Pour cette journée du 20 février 2021, le tribunal procède à l’audition d’ EBJ.

Le président a commencé par des questions d’ordre général. En réponse, EBJ a indiqué vivre à Zorzor. Il a reconnu M. Kosiah, et expliqué qu’il connaissait certains plaignants avant cette procédure, ainsi qu’Alieu Kosiah. Il a nommé AS qu’il a précisé avoir connu en 1990 jusqu’à 1993, lorsqu’il se rendait à Sigisu, et LSM depuis 2015. Pour les autres, il a indiqué avoir fait leur connaissance lorsqu’ils se sont rendus à Berne pour être entendus devant la Ministère public de la Confédération. Il a déclaré être ami avec AS et LSM.

Interrogé à propos de sa situation personnelle, EBJ a expliqué qu’il était né à Voinjama, où il est resté de sa naissance jusqu’en 1990, date à laquelle ils ont entendu les NPFL arriver. Son père a alors fui en guinée, car c’était un soldat de Doe. Quant au reste de la famille, ils ont fui à Sigisu, où ils sont restés jusqu’en septembre 1993, avant de avant de repartir à Voinjama. Il est ensuite allé s’installer à Monrovia de 2001 à 2004. Puis, il est parti à Lyema, dans le district de Zorzor, en 2009-2010, ayant obtenu un travail là-bas.

EBJ a indiqué être allé à l’école durant son enfance par intermittence. Il a passé neuf ans à la « High School », et a complété ses études avec une formation réalisée en 2009, ce qui lui permet d’exercer sa profession actuelle.

Questions sur le contexte de la guerre civile

À propos du contexte de la guerre civile, entre 1993 et 1995, le plaignant a souligné qu’il s’agissait de la pire période de sa vie. Pour résumer brièvement, pendant cette période il a dû porter des charges lourdes qu’il n’était pas capable de porter, et a été le témoin du meurtre de civils innocents, en plus d’avoir assisté à un nombre important de violences. A sa connaissance, les factions impliquées étaient les NPFL, les ULIMO et les LDF. EBJ a toutefois déclaré ne pas savoir quelle faction s’est emparée de Voinjama en premier, ni combien de fois cette ville avait été capturée, étant arrivé à Voinjama lorsque les ULIMO l’avaient déjà prise. Il a cependant affirmé que les NPFL ont pris Sigisu le 2 août 1990. . Il a souligné que lorsqu’il est arrivé, il ignorait qui était le plus haut commandant des ULIMO, il a appris par la suite de plusieurs personnes le nom de Général Kosiah. Il a ajouté ne pas savoir si le Général Kosiah était en plein contrôle de Voinjama à ce moment-là. Il a également dit avoir vu des enfants soldats de 10 ans et plus, chez les NPFL et les ULIMO.

Interrogé à propos du comportement des ULIMO à l’égard des civils à Voinjama, EBJ a précisé que selon ses observations, les ULIMO se comportaient différemment des NPFL à l’égard des civils, expliquant ainsi que les ULIMO se comportaient très mal, donnant pour exemple qu’ils se rendaient parfois au domicile de civils innocents seulement pour les abattre. EBJ a déclaré qu’il avait peut-être soutenu ou participé à la guerre à travers un groupe armé contre sa volonté. Il a alors donné l’exemple d’un soldat qui demanderait à un civil de lui donner de l’eau, et que cela ferait de lui un soutien à la faction en question, même s’il l’a fait contre sa volonté. EBJ a ajouté qu’il se décrirait comme pacifiste, étant contre le fait de combattre. Il a ensuite expliqué que les civils faisaient la différence entre les ULIMO et les NPFL parce que ceux-ci criaient leurs noms et celui de leurs leaders, mais qu’on ne pouvait pas les différencier selon leurs tenues.

À propos du « Black Monday », le plaignant a expliqué qu’il avait entendu ce terme, et quesa signification est venue de M. Kosiah, quand il a ordonné qu’aucun civil ne devait sortir les lundis. La signification a ensuite pris son sens car beaucoup de civils ont été tués les lundis. Poursuivant ses réponses au Tribunal, EBJ a indiqué que cet épisode a duré deux ou trois mois, d’avril à juillet 1994 approximativement, chaque lundi, faisant ainsi plus ou moins un total de dix lundis. Il a indiqué que les Black Monday avaient commencé  à Voinjama, et que quiconque vivait à Voinjama connaissait ces mots. Il a également déclaré ne pas savoir si ces évènements se sont produits en dehors de Voinjama. À propos des « Black Friday », il en a entendu parler en 2015, lors de son audition à Berne.

Le président l’a ensuite questionné sur un endroit dénommé « Palaver house ». Le plaignant a répondu que c’était un bâtiment rond fait en bois ou en brique qui accueillait des réunions, qui n’était pas uniquement dédié aux soldats, les civils pouvant eux aussi en construire devant chez eux. EBJ a affirmé ne pas se souvenir de l’existence d’une « Palaver House » à Voinjama, mais se souvenir en revanche d’une « Palaver House » à Sigisu.

