ©ation des LUDF avait Ă©galement servi Ă  sa protection en tant qu’ancien soldat. Il a ajoutĂ© que ceux qui faisaient partie des LUDF avaient la garantie de ne pas se faire arrĂŞter par les soldats sierra-lĂ©onais. 

QuestionnĂ© sur la manière dont les rĂ´les ont Ă©tĂ© attribuĂ©s lors de la fondation des ULIMO, le prĂ©venu a rĂ©pĂ©tĂ© qu’il n’était pas prĂ©sent et pouvait uniquement se rĂ©fĂ©rer aux dĂ©clarations de Fofana. Karpeh a donc fondĂ© le groupe et des problèmes sont survenus lorsqu’il a Ă©tĂ© question de nommer un field commander. Varney Sigri [phon.] a d’abord Ă©tĂ© choisi, ce qui a dĂ©plu aux Krahns Konabo qui s’attendaient Ă  ce que l’un des leurs soit dĂ©signĂ©. Dès lors, Djulu [phon.] a Ă©tĂ© nommĂ©. Selon le prĂ©venu, Djulu Ă©tait un des hommes les plus puissants au sein de l’ULIMO puisqu’il dĂ©cidait de toutes les activitĂ©s militaires, ainsi que de la planification et des promotions. 

InterrogĂ© sur son rĂ´le initial au sein des ULIMO, Alieu Kosiah a indiquĂ© qu’il Ă©tait sergent opĂ©rationnel au sein de l’escadron de War Bus. QuestionnĂ© sur le nombre d’hommes qu’il avait sous ses ordres, Alieu Kosiah a expliquĂ© qu’un platoon comprenait un commandant et son adjoint, ainsi que quatre escadrons qui ont chacun leur commandant. Selon le prĂ©venu, un platoon comptait 45 hommes. 

QuestionnĂ© sur ses aspirations au sein des ULIMO, Alieu Kosiah a dĂ©clarĂ© que tous les soldats voulaient ĂŞtre promus, mais que cela n’était pas entre leurs mains. InvitĂ© Ă  prĂ©ciser de qui dĂ©pendaient les promotions, le prĂ©venu a indiquĂ© qu’elles dĂ©pendaient de Djulu, puis du major Kamara en Sierra Leone et ensuite d’Alhaji Kromah au LibĂ©ria. 

InterrogĂ© sur les critères permettant de grader, le prĂ©venu a dĂ©clarĂ© qu’il fallait protĂ©ger ses hommes de sorte Ă  Ă©viter les pertes en vies humaines. Il a ajoutĂ© que certains avaient reçu des promotions sans les mĂ©riter. 

Le PrĂ©sident a demandĂ© au prĂ©venu qui lui avait donnĂ© le titre de floating officer après qu’il a quittĂ© Todi. Alieu Kosiah a dĂ©clarĂ© que personne ne pouvait donner le titre de floating officer Ă  qui que ce soit. Il a expliquĂ© que quiconque n’avait plus d’affectation pouvait devenir un floating officer. Le PrĂ©sident a rappelĂ© au prĂ©venu qu’il a dĂ©clarĂ© en première instance avoir Ă©tĂ© floating officer pendant toute l’annĂ©e 1994 et lui a demandĂ© si l’ULIMO pouvait se permettre d’avoir un soldat sans affectation alors que la faction Ă©tait en guerre. Alieu Kosiah a rĂ©pondu qu’il avait Ă©tĂ© floating officer Ă©galement en 1995 et que cela ne l’avait pas empĂŞchĂ© de se rendre sur la ligne de front. 

Le PrĂ©sident lui a demandĂ© qui avait le pouvoir de l’envoyer sur la ligne de front alors qu’il n’était affectĂ© Ă  personne. Le prĂ©venu a tenu Ă  expliquer la signification du terme floating officer. Il a indiquĂ© que cela signifiait qu’il n’était pas commandant dans le Lofa, ni Ă  Zorzor, ni Ă  Foya, ni Ă  Kolahun. NĂ©anmoins, si Pepper & Salt lui ordonnait de se rendre sur la ligne de front, il devait s’exĂ©cuter. Alieu Kosiah a expliquĂ© que le terme « floating Â» signifiait qu’il n’avait ni une zone spĂ©cifique sous son contrĂ´le ni une affectation spĂ©cifique. 

A la question de savoir qui avait la prioritĂ© pour faire appel Ă  ses services, Alieu Kosiah a rĂ©pondu que Pepper & Salt Ă©tait encore responsable du Lofa Ă  son arrivĂ©e. Le gĂ©nĂ©ral Dombuyah est arrivĂ© un ou deux mois plus tard et a pris le contrĂ´le en tant que field commander. Le prĂ©venu a ajoutĂ© qu’il avait Ă©tĂ© envoyĂ© Ă  Benefanaye en tant que floating officer pour apporter du renfort Ă  PYJ et qu’ils Ă©taient parvenus Ă  repousser l’attaque grâce Ă  son intervention. 

Le PrĂ©sident a demandĂ© au prĂ©venu oĂą se trouvait sa base Ă  cette pĂ©riode. Alieu Kosiah a indiquĂ© avoir Ă©tĂ© floating officer de Todi Ă  Voinjama jusqu’à sa promotion en 1995 lorsqu’il a Ă©tĂ© envoyĂ© Ă  Zorzor. Il a prĂ©cisĂ© que cela a Ă©tĂ© sa première et unique affectation dans le comtĂ© du Lofa. 

InterrogĂ© sur la façon dont il subvenait Ă  ses besoins et Ă  ceux de ses hommes Ă  cette pĂ©riode, le prĂ©venu a expliquĂ© qu’il se rendait au quartier-gĂ©nĂ©ral dont Deku Ă©tait responsable et soumettait une demande Ă©crite indiquant ce dont il avait besoin (sacs de riz, munitions, etc.). 

Le Juge Ros a demandĂ© au prĂ©venu comment il se ravitaillait en matĂ©riel et en nourriture lorsqu’il Ă©tait sur la ligne de front. Alieu Kosiah a expliquĂ© qu’ils avaient deux ou trois voitures et qu’il en utilisait une pour aller chercher du ravitaillement Ă  Voinjama. Il a ajoutĂ© qu’il se rendait sur la ligne de front uniquement lorsque cela Ă©tait nĂ©cessaire pour encourager ses hommes. En effet, il allait rarement au front en tant que commandant de Zorzor. 

Le Juge Ros a rappelĂ© au prĂ©venu qu’il avait dĂ©clarĂ© lors de son interrogatoire avoir passĂ© les six annĂ©es de la guerre sur la ligne de front. Le prĂ©venu a rĂ©torquĂ© avoir dĂ©clarĂ© qu’il se trouvait sur la ligne de front pendant le ramadan et qu’il n’y Ă©tait donc pas 365 jours par an. Le Juge Ros a citĂ© les dĂ©clarations du prĂ©venu, qui a indiquĂ© avoir passĂ© les six ans de la guerre sur la ligne de front alors que les big men restaient en retrait. Alieu Kosiah a rĂ©pĂ©tĂ© qu’il n’était pas au combat 365 jours par an et a prĂ©cisĂ© avoir combattu au front avec War Bus, puis avec Kamara Ă  Todi. 

RĂ©interrogĂ© sur la manière dont il organisait le ravitaillement depuis la ligne de front, Alieu Kosiah a indiquĂ© que tout dĂ©pendait des Ă©poques. Il a indiquĂ© qu’ils portaient l’équipement de base et les munitions sur le dos et Ă©taient munis d’un RPG. Il fallait contourner l’ennemi, tendre une embuscade et repartir (hit and run). Il a rappelĂ© qu’il s’agissait d’une guĂ©rilla et non d’une guerre rĂ©gulière et que le premier objectif Ă©tait d’attaquer le quartier-gĂ©nĂ©ral ennemi pour s’emparer des munitions et de la nourriture. Il a ajoutĂ© que s’ils manquaient de nourriture dans la brousse, ils mangeaient du manioc ou de l’igname et jetaient des grenades dans des plans d’eau pour attraper des poissons. Selon lui, ils recevaient du ravitaillement de Sierra Leone lorsqu’ils attaquaient dans cette direction. 

QuestionnĂ© sur la manière dont ils transportaient le ravitaillement reçu de Sierra Leone et de GuinĂ©e jusqu’à la zone de guĂ©rilla dans la brousse, Alieu Kosiah a citĂ© l’exemple du Lofa et indiquĂ© que les trucks venaient jusqu’à Voinjama. Le Juge Ros lui a alors rappelĂ© ses dĂ©clarations en première instance selon lesquelles les routes n’étaient plus praticables pendant les six mois que durait la saison des pluies. Alieu Kosiah a rĂ©torquĂ© qu’il n’avait pas dit que le transport Ă©tait impossible pendant six mois, mais qu’il Ă©tait plus difficile, Ă©tant prĂ©cisĂ© qu’il Ă©tait possible d’aller partout avec une jeep 4×4. Il a expliquĂ© que les camions se dĂ©plaçaient jusqu’à Voinjama oĂą les soldats venaient se ravitailler et charger le ravitaillement sur des jeeps 4×4. Il a ajoutĂ© que certaines lignes de front n’étaient pas accessibles en voiture en raison des embuscades ou des mines. 

Alieu Kosiah a dĂ©clarĂ© qu’il ne pouvait pas exclure que certains commandants aient eu recours Ă  des civils pour transporter du ravitaillement, mais il ne l’avait jamais vu de ses propres yeux. Il a ajoutĂ© qu’il n’y avait pas de civils lorsqu’il Ă©tait Ă  Zorzor. Il a racontĂ© qu’il se rendait Ă  Salaye en voiture et qu’il y avait deux voitures pour transporter les munitions sur la ligne de front. Selon lui, les voitures Ă©taient nĂ©cessaires pour transporter les armes anti-aĂ©riennes sur la ligne de front. Le convoi Ă©tait composĂ© de la manière suivante : 3 Ă  5 escadrons Ă  l’avant, les vĂ©hicules et un escadron Ă  l’arrière. Il a prĂ©cisĂ© que lors de l’attaque de Gbarnga, ils ont utilisĂ© un Bissetti Ă  quatre canons, impossible Ă  transporter Ă  dos d’homme. 

Le Juge Ros a rĂ©torquĂ© que le prĂ©venu ne pouvait pas systĂ©matiquement disposer d’un Bissetti puisqu’il lui arrivait d’être en dehors de tout sentier ou chemin dans la brousse. Alieu Kosiah a expliquĂ© que les attaques principales se menaient par la route. Il a indiquĂ© que lors de l’attaque de Todi, ils sont passĂ©s par la brousse avant de rejoindre la route principale et qu’il Ă©tait le premier commandant Ă  entrer dans Todi après des combats très difficiles. Il a expliquĂ© avoir trouvĂ© 55 sacs de riz dans la maison du commandant Ă  Todi et avoir divisĂ© le butin en deux : une moitiĂ© pour les civils et l’autre pour les ULIMO. Alieu Kosiah a dĂ©clarĂ© que : « On considĂ©rait que tout ce qui venait du NPFL nous revenait Â». 

InterrogĂ© sur sa promotion de floating officer Ă  battalion commander, Alieu Kosiah a indiquĂ© que Alhaji Kromah avait donnĂ© l’ordre spĂ©cial de le promouvoir. QuestionnĂ© sur les critères lui ayant permis d’être promu en tant que regional commander de Zorzor, le prĂ©venu a dĂ©clarĂ© n’avoir jamais demandĂ© Ă  Kromah les raisons pour lesquelles il l’avait promu Ă  ce poste. Il a ajoutĂ© que son expĂ©rience en tant qu’ancien soldat de l’AFL avait probablement donnĂ© confiance en ses capacitĂ©s Ă  protĂ©ger Zorzor. 

Le PrĂ©sident a demandĂ© au prĂ©venu s’il n’aurait pas Ă©tĂ© plus logique de nommer Ă  ce poste un local commander ou un area district commander qui avait dĂ©jĂ  une expĂ©rience en tant que commandant. Alieu Kosiah a dĂ©clarĂ© qu’il n’avait pas posĂ© la question Ă  Kromah et a expliquĂ© que Deku avait dĂ©jĂ  Ă©tĂ© nommĂ© adjoint du chief of staff alors que Kobra, basĂ© Ă  Kolahun, n’était pas un ancien soldat. 

InterrogĂ© sur sa mission Ă  Zorzor, le prĂ©venu a indiquĂ© qu’il devait s’assurer que Zorzor ne tombe pas entre les mains du NPFL. QuestionnĂ© sur les moyens mis Ă  sa disposition pour rĂ©aliser cette mission, Alieu Kosiah a dĂ©clarĂ© qu’il avait Ă  sa disposition des hommes, des voitures, des munitions, des RPG. Il a indiquĂ© qu’il Ă©tait possible de se ravitailler en munitions Ă  Voinjama et de faire venir des Bissetti en soutien pour repousser les grandes attaques. 

Le PrĂ©sident lui a rappelĂ© qu’il a dĂ©clarĂ© devant le MPC qu’à son arrivĂ©e Ă  Zorzor, il y avait quelques maisons, mais aucun civil. Sur question, Alieu Kosiah a indiquĂ© que les civils avaient fui en GuinĂ©e car Zorzor Ă©tait une zone de combat. 

Le PrĂ©sident lui a ensuite demandĂ© si ses dĂ©clarations, selon lesquelles les ULIMO avaient plus de ressources que les civils Ă  Voinjama de sorte qu’il n’était pas nĂ©cessaire de voler, Ă©taient valables de manière gĂ©nĂ©rale ou seulement pour Voinjama. Le prĂ©venu a rĂ©pondu que les ULIMO recevaient des ravitaillements depuis la GuinĂ©e, car dans le Lofa, la guerre civile faisait rage depuis trois ans avant l’arrivĂ©e des ULIMO, de sorte que les rĂ©coltes n’étaient pas rĂ©gulières. 

InterrogĂ© sur la manière dont il a fait valoir son autoritĂ©, alors qu’il a dĂ©clarĂ© qu’il n’avait pas Ă©tĂ© prĂ©sent lors de la plupart des captures et qu’il Ă©tait difficile d’établir son autoritĂ© (« Where were you when we were here Â»), Alieu Kosiah a rĂ©torquĂ© qu’il n’avait pas fait de telles dĂ©clarations, mais avait dit que Pepper & Salt n’était pas prĂ©sent lors de la capture de Zorzor et que les soldats disaient cette phrase derrière son dos. Selon le prĂ©venu, Pepper & Salt est allĂ© capturer Voinjama pour prouver Ă  ses soldats qu’il Ă©tait un bon commandant. 

Sur question, Alieu Kosiah a déclaré qu’il n’avait pas capturé Zorzor. Le Président l’a donc réinterrogé sur la manière dont il a établi son autorité en tant que commandant. Alieu Kosiah a déclaré que PYJ le respectait car il l’avait vu combattre à Benefanaye. Selon lui, pour obtenir le respect des soldats au sein de l’ULIMO, il faut combattre sur le front.

InvitĂ© Ă  se dĂ©terminer sur le rapport de police, Alieu Kosiah a expliquĂ© qu’il Ă©tait contradictoire de le dĂ©signer Ă  la fois comme floating officer et comme H&H, car il n’était pas possible d’être l’un et l’autre. Il a ajoutĂ© que le terme « chief Â» n’était pas un grade militaire. Le prĂ©venu a ensuite indiquĂ© que Papa avait dĂ©clarĂ© qu’il (Alieu Kosiah) Ă©tait H&H, ce qui l’a beaucoup surpris car il n’a jamais Ă©tĂ© H&H. A cet Ă©gard, Alieu Kosiah a renvoyĂ© la Cour aux tĂ©moignages de Lamine Kenneh, Kwamex Fofana et Omaru Musa Kelleh et a indiquĂ© qu’aucun soldat ULIMO n’avait dit qu’il Ă©tait H&H. 