Interrogé à propos des pillages pendant la guerre, le plaignant a indiqué que les ULIMO saisissaient en effet des biens aux civils. Il a alors expliqué une chose qu’il n’avait pas mentionné à Bern : à l’entrée de la ville, les soldats ULIMO prélevaient deux ou trois kilos  de riz aux civils qui se rendaient au marché.

Le président a ensuite demandé au plaignant s’il savait si des femmes ou des enfants avaient été violés pendant la guerre. Il a répondu par l’affirmative, disant que cela arrivait « de temps en temps » ou « rarement ». N’ayant jamais été témoin direct de ces faits, il a expliqué qu’il en entendait surtout parler lorsque des gens rendaient visite à sa tante. Il a précisé que les victimes étaient des femmes et des enfants de 12 à 17 ans.

Concernant les homonymies au Libéria, il a souhaité donner quelques exemples, expliquant que c’était très courant. Le plaignant a notamment expliqué que cinq des gens qu’il voyait pendant son activité professionnelle étaient de familles différentes mais portaient le même nom et prénom.

Questions générales relatives à Alieu Kosiah

Concernant le prévenu, le plaignant le connaissait sous le nom de Général Kosiah et « Chief Kosiah », comme un rebelle des ULIMO., EBJ a ensuite affirmé ne pas pouvoir dire précisément où M. Kosiah était affecté  entre 1993 et 1995, mais qu’il le connaissait à Voinjama. Il ne connait pas les grades de l’armée, et ignore donc si Alieu Kosiah portait vraiment le grade de « Général ». Ce que la partie plaignante pouvait dire c’est que lorsque M. Kosiah allait quelque part, les soldats le saluaient, alors que M. Kosiah ne saluait jamais personne en premier. 

La première fois que le plaignant a vu M. Kosiah, c’était chez sa tante à Voinjama en septembre 1993.

Aujourd’hui, EBJ a expliqué reconnaître le prévenu par sa couleur de peau et ses yeux. Il l’a également reconnu à sa voix, qui lui a rappelé la période des ULIMO, et notamment les moments où Alieu Kosiah se fâchait et donnait des ordres en colère, en criant.  Le président lui a demandé si le prévenu avait changé physiquement, ce à quoi le plaignant a répondu que oui, ils pouvaient voir qu’il profite de sa vie puisqu’il est gros, et que même en 2015 il n’était pas gros comme aujourd’hui.

À la question de savoir pourquoi le plaignant n’avait pas reconnu M. Kosiah sur les photos présentées par le Ministère public de la Confédération à Berne, EBJ a répondu que les photos n’étaient pas claires, et que du fait de la manière dont elles avaient été prises, la couleur avait été altérée.

Il a conclu en disant que pour l’instant il n’avait rien à corriger vis-à-vis de ses déclarations à Berne en 2015, et que s’il veut modifier quelque chose ultérieurement, il le dira.

Meurtre d’un civil à Voinjama.

Pour rappel, il est reproché à Alieu Kosiah d’avoir, dans le contexte du conflit armé interne s’étant déroulé au Libéria de 1989 à 1996 et en qualité de membre de la faction armée ULIMO, exécuté un civil à Voinjama, en décembre 1993 ou entre début 1994 et mai 1994.

Après avoir confirmé sa dénonciation à l’encontre d’Alieu Kosiah, EBJ a indiqué que cela s’est déroulé à côté de l’endroit où il vivait,  entre avril et juillet 1994. Il a confirmé la présence d’un pick-up Land Cruiser de couleur vert militaire à côté de la maison de sa tante.  Il a insisté sur le fait que dix civils étaient au moins sur le pick-up, à l’arrière. Il a poursuivi en expliquant que M. Kosiah était à l’intérieur, à l’avant du pick-up. Selon du plaignant, certains  civils étaient attachés et entourés de soldats. EBJ a précisé que les soldats à l’avant étaient debout face aux civils. D’autres étaient assis à l’arrière les jambes à l’extérieur du pick-up. Selon les déclarations du plaignant, M. Kosiah portait une tenue de camouflage, mais on ne voyait pas son pantalon puisqu’il était assis à l’intérieur. Certains soldats portaient également des tenues partielles de camouflage.

Le président l’a interrogé sur le civil tué. EBJ a indiqué ne pas le connaître de manière générale, mais il a estimé son âge, disant qu’il s’agissait d’un adolescent âgé entre 16 et 18 ans. De l’avis du plaignant, le civil a été tué car il a refusé à deux reprises de monter sur le pick-up. Il a alors raconté que ce sont les soldats qui sont venus le chercher chez lui pour lui dire de monter sur le pick-up. Suite à son refus, les soldats sont allés voir Alieu Kosiah, qui est alors sorti du pick-up pour lui demander lui-même de monter dans le pick-up.  Suite à son second refus, M. Kosiah a pris son pistolet et lui a tiré dessus, dans la poitrine. Le président a ensuite demandé pourquoi Alieu Kosiah voulait que le civil monte dans le pick up. La partie plaignante a supposé que c’était pour le tuer, comme à leur habitude les lundis, mais il ignore pourquoi il voulait le tuer ailleurs. Le président a alors souligné le fait qu’EBJ ne connait ni le nom ni le prénom de l’adolescent, bien qu’il s’agissait de son voisin.