Selon le prĂ©venu, les enquĂŞteurs ne connaissent pas la dĂ©finition de H&H. Il a indiquĂ© que ses explications Ă  propos de la signification du terme H&H sont corroborĂ©es par les dĂ©clarations de Fofana, qui a dĂ©clarĂ© qu’il n’y avait pas de H&H dans le comtĂ© du Lofa avant la scission. Alieu Kosiah a ajoutĂ© que le H&H faisait partie du staff du field commander. Selon lui, le H&H dĂ©signe le lieu oĂą se trouve le field commander et non une personne. Il a expliquĂ© qu’il y avait des sous-quartiers-gĂ©nĂ©raux partout et que le H&H les regroupait tous en un lieu, Ă  savoir Tubmanburg ou Bomi Hill avant la scission. Le prĂ©venu a expliquĂ© qu’au sein de ce quartier-gĂ©nĂ©ral se trouvaient le commanding general et son staff, ainsi que la personne appelĂ©e H&H commander, dont le rĂ´le Ă©tait de garder les portes, contrĂ´ler les activitĂ©s des bureaux et surveiller les entrepĂ´ts de munitions. Alieu Kosiah a expliquĂ© que pour se ravitailler en munitions, il fallait soumettre un formulaire signĂ© par le field commander au S4, subsidiairement au H&H. Selon le prĂ©venu, le H&H n’avait pas le pouvoir de dĂ©livrer un tel document. 

Alieu Kosiah a indiqué avoir expliqué au Procureur la signification du terme H&H et la raison pour laquelle il ne faisait aucun sens de dire qu’il y avait un H&H dans le Lofa avant la scission, mais ce dernier a fait la sourde oreille selon lui. Le prévenu a ajouté que LSM l’avait initialement désigné comme étant le H&H avant de changer d’avis et de désigner Pepper & Salt. Alieu Kosiah s’est ensuite efforcé de démontrer que les déclarations de LSM à ce sujet étaient fluctuantes et peu crédibles.

Le PrĂ©sident est revenu sur la nomination du prĂ©venu en tant qu’adjoint de la police civile au LibĂ©ria (Deputy Director of the CID) par le chef des ULIMO et lui a demandĂ© de citer les autres postes auxquels le chef des ULIMO avait le pouvoir de dĂ©signer quelqu’un. Selon le prĂ©venu, les postes du gouvernement d’intĂ©rim Ă©taient rĂ©partis entre les ULIMO-K, les ULIMO-J, les NPFL et les civils. Les ULIMO-K disposaient d’environ 25% des postes. 

InterrogĂ© sur les mĂ©rites ayant justifiĂ© sa nomination Ă  ce poste important, Alieu Kosiah a rĂ©pĂ©tĂ© qu’il n’avait pas demandĂ© Ă  Kromah pourquoi il l’avait nommĂ© et a indiquĂ© que seul Junge Jabbah n’avait pas Ă©tĂ© nommĂ© Ă  un poste. Dombuyah a Ă©tĂ© nommĂ© chief of staff du nouveau gouvernement et la majoritĂ© des commandants ULIMO ont Ă©galement Ă©tĂ© nommĂ©s Ă  un poste par Kromah. 

A la question de savoir s’il Ă©tait satisfait de cette nomination, Alieu Kosiah a rĂ©pondu : Â« C’est le travail le plus important que j’ai eu, car le reste du temps, j’étais utilisĂ© comme un animal dans la brousse Â». Le PrĂ©sident lui a demandĂ© pourquoi il avait dĂ©jĂ  Ă©tĂ© remplacĂ© avant l’élection Taylor. Le prĂ©venu a Ă©voquĂ© un problème entre le directeur et lui. Il a expliquĂ© avoir Ă©tĂ© remplacĂ© lorsque Kromah envisageait de mener une attaque depuis Foya contre les RUF en Sierra Leone, qui n’a finalement pas eu lieu. 

Me Gianoli interroge Alieu Kosiah : 

Sur question, Alieu Kosiah a indiquĂ© qu’il n’avait pas une connaissance aussi dĂ©taillĂ©e de la faction ULIMO Ă  l’époque de la guerre civile. InterrogĂ© sur la manière dont il a complĂ©tĂ© ses connaissances, le prĂ©venu a expliquĂ© avoir lu la dĂ©position de Fofana, qui lui a donnĂ© beaucoup d’informations sur la crĂ©ation des ULIMO. Il a ajoutĂ© que son ami DukulĂ© lui avait expliquĂ© en dĂ©tail la capture de Foya. 

InvitĂ© Ă  dĂ©crire son quotidien Ă  Voinjama, Alieu Kosiah a expliquĂ© qu’il n’y avait eu que deux attaques Ă  repousser Ă  ce moment-lĂ  et que le reste du temps, il lui arrivait de se rendre Ă  Foya ou Ă  Kolahun pour rendre visite Ă  sa petite-amie. 

InterrogĂ© sur la distance Ă  laquelle se trouvaient les lignes de front depuis Voinjama, Alieu Kosiah a indiquĂ© qu’il y avait une entre Zorzor et le pont et une autre au Lofa Bridge entre les ULIMO-K et les ULIMO-J. Me Gianoli lui a demandĂ© sur quelle ligne de front il se rendait Ă  cette pĂ©riode. Alieu Kosiah a rĂ©pondu que les gens de Zorzor n’avaient pas besoin de son aide et qu’il Ă©tait restĂ© Ă  Voinjama pour repousser les deux attaques. 

InterrogĂ© sur la frĂ©quence Ă  laquelle il se rendait sur la ligne de front de 1994 Ă  1995, le prĂ©venu a indiquĂ© qu’il ne s’y rendait pas très souvent lorsqu’il Ă©tait Ă  Zorzor et plus frĂ©quemment Ă  partir de 1995, soit environ une fois par mois. 

A la question de savoir combien de temps il restait sur la ligne de front, Alieu Kosiah a rĂ©pondu qu’il fallait procĂ©der Ă  des changements toutes les deux semaines ou tous les mois pour que les soldats restent efficaces. InvitĂ© Ă  dĂ©crire son quotidien au front, le prĂ©venu a expliquĂ© qu’ils se faisaient attaquer et repoussaient les attaques ou contournaient l’ennemi pour tendre des embuscades. Selon lui, il y avait des combats en permanence. 

Me Gianoli a demandĂ© Ă  son client s’ils disposaient d’une base arrière ou s’ils Ă©taient constamment en embuscade. Alieu Kosiah a rĂ©pondu que les combats avaient lieu la plupart du temps en ville et qu’il arrivait de passer par la brousse pour tendre des embuscades. Il a expliquĂ© que certains hommes Ă©taient dĂ©ployĂ©s Ă  plusieurs endroits pour s’assurer que la zone Ă©tait sĂ©curisĂ©e alors que d’autres restaient en ville pour Ă©viter d’être attaquĂ©s. Il a ajoutĂ© qu’ils disposaient de RPG et d’armes anti-aĂ©riennes, Ă  l’exclusion d’artillerie lourde. 

InterrogĂ© sur la distance entre leurs vĂ©hicules et la zone de combat, Alieu Kosiah a expliquĂ© qu’il y avait deux types de vĂ©hicules : la voiture du commandant avec les munitions qui restait Ă  25 km de la ligne de front et la voiture du Bissetti qui allait partout. Sur question, le prĂ©venu a indiquĂ© la distance Ă  parcourir par les soldats pour rejoindre la ligne de front dĂ©pendait d’oĂą celle-ci se situait et cela pouvait prendre parfois deux heures, parfois toute une journĂ©e. Me Gianoli lui a demandĂ© s’ils restaient plusieurs jours ou semaines dans la brousse. Alieu Kosiah a rĂ©torquĂ© qu’ils n’étaient pas dans la brousse mais dans des villages, tels que Salaye. 

A la question de savoir s’il choisissait les soldats sous ses ordres en fonction de leur ethnie, Alieu Kosiah a rĂ©pondu par la nĂ©gative et a dĂ©clarĂ© qu’à chaque fois qu’il se rendait sur la ligne de front, il se trouvait Ă  l’avant. 

Le MPC n’a pas eu de questions. 

Me Werner interroge Alieu Kosiah :

Sur question, Alieu Kosiah a indiquĂ© qu’il n’y avait pas de radio Ă  Foya. InterrogĂ© au sujet de l’igname qu’ils mangeaient en l’absence de ravitaillement, le prĂ©venu a prĂ©cisĂ© que c’était quelque chose de semblable au manioc. 

Me Wavre interroge Alieu Kosiah :

A la question de savoir si les radios étaient des objets rares ou communs au sein de l’ULIMO, Alieu Kosiah a répondu qu’il s’agissait d’objets rares. Il a précisé qu’il n’y avait pas de radio à Zorzor avant la capture de Gbarnga. Selon lui, il n’y avait pas de radio à Foya et Kolahun car ces zones étaient calmes. Or, les radios étaient déployées sur des points chauds. Il a déclaré qu’un témoin avait indiqué qu’il y avait une radio à Foya, alors que cela était faux. Selon le prévenu, l’absence de radio à Foya a permis d’éviter un bain de sang lorsque Pepper & Salt a été délogé.

Interrogé sur les zones où les radios étaient déployées, Alieu Kosiah a indiqué qu’il y avait des radios dans les zones importantes. Il a ajouté que contrairement aux déclarations de LSM, les ULIMO ne disposaient pas de radios satellites. Alieu Kosiah a précisé que les ULIMO avaient des radios fixes de marque Yaesu.

InvitĂ© Ă  prĂ©ciser Ă  quelle ville de Fassama il avait fait rĂ©fĂ©rence prĂ©cĂ©demment, Alieu Kosiah a indiquĂ© s’être rĂ©fĂ©rĂ© au Fassama de l’ethnie Kpelle et a prĂ©cisĂ© qu’il y avait une grande prison Ă  proximitĂ©. A la question de savoir s’il y avait d’autres raisons stratĂ©giques – outre la prison – d’avoir une radio dans cette ville, le prĂ©venu a rĂ©pondu que Fassama Ă©tait une base pour Dorley et a prĂ©cisĂ© qu’il n’y avait des radios nulle part avant la capture de Gbarnga. 

Me Wavre a demandĂ© au prĂ©venu pour quelle raison un commandant aussi important que Dorley se trouvait dans cette ville. Alieu Kosiah a expliquĂ© que Dorley Ă©tait passĂ© par Fassama pour capturer Zorzor et qu’après la capture de Zorzor, Fassama n’avait plus la mĂŞme importance. Me Wavre a insistĂ© pour savoir pourquoi il y avait eu une radio Ă  Fassama. Alieu Kosiah a rĂ©pĂ©tĂ© qu’il y avait des radios Ă  Monrovia, Conakry et Ă  Swan alors que ce n’étaient pas des lignes de front. Il a Ă©galement rĂ©pĂ©tĂ© qu’il n’y avait jamais eu de radio Ă  Foya et dĂ©clarĂ© que la marque de radio Ă©voquĂ©e par LSM n’existait pas Ă  l’époque des ULIMO. 

Me Jakob interroge Alieu Kosiah : 

InterrogĂ© sur les sources d’approvisionnement en essence des ULIMO hormis la GuinĂ©e, Alieu Kosiah a dĂ©clarĂ© qu’il y en avait probablement d’autres mais qu’il n’était pas au courant. Il a expliquĂ© qu’à sa connaissance, tout le ravitaillement des ULIMO-K venait de GuinĂ©e, qu’il s’agisse d’essence, de nourriture ou de munitions. 

QuestionnĂ© sur l’abondance du ravitaillement en essence, le prĂ©venu a indiquĂ© qu’à son souvenir, ils n’avaient pas manquĂ© d’essence pendant la guerre, mais qu’il ne pouvait toutefois pas exclure qu’il y ait eu une pĂ©nurie. Il a ajoutĂ© qu’ils avaient eu des problèmes d’approvisionnement en munitions Ă  leur arrivĂ©e. 

Me Jakob a demandĂ© au prĂ©venu s’il Ă©tait libre de puiser dans les stocks d’essence de l’ULIMO pour son utilisation personnelle. Alieu Kosiah a rĂ©pondu par la nĂ©gative. InterrogĂ© sur la manière dont il se procurait du carburant pour aller rendre visite Ă  sa famille en GuinĂ©e en moto, le prĂ©venu a expliquĂ© qu’un litre d’essence coĂ»tait 800 francs (i.e. 8 centimes) et que deux litres suffisaient pour faire l’aller-retour Ă  Macenta, de sorte que cela ne lui coĂ»tait pas cher. A la question de savoir oĂą il achetait cette essence, Alieu Kosiah a rĂ©pondu qu’il achetait un litre Ă  la frontière. 

Me Jakob a demandé au prévenu quelle était selon lui la ville la plus importante pour l’organisation des ULIMO une fois le Lofa sous contrôle. Alieu Kosiah a répondu qu’il s’agissait de Voinjama. Interrogé sur l’organisation des sous-quartiers-généraux et en particulier si cette structure était reproduite dans des villes secondaires qui auraient été par hypothèse subordonnées à Voinjama, Alieu Kosiah a déclaré que Pepper & Salt était responsable du comté du Lofa avant l’arrivée de Dombuyah, de sorte que les gens de Zorzor, Kolahun, Foya et Vahun étaient sous ses ordres. Selon le prévenu, Voinjama était le quartier-général de tous ceux qui étaient sous les ordres de Pepper & Salt et Tubmanburg était le quartier-général de Voinjama, Lofa Birdge, Kakata et Todi.

Me Jakob a demandĂ© au prĂ©venu s’il pouvait exlcure que le terme « H&H Â» ait Ă©tĂ© utilisĂ© pour dĂ©signer Voinjama vis-Ă -vis des autres villes secondaires du Lofa. Alieu Kosiah a rĂ©pondu qu’il ne pouvait pas y avoir deux H&H, de la mĂŞme manière qu’il n’y avait qu’un seul Pentagone aux USA. Selon lui, se trouvaient au sein du H&H le ministre de la dĂ©fense, le chief of staff, la direction des armĂ©es et le field commander. Il a ajoutĂ© que le seul moment oĂą il y a pu y avoir un H&H Ă  Voinjama, c’était lorsque Dombuyah et la totalitĂ© de son staff s’y sont rendus. 

Sur question, Alieu Kosiah a dĂ©clarĂ© qu’il ne connaissait pas Ansu Kromah, mais connaissait en revanche Mansu Kromah. 

La Cour rĂ©interroge Alieu Kosiah :

InterrogĂ© sur l’utilisation des armes lourdes anti-aĂ©riennes, Alieu Kosiah a expliquĂ© qu’il n’y avait pas d’attaques aĂ©riennes dans la mesure oĂą seul l’ECOMOG disposaient d’aĂ©ronefs. Il a ajoutĂ© que les armes anti-aĂ©riennes Ă©taient des armes très bruyantes utilisĂ©es pour faire peur Ă  l’ennemi. 

Questions relatives à la première guerre civile

La Cour interroge Alieu Kosiah : 

Le PrĂ©sident a rappelĂ© au prĂ©venu ses dĂ©clarations en première instance selon lesquelles il a divorcĂ© car il ne voulait pas que son Ă©pouse supporte les consĂ©quences de ses actes. InterrogĂ© sur les faits sous-tendant ces consĂ©quences, Alieu Kosiah a indiquĂ© que sa vie Ă©tait dĂ©truite puisqu’il avait la rĂ©putation d’un criminel de guerre et qu’il ne voulait pas que sa femme ait Ă  traverser cela. Il a ajoutĂ© que son fils ainsi que le fils de l’un de ses frères s’appelaient Alieu Kosiah comme lui, mais il leur a conseillĂ© d’utiliser un middle name car quelle que ce soit l’issue du procès, tout reste sur internet. 

Sur question, Alieu Kosiah a confirmĂ© avoir entendu parler du massacre Ă  l’église luthĂ©rienne de Monrovia. Il a indiquĂ© en avoir Ă©tĂ© informĂ© en tant que soldat de l’AFL. InterrogĂ© sur les informations qu’il a reçues, le prĂ©venu a indiquĂ© qu’un groupe de Satou du Nimba [phon.] (i.e. des soldats Krahns) avait Ă©tĂ© sĂ©vèrement battu par les NPFL lors d’une embuscade. Pour se venger, ils ont tuĂ© un grand nombre d’innocents. Selon le prĂ©venu, la plupart des victimes Ă©taient des Gios et des Manos. 

Le PrĂ©sident a demandĂ© au prĂ©venu comment il pouvait ĂŞtre certain que ces informations Ă©taient vraies dans la mesure oĂą la première victime de la guerre Ă©tait la vĂ©ritĂ© selon ses propres dĂ©clarations. Alieu Kosiah a dĂ©clarĂ© qu’il n’y avait pas de guerre propre et qu’il fallait faire attention Ă  distinguer le vrai du faux. Il a expliquĂ© que Moses Right, qui Ă©tait battalion commander Ă  Camp Suffering, avait Ă©tĂ© accusĂ© d’avoir commis ce crime par Alain Werner et son Ă©quipe, alors que les Satou Ă©taient sous les ordres de Doe. Alieu Kosiah a dĂ©clarĂ© avoir du mal Ă  croire aux accusations d’Alain Werner puisqu’il n’est rien arrivĂ© Ă  tous les officiers Gios de Camp Suffering. 