Le président a demandé ensuite au plaignant ce qu’il faisait et où il était à ce moment-là. Il a répondu qu’il était dans sa chambre, où il était d’habitude, qu’il se cachait, et qu’il se trouvait à environ huit mètres de la scène. Questionné sur sa cachette et la vision de la scène, le plaignant a répondu qu’il était jeune, et que les jeunes étaient curieux et qu’ils regardaient alors par la fenêtre. Il a ajouté que personne n’est intervenu pour défendre le civil ou s’interposer entre lui et M. Kosiah. Alieu Kosiah et ses hommes sont ensuite partis, ce sont d’autre civils qui se sont occupé du corps plus tard. Le plaignant a expliqué qu’il était choqué, et qu’il est de ce fait resté dans la maison.

Le président a ensuite demandé à EBJ s’il avait essayé de convaincre d’autres personnes de venir témoigner à propos de ce meurtre. Il a répondu que non, car il ne pratique pas l’ouï-dire. Il a expliqué que son frère, qui a également assisté à la scène, était trop petit pour comprendre ce qui était en train de se passer. Il a ajouté qu’il ne pouvait pas forcer quelqu’un à dire qu’il a vu cette scène pour qu’il vienne témoigner. Il a également indiqué que sa mère était inquiète de sa participation à la procédure suisse, et qu’elle ne voulait pas participer à la procédure d’une part à cause de sa condition physique, et d’autre part à cause de la peine d’avoir perdu un de ses fils, et qu’elle préférait s’en remettre à Dieu.

À propos du terme « Black Monday », le plaignant a expliqué au président que le prévenu avait utilisé ce terme lorsqu’il était venu s’installer devant chez eux pour manger, un samedi du mois d’avril. Selon le plaignant, pendant le repas, M. Kosiah a dit à ses hommes d’aller informer les communautés que quiconque serait vu dehors lundi sera tué, car les ULIMO avaient perdu un de leur « Big men » dans la dernière attaque par les LDF, et que ces lundis seront alors appelés « Black Monday ». À une question du président, EBJ a répondu que les soldats n’avaient pas posé de questions à M. Kosiah lors de cette déclaration, parce que tout le monde avait déjà compris ce que ces mots signifiaient.

Ordonner un transport forcé, par des civils, de Voinjama à Gbarlyeloh (Guinée)

Pour rappel, il est reproché à Alieu Kosiah d’avoir, dans le contexte du conflit armé interne s’étant déroulé au Libéria de 1989 à 1996 et en qualité de membre de la faction armée ULIMO, ordonné un transport forcé de Voinjama à Gbarlyeloh (Guinée) par des civils, entre septembre 1993 et décembre 1993, et égalemententre début 1994 et mai1994.

Après avoir confirmé sa dénonciation, le plaignant a déclaré que cela c’était passé au premier trimestre de 1994. Trois soldats l’ont réquisitionné lorsqu’il se trouvait chez lui, le matin. EBJ a précisé qu’il lui était impossible de refuser, au risque d’être tué. Il a expliqué qu’ils se sont déplacés en direction du quartier de Barzee à Voinjama, pas très loin de sa maison, à pied, et que cela a pris entre quatre et six minutes. Lorsqu’il est arrivé à Barzee, c’est le général Kosiah qui donnait les ordres, et que personne ne semblait être hiérarchiquement au-dessus du prévenu. Il a précisé qu’il y avait onze civils, et que lui avait participé à tout le transport. Parmi les civils, EBJ a indiqué qu’il n’y avait que des enfants et des hommes pendant le transport, et qu’il ne connaissait personne à partJJ, son grand frère biologique. Selon EBJ, les soldats étaient au nombre de 15 durant le transport, dont trois ou quatre enfants, et que M. Kosiah n’en faisait pas partie. Il a expliqué ne pas savoir qui était le chef parmi les soldats accompagnant le transport, mais qu’ils avaient reçu des ordres d’Alieu Kosiah tels que « quand vous serez en route. Le plaignant était présent au moment de ces ordres.

Poursuivant de répondre aux questions du Tribunal, EBJ a affirmé que M. Kosiah est bien celui qui avait ordonné aux soldats de dire aux civils de prendre les charges se situant à l’intérieur de la maison. EBJ a raconté qu’il fallait passer à côté d’Alieu Kosiah pour entrer dans la maison et prendre les charges. Selon le plaignant, M. Kosiah a déclaré aux soldats que quand le convoi serait en route, si quiconque essayait de s’échapper, il fallait le tuer et lui en faire un rapport. Le plaignant a souligné qu’il avait alors gardé cette phrase en permanence dans sa tête, et que M. Kosiah donnait les ordres en anglais.

Au sujet des marchandises, le plaignant a indiqué avoir porté six gallons d’huile sur la tête, et que les autres portaient du café et du cacao. Il a affirmé ne pas savoir pourquoi il fallait transporter cette marchandise jusqu’à Gbarlyeloh, étant un petit garçon au moment des faits. Le convoi est parti le matin de Voinjama, et sont arrivés quatre à cinq heures après à Gbarlyeloh. La route était carrossable mais non asphaltée. Le convoi a fait une pause en chemin, lorsqu’une personne, son frère, devait aller aux toilettes. Le convoi a alors déposé les charges, mais tout le monde est resté debout. C’est la seule pause qu’ils ont eu pendant le trajet.

Selon EBJ, les soldats se comportaient mal, certains ont battu les civils avec les mains et à coups de crosse. Les civils ont été menacé, dès le départ, pour marcher plus vite, et n’non pas reçu à boire ou à manger de tout le trajet. Les soldats étaient armés, une personne portait un RPG, une autre un 60, et le reste des soldats portaient des AK-47. Seulement deux ou trois soldats n’étaient pas armés. Cependant, la plupart des soldats portait des couteaux, en plus de leur arme. En réponse au président, EBJ a expliqué qu’il n’avait pas été battu ou menacé parce qu’il suivait de très près la personne devant lui.

EBJ a indiqué que personne n’avait été blessé ou tué lors de ce transport, mais que son frère JJ n’est pas arrivé à destination avec le reste du groupe. JJ se sentait fatigué et les soldats insistaient en lui disant d’avancer, c’est ainsi qu’il a pris la décision de fuir en prétextant devoir aller aux toilettes. Alors que deux soldats se disputaient pour savoir quoi faire, un lui a laissé l’opportunité d’aller aux toilettes. Après avoir attendu son retour, les soldats ont réparti la charge laissée par ce dernier dans les autres sacs. Ils ont également tiré à hauteur de genoux dans la brousse en espérant atteindre JJ, après avoir couru dans la brousse en espérant pouvoir le rattraper. Le plaignant a expliqué avoir eu peur pour sa vie, et il a eu très peur que son frère soit mort, et a ajouté qu’il était très surpris que son frère se soit échappé. Les soldats ne savaient pas qu’il était son frère. JJ est revenu à Voinjama en 1998, après le transport.

Le président a ensuite confronté EBJ aux déclarations des autres plaignants disant qu’il était quasiment impossible de s’enfuir lors d’un transport forcé. EBJ a répondu que c’était peut-être impossible, mais que les soldats avaient accepté qu’il aille aux toilettes, et que c’était donc une opportunité à saisir. Demander une pause pour aller aux toilettes n’était pas forcément un risque a expliqué le plaignant, parce que sinon les civils pouvaient se faire dessus. Le plaignant a ensuite déclaré qu’il n’avait pas tenté de s’enfuir lui-même, expliquant qu’il n’avait pas de raison de faire cela, parce que sinon il risquait de perdre la vie. Il a ajouté qu’il a avait eu plus peur que son frère.

Sur la forme du convoi, il y avait quelques soldats devant, certains parmi les civils et d’autres à l’arrière. Lui-même se trouvait à l’arrière. Il n’y avait qu’un seul civil derrière lui. Lors des lignes droites, le plaignant pouvait voir ce qui se passait devant lui.

Le convoi est arrivé à Gbarlyeloh autour de midi, le soleil se trouvant presque au zénith à ce moment-là. À la frontière Guinéenne, les soldats guinéens ont demandé les numéros de série des armes déposées par les soldats ULIMO, pour les leur rendre ensuite.Seulement deux ULIMO ont traversé la frontière. Les soldats ont demandé aux civils de déposer les charges, près de la ligne de frontière du côté guinéen.

Après le dépôt de la marchandise, les civils sont rentrés avec 13 soldats au lieu de 15, deux soldats étant restés en Guinée. Les soldats sont rentrés avec les civils mais ne se souciaient pas d’eux. Selon le plaignant, il fallait rester derrière eux et suivre le rythme de la marche car le chemin n’était pas connu et il y avait le risque que d’autres rebelles attaquent le groupe. EBJ a précisé qu’aucun soldat n’a demandé aux civils de les suivre, et que ce sont bien les civils qui ont fait le choix de les suivre. Le plaignant est arrivé dans la soirée à Voinjama, et a déclaré ne pas avoir été payé ou rémunéré pour ce transport. Il a également affirmé ignorer si le transport aurait été possible par voiture, mais que s’ils avaient voulu le faire, ils l’auraient fait.

Ordonner un transport forcé, par des civils, de Voinjama à Solomba et de là à la frontière guinéenne

Pour rappel, il est reproché à Alieu Kosiah d’avoir, dans le contexte du conflit armé interne s’étant déroulé au Liberia de 1989 à 1996 et en qualité de membre de la faction armée ULIMO, ordonné un transport forcé de Voinjama à Solomba par des civils, entre septembre 1993 et décembre 1993, ou entre début 1994 et mai 1994.