InterrogĂ© sur le massacre de 600 personnes Ă  Harbel-Carter Camp le 6 juin 1993, Alieu Kosiah a confirmĂ© en avoir entendu parler et avoir vu les civils s’enfuir de cet endroit alors qu’il se trouvait Ă  Todi Junction. InvitĂ© Ă  raconter ce qu’il avait entendu Ă  propos de ce massacre, le prĂ©venu a indiquĂ© qu’en juin ou juillet 1993, entre 3’000 et 4’000 personnes sont arrivĂ©es Ă  Todi Junction dans un endroit nommĂ© Division N°7 dans une zone de Firestone. Selon lui, l’endroit oĂą le crime a Ă©tĂ© commis se trouvait Ă  moins de 30 km de lĂ  oĂą il se trouvait. Les civils ont dĂ©clarĂ© qu’il y avait des combats entre le LPC et le NPFL. Les NPFL ont tuĂ© les civils lorsqu’ils sont venus reprendre la zone au LPC. Selon Alieu Kosiah, le rapport de la TRC et la presse ont accusĂ© faussement les LPC d’avoir commis ce massacre, puisque les responsables Ă©taient les NPFL. Il a ajoutĂ© que les ULIMO savaient dès le dĂ©but que les NPFL Ă©taient responsables et en avaient informĂ© l’ECOMOG ainsi que le gouvernement d’intĂ©rim. 

Sur question, Alieu Kosiah a confirmĂ© avoir pris connaissance du rapport de la police judiciaire fĂ©dĂ©rale au sujet de la première guerre civile et du rĂ´le des ULIMO. Le PrĂ©sident lui a demandĂ© s’il avait Ă©tĂ© surpris de l’ampleur des exactions commises dans le Lofa dont le rapport faisait Ă©tat. Alieu Kosiah a rĂ©pondu que ni le procureur ni la police ne s’étaient rendus au LibĂ©ria et que le rapport se limitait Ă  citer d’autres sources. Il a rĂ©pĂ©tĂ© que les autoritĂ©s suisses n’avaient rien vĂ©rifiĂ© de manière indĂ©pendante puisqu’elles ne sont pas rendues sur place. Selon le prĂ©venu, le rapport Ă©voque notamment un jugement rendu par une cour martiale Ă  Macenta, alors qu’il n’y a jamais eu de tribunal dans cette ville. Le PrĂ©sident a rĂ©itĂ©rĂ© sa question et Alieu Kosiah a dĂ©clarĂ© qu’il avait bien Ă©videmment Ă©tĂ© surpris de l’ampleur des violations commises. 

Le PrĂ©sident a ensuite indiquĂ© que le rapport faisait Ă©tat de plus de 100 fosses communes avec plus de 8’000 corps pour la pĂ©riode allant de 1989 Ă  2003 et a demandĂ© au prĂ©venu s’il pouvait exclure qu’une ou plusieurs de ces fosses communes soit attribuable aux ULIMO. Alieu Kosiah a dĂ©clarĂ© qu’il l’ignorait car il n’était pas prĂ©sent. Il a rĂ©pĂ©tĂ© qu’il n’y avait pas de guerre propre et a considĂ©rĂ© que la pĂ©riode de rĂ©fĂ©rence Ă©tait longue et avait vu s’affronter diffĂ©rentes factions. Selon lui, il n’y aucun moyen de savoir Ă  quelle faction attribuer une fosse commune.

Alieu Kosiah a ensuite racontĂ© l’histoire d’un commandant ULIMO du nom de Famo Kenneh [phon.]. Ce dernier s’est rendu au checkpoint de Fifteen Gate avec sa mère, son frère et ses deux sĹ“urs. Alors que sa mère et ses frères et sĹ“urs ont Ă©tĂ© placĂ©s en dĂ©tention car ils ont admis ĂŞtre Mandingos, Famo Kenneh a quant Ă  lui dĂ©clarĂ© qu’il Ă©tait Congo. Les membres de sa famille ont Ă©tĂ© emprisonnĂ©s puis tuĂ©s par les NPFL, alors que Famo Kenneh a pris la fuite avant d’être arrĂŞtĂ© Ă  Zorzor. Alieu Kosiah a expliquĂ© que les NPFL considĂ©raient que ceux qui arrivaient jusqu’à Zorzor Ă©taient probablement des Mandingos qui tentaient de rejoindre la GuinĂ©e. Selon le prĂ©venu, Famo Kenneh a Ă©tĂ© emprisonnĂ© avec 45 autres personnes. Les NPFL tuaient deux dĂ©tenus par jour. Famo Kenneh Ă©tait l’un des deux derniers survivants et a rĂ©ussi Ă  s’enfuir par le toit de la prison un jour de pluie. Alieu Kosiah s’est demandĂ© oĂą se trouvaient les tombes de ces 43 Mandingos tuĂ©s Ă  Zorzor. Il a ajoutĂ© : Â« Quand on voit une tombe 40 ans après la fin d’une guerre civile et qu’on dĂ©clare qu’il s’agit de victimes des ULIMO, pour ma part, je trouve qu’il est difficile de savoir qui a fait quoi Â». 

Le PrĂ©sident lui a demandĂ© s’il avait Ă©tĂ© tĂ©moin de ces faits. Alieu Kosiah a rĂ©pondu par la nĂ©gative et a indiquĂ© que Famo Kenneh les lui avait racontĂ©s. 

Le Président a présenté un tableau répertoriant les massacres commis par les ULIMO lors de l’année 1993. A la question de savoir si ces chiffres lui paraissaient plausibles, Alieu Kosiah a répondu que personne ne pouvait mener une guerre propre, mais qu’il ne fallait pas pour autant prendre ces informations pour argent comptant. Le prévenu a remis en cause certains considérants du jugement de première instance concernant le Black Monday et le Black Friday, en particulier le fait que les premiers juges ont retenu que seuls les soldats ULIMO ne se souvenaient pas du Black Monday et du Black Friday en raison des actes horribles qu’ils avaient commis. Selon Alieu Kosiah, la question à se poser est plutôt de savoir pourquoi seules les personnes qui sont passées par l’ONG se souviennent du Black Monday, alors que tous les autres témoins, James Faseukoi compris, n’ont jamais entendu parler ni d’un Black Friday ni d’un Black Monday

Alieu Kosiah a dĂ©clarĂ© qu’on ne pouvait pas l’accuser d’avoir menti en indiquant qu’il n’avait pas connaissance d’un Black Friday ou d’un Black Monday. Il a citĂ© le tĂ©moignage de Massa Washington sur la manière dont les enquĂŞtes Ă©taient menĂ©es au sein de la TRC. Le prĂ©venu a sous-entendu que les personnes chargĂ©es de prendre des dĂ©positions recevaient une somme d’argent pour chaque dĂ©position prise. Il a indiquĂ© avoir lu deux ou trois dĂ©positions Ă  teneur desquelles les responsables du Black Monday seraient les LURD qui sont venus de Kolahun Ă  Voinjama en 2002. Le Black Monday serait ainsi situĂ© Ă  une toute autre date et aurait Ă©tĂ© commis par une autre faction. Au vu de ce qui prĂ©cède, Alieu Kosiah a invitĂ© les juges Ă  la prudence. 

Le PrĂ©sident a Ă©voquĂ© le rapport de MSF selon lequel les habitants Ă©taient utilisĂ©s comme esclaves entre juillet 1993 et dĂ©cembre 1994 Ă  Foya Kamara et dans les villages situĂ©s Ă  proximitĂ© de Kolahun et Voinjama. Sur question, le prĂ©venu a dĂ©clarĂ© qu’il n’avait pas connaissance de ces pratiques. InvitĂ© Ă  expliquer pourquoi il n’en avait pas connaissance alors mĂŞme qu’il Ă©tait membre de l’ULIMO et basĂ© dans cette zone, Alieu Kosiah a indiquĂ© qu’il ne pouvait ni confirmer ou infirmer que de telles choses se soient produites puisqu’il n’avait rien vu de tel lorsqu’il Ă©tait basĂ© dans le Lofa. Il a ajoutĂ© qu’il n’avait pas non plus vu une seule ONG dans le Lofa. InterrogĂ© sur le vol de Oxfam commis par des soldats ULIMO, le prĂ©venu a dĂ©clarĂ© que cet Ă©vĂ©nement s’était produit après le cessez-le-feu. 