Questionné par le président sur ce second transport, EBJ a confirmé sa déposition, et a expliqué que cinq soldats sont venu le chercher chez lui, le matin, dont un enfant soldat armé. Accompagné des soldats, EBJ a marché jusqu’au quartier de Barzee. Il a déclaré savoir que s’il refusait, il serait tué. Le transport s’est déroulé de façon similaire au premier : là encore, c’est Alieu Kosiah qui a donné les instructions en anglais, et le prévenu a à nouveau ordonné aux soldats de tuer les fuyards. Sur place, selon EBJ, personne n’était supérieur hiérarchiquement à M. Kosiah. Le plaignant a ajouté que le transport avait duré deux jours, avec une escale à Kolahun, où les civils ont dormi dans une pièce verrouillée de l’extérieur. De fait, ils n’avaient aucune chance de pouvoir s’enfuir. EBJ ne connaissait aucun d’entre eux, Voinjama étant une très grande ville. De plus, il n’y avait aucune femme, mais il y avait des enfants âgés de 12 ans et plus. Le convoi est parti le matin, entre sept et neuf heures. Ils ont dû marcher huit heures ou neuf heures pour arriver à Kolahun, via une route carrossable. Il a précisé que le changement d’itinéraire (à savoir, passer par Solomba) faisait suite, selon les soldats, à une précédente attaque.

Entre Voinjama et Kolahun il y a parfois eu des pauses, notamment pour que les civils puissent boire près des rivières puisqu’ils marchaient sous le soleil. Les civils n’ont toutefois pas eu de pause pour manger pendant le trajet, et ont seulement pu manger l’équivalent en quantité d’une paume de nourriture une fois arrivés à Kolahun. La nourriture avait été préparée dans une petite casserole par les soldats.

Au total, dix civils ont participé au transport et 17 soldats dont cinq ou sept enfants soldats. Tous les soldats, y compris les enfants soldats, étaient armés.  Alieu Kosiah est resté à Barzee, et n’a pas participé au transport.

EBJ a qu’il ignorait qui dirigeait le transport ou le nom d’autre soldats qui accompagnaient le convoi. Par ailleurs, EBJ a également expliqué qu’au Liberia, les noms sont prononcés « comme on le sent, comme on l’entend », et que l’orthographe d’un même prénom/nom pouvait différer. Les marchandises transportées étaient les mêmes que lors du premier transport, et EBJ quant à lui a à nouveau porté six gallons d’huile sur la tête.

Une fois arrivés à Foya, un civil a tenté d’aller derrière la maison pour uriner, mais un soldat l’a interpellé et lui a dit d’attendre que les soldats qui se trouvaient derrière la maison s’en aillent pour qu’ils ne le prennent pas pour un rebelle et pour que les soldats ne tuent pas le groupe. Le soldat a également dit que le groupe avait de la chance que le « big man » des autres soldats ne soit pas là, car sinon, plusieurs d’entre eux auraient été découpés en morceaux et mis dans des brouettes. Le lendemain, il a fallu trois ou quatre heures de marche pour arriver à Foya, où ils ont pu faire une pause. La route était carrossable, mais n’était pas assez large pour y passer un ou deux véhicules. Une fois arrivée à destination, ils ont déposé les marchandises sur le sable, et cinq civils ont aidé à charger les canoës pour faire traverser la marchandise en Guinée, via la « Makona River ».

Après avoir déposé la cargaison, accompagnés de quinze soldats, ils sont repartis pour Kolahun pour y passer la nuit. Ils sont arrivés à Kolahun vers 11 heures ou minuit, et n’ont ni bu, ni manger. Le lendemain, ils sont repartis vers Voinjama.

Comparant les deux transports, le président a demandé si les soldats s’étaient comportés différemment. EBJ a répondu qu’ils proféraient les mêmes menaces, mais que lui n’a ni été frappé, ni menacé. Les soldats étaient là encore armés.

Lors du chemin du retour, le plaignant a souligné qu’il avait dormi dans la même maison que les soldats, mais pas dans la même pièce. Le président a alors demandé s’ils s’appelaient par leurs prénoms. Le plaignant a expliqué qu’il ne les avait pas entendu s’appeler les uns les autres.

Il a ajouté ne pas avoir vu des civils en train de fuir et qu’aucun ne s’est enfui. Il a réitéré qu’il n’avait pas pensé à s’enfuir, ayant le sens de devoir aller jusqu’au bout de sa mission.

Le président lui a ensuite demandé s’il avait essayé de convaincre d’autres personnes de venir témoigner. EBJ a souligné que cela pouvait être très dangereux, et qu’ils pouvaient risquer la mort s’ils témoignaient.

Il lui a ensuite demandé si à posteriori, il avait entendu le nom d’un des soldats présents et comment il connaissait, de fait, celui de M. Kosiah. La partie plaignante a répondu avoir demandé le nom d’ Alieu Kosiah à quelqu’un, qui le lui avait donné, la première fois qu’il était venu manger à la maison à Voinjama.

En réponse aux questions du président, le plaignant a souligné que quelqu’un avait déjà demandé aux soldats pourquoi ne pas utiliser des véhicules aux soldats, et qu’ils avaient alors répondu que le bruit pouvait alerter d’autres factions qui pouvaient alors les attaquer. De l’avis du plaignant, cette explication est plausible car il y avait aussi parfois des mines à certains endroits. Le plaignant a indiqué ne pas avoir été rémunéré pour le transport.