Questionné sur les tueries perpétrées par Pepper & Salt contre des civils en 1993 au nord du Lofa, tel que cela a été rapporté par des travailleurs humanitaires, Alieu Kosiah a déclaré qu’il n’était pas avec Pepper & Salt à cette époque. A la question de savoir s’il avait connaissance des aveux faits par l’ULIMO concernant les atrocités commises contre les Kissis dans la région de Foya, Alieu Kosiah a indiqué qu’il n’en avait aucune idée et qu’il fallait s’adresser à Kromah à cet égard.

Le Président a demandé au prévenu d’expliquer les raisons pour lesquelles il n’était pas au courant d’un grand nombre d’informations alors même qu’il se trouvait dans le Lofa. Alieu Kosiah a rétorqué que ces informations étaient de simples ouï-dire et qu’il s’était limité à rapporter à la Cour ce qu’il avait vu et entendu.

ConfrontĂ© Ă  ses dĂ©clarations en première instance selon lesquelles les gens avaient commencĂ© Ă  l’appeler Physical Cash lorsqu’il a rejoint la police, Alieu Kosiah les a confirmĂ©es et a rĂ©pĂ©tĂ© que ce surnom lui avait Ă©tĂ© donnĂ© par Pepper & Salt dans le Lofa. Le PrĂ©sident lui a demandĂ© s’il avait connaissance d’un stratagème consistant Ă  utiliser un pseudonyme pour commettre des crimes contre les civils sous couvert d’une autre identitĂ©. Alieu Kosiah a reconnu que les gens avaient des surnoms, mais a indiquĂ© qu’il n’était pas au courant du fait que ces derniers aient Ă©tĂ© utilisĂ©s pour commettre des crimes. Il a ajoutĂ© que pour sa part, il s’était toujours appelĂ© Kosiah, Kos ou CO Kosiah. 

A la question de savoir si les Ă©coles Ă©taient fermĂ©es dans le Lofa pendant la guerre, le prĂ©venu a rĂ©pondu que les Ă©coles Ă©taient fermĂ©es oĂą il se trouvait et que personne ne lui avait rapportĂ© que les Ă©coles Ă©taient ouvertes sous l’occupation du NPFL. 

Le PrĂ©sident lui a ensuite demandĂ© de quelle manière les ULIMO s’assuraient que les personnes auxquelles ils infligeaient le tabĂ© n’étaient pas des civils. Alieu Kosiah a expliquĂ© que lorsqu’il arrivait dans une ville, il sollicitait le townchief pour obtenir des informations. Il a ajoutĂ© qu’il ordonnait Ă  ses soldats de considĂ©rer comme un civil toute personne qui ne portait ni arme ni ruban rouge ni uniforme. Le prĂ©venu s’est vantĂ© d’avoir ordonnĂ© la libĂ©ration de deux civils tabĂ©s par des soldats qui les soupçonnaient d’être des rebelles NPFL. Il a indiquĂ© qu’il insistait systĂ©matiquement pour que des vĂ©rifications soient faites, d’autant plus que certains civils avaient tendance Ă  se comporter comme des soldats ou de profiter de leur situation lorsqu’un membre de leur famille Ă©tait proche d’un commandant NPFL. 

Le Président lui a rappelé ses déclarations selon lesquelles il n’y avait plus de pillage en cours à son arrivée dans le Lofa et lui a demandé ce qui avait mis fin à ces pillages. Alieu Kosiah a répondu qu’il l’ignorait, mais pensait que cela s’expliquait peut-être par l’ordre de Dombuyah selon lequel aucun soldat ne devait être stationné dans un village, qu’il s’est chargé de transmettre aux commandants Mandingos le long de la route principale entre Voinjama et Vahun. Alieu Kosiah a ajouté qu’il ne voyait pas pourquoi des soldats devaient être stationnés dans les villages, dans la mesure où, selon lui, ils devaient être soit à Voinjama soit sur la ligne de front à Zorzor. Sur question, le prévenu a confirmé qu’il était floating officer à ce moment-là-

Le Juge Ros est revenu sur la pratique du tabĂ© et a demandĂ© au prĂ©venu quel sort Ă©tait rĂ©servĂ© aux soldats NPFL. Alieu Kosiah a rĂ©pĂ©tĂ© que les soldats NPFL capturĂ©s passaient un ou deux mois en prison, avant d’être confrontĂ©s Ă  une pĂ©riode d’établissement du lien de confiance au terme de laquelle ils pouvaient choisir de rejoindre les ULIMO ou rentrer chez eux. A la question de savoir s’il avait dĂ©jĂ  Ă©tĂ© confrontĂ© Ă  une telle situation, Alieu Kosiah a rĂ©pondu par l’affirmative en citant le capitaine Denis [phon.]. Il a indiquĂ© qu’ils ont dĂ©veloppĂ© un lien qui perdure Ă  ce jour. Alieu Kosiah a rĂ©pĂ©tĂ© qu’il ne devait pas rĂ©pondre de toutes les atrocitĂ©s commises pendant la guerre au LibĂ©ria, mais uniquement des accusations portĂ©es contre lui. 

Le PrĂ©sident a demandĂ© Ă  Alieu Kosiah d’expliquer pourquoi il avait dĂ©clarĂ© que Taylor se considĂ©rait comme le prĂ©sident du LibĂ©ria et pouvait prendre ce qu’il voulait. Le prĂ©venu a indiquĂ© avoir fait cette dĂ©claration en lien avec ce que les civils lui avaient rapportĂ©, Ă  savoir que Taylor avait pris le gĂ©nĂ©rateur de Voinjama pour l’utiliser Ă  Gbarnga. A la question de savoir si cette logique Ă©tait appliquĂ©e dans les territoires capturĂ©s par l’ULIMO, Alieu Kosiah a expliquĂ© que Taylor se considĂ©rait comme le prĂ©sident contrairement Ă  Kromah. Le prĂ©venu a ajoutĂ© n’avoir jamais vu Kromah donner l’ordre de prendre un gĂ©nĂ©rateur dans une ville pour l’utiliser dans une autre ville. 

Le PrĂ©sident a rappelĂ© au prĂ©venu ses dĂ©clarations selon lesquelles un soldat assignĂ© trop longtemps au mĂŞme endroit se sentait le roi sur place et lui a demandĂ© quelles Ă©taient les consĂ©quences d’un tel sentiment. Alieu Kosiah a rĂ©pondu qu’au sein de l’AFL, les soldats n’étaient pas assignĂ©s au mĂŞme endroit durant un longue pĂ©riode pour Ă©viter qu’ils s’habituent au mode de fonctionnement local. Il a ajoutĂ© que la mĂŞme règle aurait dĂ» ĂŞtre appliquĂ©e au sein de l’ULIMO. 

InterrogĂ© sur les maisons dans lesquelles il a logĂ©, le prĂ©venu a dĂ©clarĂ© que près de 80% de la population de Voinjama Ă©tait partie et qu’il y avait beaucoup de maisons vides, notamment dans le Mandingo Quarter oĂą il vivait. A la question de savoir si le fait de fuir sa maison Ă©quivalait Ă  un abandon de son droit de propriĂ©tĂ©, Alieu Kosiah a rĂ©pondu qu’il ignorait oĂą le PrĂ©sident voulait en venir puisqu’il s’éloignait des crimes qui lui Ă©taient reprochĂ©s. 

QuestionnĂ© sur les raisons pour lesquelles les parties plaignantes l’avaient pris pour cible, Alieu Kosiah a dĂ©clarĂ© : Â« Si je n’étais pas venu en Europe, aucun crime ne m’aurait Ă©tĂ© reprochĂ©. On me reproche ces crimes en raison du lieu oĂą je rĂ©side et pas en raison de ce que j’ai fait pendant la guerre Â». ConfrontĂ© au fait qu’il n’était pas le seul Mandingo en Europe, Alieu Kosiah a rĂ©torquĂ© qu’il Ă©tait le seul Mandingo en Suisse Ă  avoir fait partie de l’ULIMO.