Sur question, EBJ a indiqué ne jamais avoir entendu des soldats mentionner le nom d’Alieu Kosiah.

[PAUSE DE MIDI]

À la reprise des débats, les avocats ont été invités à plaider au sujet de trois témoins prévus aux auditions de la semaine suivante.

Le procureur du Ministère public de la Confédération a déclaré que selon lui la situation était claire ; les témoins invités ne sont pas les mêmes personnes que les victimes, mais des homonymes. Il a ajouté que les auditions de cette première semaine avaient balayé les doutes qui pouvaient encore subsister. Il a ensuite ajouté que M. JK avait déjà été entendu pendant une semaine à Berne pendant l’instruction et qu’il avait donné des renseignements erronés. Quant aux deux victimes MK et MK, elles ont en outre demandé une indemnité équivalente au revenu médian annuel au Liberia pour venir témoigner. S’en remettant au tribunal, le procureur a fait savoir qu’il ne trouvait pas utile de maintenir les auditions des trois témoins appelés la semaine suivante.

Me Werner s’est ensuite rallié au procureur.

Me Gianoli a déclaré que la position du prévenu était différente. Me Gianoli a plaidé en faveur du maintien des auditions prévues la semaine suivante. L’avocat a souligné, lors de sa plaidoirie, l’existence des contradictions présentes entre les déclarations des parties plaignantes faites à Berne au Ministère public de la confédération et celles déposées devant le tribunal cette semaine.

[Reprise de l’audition de EBJ]

Ordonner les meurtres de deux combattants ULIMO d’ethnie krahn, dont le dénommé War Boy, à Voinjama.

Pour rappel, il est reproché à Alieu Kosiah d’avoir, dans le contexte du conflit armé interne s’étant déroulé au Liberia de 1989 à 1996 et en qualité de membre de la faction armée ULIMO, ordonné les meurtres de deux combattants ULIMO d’ethnie Krahn, dont le dénommé « War Boy », à Voinjama, entre septembre 1993 et décembre 1993, ou entre début 1994 et mai 1994.

Le plaignant a déclaré que les faits s’étaient produits en 1994. À la question de savoir si c’était avant la scission des ULIMO, il a répondu qu’il ne le savait pas. Questionné sur l’endroit des faits, il a répondu que ce crime avait eu lieu entre deux routes, celle de Monrovia et celle de Kolahun, et quel’endroit s’appelait « sous les arbres ». Après avoir confirmé sa déposition, EBJ a indiqué avoir été personnellement présent au moment de l’ordre d’exécution, et qu’il se situait à une vingtaine de mètres de la scène. Il a expliqué qu’Alieu Kosiah avait donné cet ordre en disant d’un ton énervé « puisqu’ils [les combattants] veulent se battre contre nous, alors nous devons les tuer »..  

Continuant de répondre aux questions du Tribunal, EBJ a expliqué que trois combattants d’ethnie Krahn étaient en réalité présents à ce moment-là, mais que l’un d’entre eux a réussi à s’échapper. Alieu Kosiah s’est alors énervé, et a déclaré que les soldats devaient tuer les deux combattants restant en leur coupant la gorge. Le président a poursuivi ses questions en demandant si d’autres personnes étaient présentes au moment de l’ordre. Le plaignant a répondu qu’il y avait des civils et des rebelles, soit entre 15 et 20 soldats, et quatre ou cinq civils, et a précisé qu’il ne semblait pas y avoir quelqu’un hiérarchiquement supérieur à M. Kosiah. Lorsque le plaignant est arrivé, les deux soldats étaient déjà torses nus et étaient « tabés ».

Deux soldats volontaires ont procédé à l’exécution, et ils se disputaient pour savoir qui allait pouvoir tuer les combattants. Pendant qu’un leur coupait la gorge avec un long couteau, un autre soldat était placé sur eux pour qu’ils ne bougent pas. Une des victimes était War Boy. Sa tête a été placée sur un bâton, à la porte de la ville sur la route de Monrovia ; et la tête du deuxième combattant a également été placée sur un bâton, à la porte de la route de Kolahun.. Le président a questionné le plaignant sur l’identité des soldats exécutants les ordres. Le plaignant a déclaré ne pas connaître leur identité.

Le président a ensuite demandé à la partie plaignante pourquoi avoir déposé une plainte en Suisse. Ce dernier a répondu qu’il avait besoin de justice. EBJ a ensuite expliqué, aujourd’hui, ne pas avoir peur de M. Kosiah, car il n’a plus le pouvoir qu’il avait avant de lui faire quelque chose. Poursuivant ses réponses, il a affirmé ne pas avoir été intimidé au Libéria pour sa participation à cette procédure, ni avoir été influencé. Il a ajouté ne pas avoir témoigné à la TRC car personne ne lui en avait donné l’opportunité ; et ne pas avoir essayé de porter plainte devant les autorités libériennes parce qu’au-delà du fait qu’il faut avoir de l’argent pour payer un avocat, il n’existe pas de tribunal qui juge des personnes ayant commis des crimes de guerre.

Le président a demandé à EBJ de dire – sans se retourner – combien de personnes étaient dans la salle d’audience. Il a alors répondu 23. Le président a fait protocoler que 22 personnes étaient dans la salle, une n’étant pas revenue après la pause du déjeuner. EBJ a précisé avoir compté les chaises en arrivant le matin.

Le président a également demandé à la partie plaignante si les bidons de six gallons qu’il a dû transporter étaient pleins, il a répondu que oui. Il lui a été demandé combien de litre dans un gallon, ce à quoi la partie plaignante a répondu qu’au Libéria ils ne comptent pas avec les litres mais en bouteilles de bières. Une bouteille représente 75cl.

Questions du Ministère publique de la Confédération à la partie plaignante

Une photo est soumise à la partie plaignante par les procureurs du Ministère publique de la Confédération. EBJ explique qu’il s’agit d’une route de terre comme il en existe beaucoup encore au Libéria.

Questions de Me Maleh à la partie plaignante

Sur question EBJ a expliqué que durant les deux transports la partie plaignante a porté de l’huile sur sa tête, mais qu’une personne tierce a dû l’aider à soulever le gallon d’huile pour le placer sur sa tête, car c’était trop lourd pour lui. Me Maleh a demandé au plaignant d’expliquer comment il ne pouvait pas connaître le nom de son voisin lors meurtre du garçon à Voinjama. EBJ a répondu que pendant la guerre, des déplacés arrivaient tous les jours, expliquant que le civil était peut-être arrivé peu de temps auparavant.

Me Maleh lui a ensuite demandé pourquoi les soldats venaient manger chez sa cousine. Il a déclaré que sa tante était la cheffe des femmes qui faisaient à manger pour les soldats. Il a ajouté que c’est sa cousine qui lui a en premier mentionné le nom de M. Kosiah. Le plaignant lui avait demandé de qui il s’agissait, car il voyait que tous les autres soldats le saluaient. La tante d’EBJ, ainsi que d’autres personnes, l’appelaient « Chief Kosiah ». Il a précisé ne pas connaître le nom d’autre soldats car il ne s’était pas intéressé à eux.

Me Maleh a ensuite questionné le plaignant sur plusieurs détails, tel que le premier transport et la participation de son frère à celui-ci, le deuxième transport et le lieu où les soldats avaient dormi, ce qu’il faisait à Voinjama sous les ULIMO pendant ses journées,  les mots qu’Alieu Kosiah avait employé pour ordonner aux soldats  d’exécuter les deux combattants, la partie plaignante répondant à ces questions. De fait, EBJ a expliqué que lors du chemin retour, les civils et les soldats ont dormi à Kolahun, mais que, cette fois, la porte n’était pas verrouillée, les civils n’ayant plus de charges à porter ils étaient libres d’aller où ils voulaient.

EBJ, sur question, a aussi déclaré que le premier lundi suivant l’annonce d’Alieu Kosiah, il a vu un pick-up passer devant leur maison avec Alieu Kosiah assis à l’avant, avec des soldats et des civils également assis dans ce pick-up. Or, plus tard, le même pick up est repassé mais sans les civils. Les soldats chantaient et étaient couverts de sang. EBJ a ajouté que lorsque les soldats tuaient quelqu’un, il était courant de les entendre chanter. En l’occurrence, ils chantaient une chanson qui parlait de 1990, et du fait de fuir, de revenir, et d’être des lions. 

Également sur question EBJ a déclaré que le cinquième lundi, son oncle a été requestionné par les ULIMO dans la maison d’à côté : ils l’ont mis dans un pick up et sont partis. Le lendemain, EBJ et sa mère sont partis chercher du plantain et des bananes. Arrivés à la Zeleba River, ils ont vu tous les corps des personnes qui avaient été tuées lors du premier « Black Monday ». Au moment où il s’apprêtait à descendre pour voir si le corps de son oncle était là, sa mère lui a dit de ne pas le faire, parce que si les ULIMO le voyaient descendre vers les corps, ils le tueraient également. Il a donc rebroussé chemin par peur et a continué la route avec sa mère.

Me Maleh lui a finalement demandé s’il avait la même taille qu’avant, ce à quoi EBJ a répondu qu’il était beaucoup plus grand qu’avant, puisqu’il avait beaucoup grandi.

La Cour a demandé si la partie plaignante avait le même poids et la même force qu’aujourd’hui. EBJ a répondu que non.

Par la suite, Me Maleh a demandé à EBJ de dire qui avait des « pop eyes » dans cette salle. EBJ a alors désigné le prévenu ainsi qu’un autre plaignant.