InterrogĂ© sur sa rencontre avec HB, Alieu Kosiah a indiquĂ© qu’ils s’étaient rencontrĂ©s Ă  Monrovia en prĂ©sence d’Alain Werner en 2012 et non en 2009, 2010 ou 2011 comme le prĂ©tend HB. Lors de cette rencontre, HB aurait dĂ©clarĂ© qu’il ne savait rien sur Alieu Kosiah, alors que devant le Procureur il a indiquĂ© tout savoir des crimes commis par ce dernier en 1993. Se rĂ©fĂ©rant Ă  des Ă©changes d’e-mails entre Alain Werner et HB, Alieu Kosiah a dĂ©clarĂ© qu’il voulait savoir pourquoi Alain Werner avait mis la pression Ă  HB pour qu’il trouve des informations sur lui. Il a ajoutĂ© : « La vĂ©ritĂ©, c’est que c’est une organisation criminelle Â», ce qui a amenĂ© le PrĂ©sident Ă  lui rappeler le caractère punissable des dĂ©nonciations calomnieuses. Alieu Kosiah a alors rappelĂ© les derniers dĂ©veloppements de la procĂ©dure finlandaise sur le manque de crĂ©dibilitĂ© des parties plaignantes et a dĂ©clarĂ© que cela devait faire office de signal d’alarme. 

Alieu Kosiah s’est attelĂ© Ă  dĂ©montrer l’impossibilitĂ© pour Gibril Massaquoi d’avoir commis les crimes qui lui sont reprochĂ©s et l’absence de crĂ©dibilitĂ© du tĂ©moignage de B. Kromah. Il a ensuite dĂ©clarĂ© que le Procureur avait dit Ă  propos Alain Werner qu’il portait deux casquettes et nuisait Ă  la procĂ©dure. Alieu Kosiah a demandĂ© au Procureur ce qu’il avait fait de cette opinion. Il a ajoutĂ© qu’Alain Werner avait des connexions avec les procĂ©dures en Finlande et en Angleterre contrairement Ă  ce que ce dernier prĂ©tendait. 

Alieu Kosiah s’est ensuite rĂ©fĂ©rĂ© Ă  une interview donnĂ©e par Alain Werner aux mĂ©dias français et a indiquĂ© que Alain Werner avait menti lorsqu’il avait prĂ©tendu que son organisation n’allait pas chercher les victimes, mais que les victimes venaient Ă  eux. Le prĂ©venu a ajoutĂ© que les victimes Mandingos dans l’affaire Agnes Taylor avaient toutes obtenues l’asile grâce Ă  Alain Werner et HB. Selon lui, un des tĂ©moins a dĂ©clarĂ© : « Quand vous ĂŞtes pauvre, vous acceptez beaucoup de choses Â». Il a ajoutĂ© que son père lui disait toujours : Â« Lorsqu’on Ă©tait pauvre, on perd sa dignitĂ© Â». Pour Alieu Kosiah, telle est la rĂ©alitĂ© en Afrique. A ce titre, il a donnĂ© l’exemple des 7’000 ou 8’000 personnes rĂ©cemment dĂ©cĂ©dĂ©es en MĂ©diterranĂ©e alors qu’elles voulaient vivre une meilleure vie en Europe. Le prĂ©venu a rappelĂ© les salaires avancĂ©s par les parties plaignantes et a dĂ©clarĂ© que ces chiffres n’étaient pas crĂ©dibles. 

Le PrĂ©sident a demandĂ© au prĂ©venu de citer les noms des villages qui n’avaient pas encore Ă©tĂ© capturĂ©s lors de son arrivĂ©e dans le Lofa. Alieu Kosiah a rĂ©pĂ©tĂ© n’avoir participĂ© Ă  la capture d’aucune ville dans le comtĂ© du Lofa, ni Zorzor, ni Voinjama, ni Kolahun, ni Foya. Il a indiquĂ© avoir rencontrĂ© Pepper & Salt Ă  Monrovia et qu’à leur retour dans le Lofa, Voinjama avait Ă©tĂ© capturĂ©e, puis Foya et Kolahun. Il a prĂ©cisĂ© s’être rendu Ă  Foya trois mois après sa capture. 

Sur question, Alieu Kosiah a indiquĂ© qu’à son arrivĂ©e, des batailles Ă©taient en cours au niveau du pont entre le comtĂ© de Bong et le comtĂ© du Lofa. InterrogĂ© sur la personne en charge au sein des ULIMO, il a prĂ©cisĂ© que Pepper & Salt Ă©tait responsable de l’Upper Lofa. 

Le PrĂ©sident lui a ensuite demandĂ© en quoi le fait de manger des cĹ“urs humains Ă©tait incompatible avec sa culture qui lui interdisait de consommer du porc. Le prĂ©venu a dĂ©clarĂ© que les musulmans ne mangeaient pas de porc et qu’il ne voyait donc pas comment ils pourraient manger de la chair humaine. InterrogĂ© sur le lien entre la chair de porc et la chair humaine, Alieu Kosiah a dĂ©clarĂ© que sa religion lui imposait de ne pas manger de viande de porc et que la dernière chose qu’il ferait serait de manger la chair d’un autre ĂŞtre humain. Sur question, le prĂ©venu a confirmĂ© qu’il mangeait de la viande, notamment de la viande de vache. Le PrĂ©sident lui a demandĂ© s’il fallait comprendre de ses dĂ©clarations que la viande humaine Ă©tait assimilable Ă  de la viande de porc. Alieu Kosiah a rĂ©pondu que manger de la chair humaine Ă©tait la pire chose que l’on puisse faire. Il a ajoutĂ© que le Coran autorisait un musulman Ă  manger de la viande de porc s’il avait faim et a indiquĂ© ne pas avoir lu qu’il Ă©tait permis de manger de la chair humaine. 

InterrogĂ© sur le type de pistolet qu’il possĂ©dait lors de la mission de Todi, Alieu Kosiah a indiquĂ© qu’il s’agissait d’un 45 (chargeur dans la crosse) achetĂ© sur Clay Street. A la question de savoir pourquoi il l’avait revendu alors que la guerre Ă©tait en cours, le prĂ©venu a indiquĂ© que le pistolet lui appartenait et qu’il avait dĂ©cidĂ© de le revendre. 

A la question de savoir si son expĂ©rience confirmait les conclusions du rapport de police, selon lesquelles les victimes civiles Ă©taient plus importantes que les victimes militaires, Alieu Kosiah a rĂ©pondu par la nĂ©gative. Sur question, il a dĂ©clarĂ© qu’il ignorait combien de soldats avaient perdu la vie durant la guerre civile. Il a indiquĂ© se souvenir d’avoir perdu 86 hommes en quittant le Sierra Leone, mais avoir perdu le fil par la suite. Selon lui, il y a eu beaucoup de pertes militaires. InterrogĂ© sur le nombre d’hommes qu’il a perdus, Alieu Kosiah a dĂ©clarĂ© qu’il ignorait le nombre exact. 

Le PrĂ©sident lui a demandĂ© comment il avait fait la connaissance de sa petite-amie Ă  Bolahun. Le prĂ©venu a expliquĂ© l’avoir rencontrĂ©e Ă  travers une autre fille, qui Ă©tait la petite-amie de l’un de ses amis. Sur question, Alieu Kosiah a indiquĂ© que sa petite-amie Ă©tait âgĂ©e de 17 ou 18 ans et qu’ils Ă©taient restĂ©s ensemble de 1994 Ă  1995, jusqu’à ce qu’il aille en prison. A la question de savoir s’il avait cĂ©lĂ©brĂ© son anniversaire, le prĂ©venu a rĂ©pondu qu’ils ne pensaient pas Ă  ce genre de choses pendant la guerre. 

QuestionnĂ© sur les allĂ©gations de relations sexuelles avec une jeune fille Ă  Zorzor qui ressortent du dossier, Alieu Kosiah a dĂ©clarĂ© qu’il n’avait jamais rencontrĂ© cette jeune fille et que la seule connexion entre eux Ă©tait Alain Werner. 

A la question de savoir s’il avait reçu une formation militaire en droit international au dĂ©but de sa carrière au sein de l’ULIMO, Alieu Kosiah a rĂ©pondu par la nĂ©gative. Il a prĂ©cisĂ© avoir uniquement appris le code de conduite. 

Me Gianoli interroge Alieu Kosiah :

InterrogĂ© sur le nombre de femmes qu’il a eues, Alieu Kosiah a indiquĂ© avoir eu une première Ă©pouse suisse et une seconde Ă©pouse d’un mariage traditionnel. QuestionnĂ© sur la durĂ©e de sa relation avec sa seconde Ă©pouse, il a prĂ©cisĂ© que celle-ci a dĂ©butĂ© en fin 2011 et qu’ils se sont rendus en Afrique durant trois ou quatre mois pour cĂ©lĂ©brer leur mariage traditionnel. 

Sur question, Alieu Kosiah a dĂ©clarĂ© que les Ă©vĂ©nements qui se sont produits Ă  l’église luthĂ©rienne et Harbel Camp Ă©taient probablement mentionnĂ©s dans le rapport de la TRC. A la question de savoir s’il avait vu la mention du Black Friday sur la liste des crimes commis par l’ULIMO dans le Lofa en 1993, Alieu Kosiah a rĂ©pondu par la nĂ©gative. Il a dĂ©clarĂ© qu’il n’était pas dans le Lofa en 1993 de sorte qu’il ne pouvait pas exclure la commission de ces crimes par l’ULIMO. 

Sur question, Alieu Kosiah a indiquĂ© ĂŞtre arrivĂ© dans le Lofa en 1994. InterrogĂ© sur sa relation avec Pepper & Salt, le prĂ©venu a indiquĂ© qu’ils n’étaient pas proches. Selon lui, Pepper & Salt Ă©tait toujours en compagnie de Jungle Jabbah. 

A la question de savoir s’il avait choisi un surnom lors de la première guerre civile, Alieu Kosiah a rĂ©pondu par la nĂ©gative. Il a ajoutĂ© qu’il utilisait le nom Alieu Kosiah partout oĂą il se rendait. 

Me Gianoli a demandĂ© Ă  son client si certaines villes n’étaient pas sous contrĂ´le ULIMO lors de son arrivĂ©e dans le Lofa. Alieu Kosiah a indiquĂ© que toutes les villes dans lesquelles il s’était rendu Ă©taient sous contrĂ´le ULIMO et qu’il n’avait pas vu une seule balle voler dans le cadre de la capture des villes du Lofa. 

Sur question, il a indiqué qu’une grande distance séparait le Lower Lofa de l’Upper Lofa et qu’il recevait uniquement des informations par radio sur ce qui se passait dans le Lower Lofa lorsqu’il se trouvait dans l’Upper Lofa.

Interrogé sur la superficie du Lofa, le prévenu a expliqué qu’avant que le comté soit divisé en deux, il faisait environ 25% de la Suisse et était le plus grand comté du Libéria.

Me Werner interroge Alieu Kosiah : 

Interrogé sur sa connaissance du contenu du rapport de MSF, en particulier sur les actes de cannibalisme et les meurtres de civils commis par l’ULIMO, Alieu Kosiah a laissé entendre qu’il s’agissait d’ouï-dire. Il a raconté avoir entendu depuis ses quatre ans des histoires, selon lesquelles des Congos découpaient les têtes d’autres êtres humains pour les envoyer en Inde et mangeaient les êtres humains par le dos, et avoir compris en grandissant que tout était faux. Selon lui, ce genre d’histoires a mené à d’autres fausses accusations. Le prévenu a ainsi évoqué l’arrestation de Harisson par Doe sur la base d’accusations d’avoir procédé à des sacrifices humains, alors qu’en réalité Doe craignait Harrisson car ce dernier était plus populaire que lui.

Me Toutou-Mpondo interroge Alieu Kosiah : 

Me Toutou-Mpondo a lu diverses citations de Abraham Towah et Lamine Kenneh et a demandĂ© au prĂ©venu Ă  quel pistolet ces derniers se rĂ©fĂ©raient lorsqu’ils ont Ă©voquĂ© le pistolet que Alieu Kosiah portait Ă  la cuisse droite en allant au front. Alieu Kosiah a rĂ©pondu qu’il devait s’agir de son 45. Il a prĂ©cisĂ© qu’il Ă©tait muni d’un 45 Ă  Bomi et lors de la capture de Todi, mais pas dans le Lofa car il l’avait dĂ©jĂ  revenu Ă  un lieutenant de l’ECOMOG. Il a ajoutĂ© que selon les dĂ©clarations de Kwamex Fofana, aucun soldat ULIMO ne recevait de pistolet ; soit ils l’achetaient, soit ils tuaient un gĂ©nĂ©ral et lui prenaient son pistolet. 

InterrogĂ© sur les armes qu’il portait dans le Lofa, Alieu Kosiah a indiquĂ© que le G3 Ă©tait son arme prĂ©fĂ©rĂ©e et qu’il lui arrivait d’utiliser un AK47 lorsqu’il n’avait pas d’autre choix. Il a prĂ©cisĂ© avoir toujours utilisĂ© un G3 depuis son dĂ©part de Sierra Leone, sous rĂ©serve d’être Ă  court de munitions. 

Me Jakob interroge Alieu Kosiah :

Sur question, Alieu Kosiah a indiquĂ© qu’à sa connaissance, les NPFL n’utilisaient pas d’insigne ou de tatouages en forme de scorpion. En revanche, il a prĂ©cisĂ© que les membres des forces spĂ©ciales NPFL portaient un t-shirt rouge avec un scorpion en 1990. 

Me Jakob a ensuite citĂ© un paragraphe du rapport UNHCR. Alieu Kosiah a dĂ©clarĂ© qu’il y avait un manque de respect envers l’Afrique puisqu’il y avait diffĂ©rentes approches selon que la guerre Ă©tait menĂ©e en Europe ou en Afrique. Selon lui, les guerres en Afrique sont dĂ©crites comme inhumaines alors que tel n’est pas le cas. Il a dĂ©clarĂ© qu’il y avait des marchĂ©s et des civils partout et a rappelĂ© les dĂ©clarations de SS, qui a indiquĂ© qu’elle pouvait se rendre librement en GuinĂ©e. Alieu Kosiah a livrĂ© son impression, selon laquelle les civils qui ne sont pas passĂ©s par l’ONG ne sont pas Ă©coutĂ©s. 

Me Jakob a alors Ă©voquĂ© le tĂ©moignage de JS, qui a dĂ©crit, devant la TRC en 2008, les marches forcĂ©es entre Foya et Solomba et les conditions dans lesquelles ces transports Ă©taient effectuĂ©s (exĂ©cutions, Ă©masculations, actes de torture). InvitĂ© Ă  se dĂ©terminer sur ce tĂ©moignage, Alieu Kosiah a rĂ©pĂ©tĂ© que plusieurs tĂ©moins ont Ă©voquĂ© une libertĂ© de mouvement après les combats, ainsi que des marchĂ©s dans tout le pays. Le prĂ©venu a ensuite dĂ©clarĂ© que le tĂ©moignage de JS contredisait ceux de JTC et LSM. Selon lui, l’ONG a repris l’histoire de JS et l’a adaptĂ©e pour monter une accusation contre lui. Sans se prononcer sur la vĂ©racitĂ© des dĂ©clarations de JS, Alieu Kosiah a dĂ©clarĂ© que la rĂ©ponse Ă  la question de savoir s’il avait donnĂ© l’ordre de dĂ©monter la gĂ©nĂ©ratrice, de la charger sur un truck et de pousser ce truck jusqu’à la frontière Ă©tait non. 

Me Jakob a cité un autre paragraphe du rapport UNHCR concernant la présence de l’ULIMO en Guinée et a demandé au prévenu si cette description lui paraissait plausible. Alieu Kosiah a déclaré que Nzérékoré était plus proche du Nimba que du Lofa de sorte que ce qui s’y passait n’avait pas d’impact sur les ULIMO, contrairement à ce qui se passait à Macenta. Il a également répété qu’aucun soldat ULIMO n’était autorisé à porter des armes ou un uniforme en Guinée, n’y à se déplacer en véhicule militaire.

A la question de savoir s’il avait entendu parler du pillage du HCR à Vahun avant l’ouverture de la procédure, Alieu Kosiah a répondu par la négative et a expliqué que cet événement s’était produit en 1993 alors qu’il se trouvait à Todi. Il a également déclaré que LSM s’était contredit en affirmant qu’il n’était jamais allé en Sierra Leone.

Le PrĂ©sident a interrompu l’interrogatoire du prĂ©venu jusqu’au lendemain. 

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