Me Maleh a ensuite posé des questions à EBJ sur les circonstances qui l’avaient amené à être en contact avec le GJRP, ainsi que qui l’avait contacté, quand, et comment cela s’était passé, EBJ a alors expliqué qu’il a été contacté entre 2013 et début 2014 à Voinjama. Il se trouvait sur le porche de la maison de sa grand-mère quand trois hommes, dont M. Keita, l’ont approché et lui ont posé des questions à propos de la guerre. EBJ leur a ensuite donné son numéro, et c’est ainsi qu’il a été contacté par GJRP. Lors de son premier appel, il a déclaré avoir eu peur que ce soit une arnaque, expliquant qu’il peut arriver que les gens mentent. Il n’est donc pas venu à Monrovia, comme lui avait demandé GJRP. Il a été contacté une deuxième fois par SB, qui lui a à nouveau demandé de venir à Monrovia. EBJ a alors répondu que s’ils lui trouvaient un moyen de transport, alors il viendrait. C’est ainsi qu’en mars, il s’est rendu dans les bureaux de GJRP et a rencontré Alain Werner pour raconter son histoire. En juillet, EBJ a à nouveau été contacté par Me Werner et M. Keita pour qu’il signe ce qu’il avait raconté, ce qu’il a fait.

Sur question de Me Maleh EBJ a aussi clarifié que la dénommée KA était sa cousine, mais qu’il la considérait en fait comme sa sœur. Enfin, Me Maleh a interrogé son mandant au sujet de la plaignante KF. EBJ a déclaré l’avoir vue pour la première fois pendant la guerre, en janvier 1994. C’est EBJ qui a contacté KF pour qu’elle raconte son histoire à GJRP à Monrovia. Sur question, EBJ a indiqué ne jamais avoir entendu l’histoire de KF, et qu’il ne lui a pas non plus raconté son histoire, ni le fait qu’il viendrait témoigner en Suisse.

Enfin, interrogé à propos de l’expression « till go », EBJ a déclaré qu’il avait entendu cette expression autour de lui, mais qu’il a eu la chance de ne pas participer à ce genre de convois.

Questions de Me Gianoli, avocat de la défense

Revenant sur les déclarations du plaignant, plusieurs sujets ont été abordés par les questions de Me Gianoli, notamment au sujet de sa relation avec le plaignant AS, et des homonymes au Libéria. EBJ a notamment expliqué qu’il connaissait AS sous un autre nom, et qu’il le connaissait parce qu’il venait parfois à la maison située à côté de celle où il vivait. Il a ajouté que personne ne lui a demandé de ne pas indiquer qu’il connaissait AS.

Me Gianoli a ensuite posé plusieurs questions concernant la mort de son frère JJ et à propos des personnes qui l’accompagnaient lors de son voyage de Sigisu à Voinjama. EBJ a expliqué qu’il était mort le 2 février 2009. Il a indiqué que cinq membres de sa famille ont fait le voyage avec lui.

Sur le premier transport, Me Gianoli a demandé à EBJ d’expliciter le risque d’embuscades. EBJ a alors répondu que les ULIMO contrôlaient les villes et villages, mais que des NPFL pouvaient être présents dans la brousse.

Interrogé à propos des canoës qu’il y avait à Solomba, EBJ a indiqué que ces embarcations étaient en réalité des grands troncs d’arbres avec des planches pour pouvoir s’installer durant la traversée. Il a indiqué ne pas savoir s’il était possible de faire traverser des voitures ou des camions avec.

Sur question, EBJ a ensuite confirmé ce qu’il avait déclaré à Berne, à savoir que lors des « Black Monday », des civils ont été tués et jetés dans un trou sur la gauche de la « Zeleba River », le long de la « Monrovia Highway ».

Interrogé à propos de la scission des ULIMO, la partie plaignante a expliqué en avoir pris connaissance par les livres d’histoires, après la guerre.

Me Gianoli a également demandé à la partie plaignante s’il connaissait différentes personnes, en citant leur nom, ce à quoi EBJ a répondu à chaque fois par la négative.

Questions finales des parties

Répondant à une question de Me Werner, le plaignant a indiqué qu’à sa connaissance, une lettre avait été envoyée par une personne importante (« big man ») à M. Kosiah, expliquant que ce que le Général Kosiah faisait était mal et qu’il devait arrêter, et que depuis ce jour, les massacres qui survenaient lors des « Black Monday » avaient cessé.

Le président a ensuite questionné EBJ sur son caractère et ses relations avec les autres enfants ou jeunes à l’époque de la guerre. EBJ a alors expliqué qu’il n’avait pas de contacts sociaux, parce que les soldats l’effrayaient beaucoup. Il a également expliqué être particulièrement prudent parce que les soldats pouvaient parfois enrôler les enfants de force. Sur question, EBJ a déclaré que certains soldats ont participé au transport et à l’exécution des combattants krahns. Le président a demandé quel sentiment la partie plaignante avait à l’égard d’Alieu Kosiah.EBJ a alors répondu qu’elle avait un mauvais sentiment, un sentiment de tristesse, en pensant aux meurtres des civils innocents.

Sur question du MPC, EBJ a indiqué avoir vu sept, huit ou 10 pick-up lors des « Black Mondays » à Voinjama. S’il devait faire une estimation de tous les civils qu’il a vu sur les pick-up, il a indiqué au moins 100 personnes. EBJ en a déduit qu’environ 100 personnes ont été tués pendant ces lundis.

Me Gianoli a demandé des précisions sur sa présence dans le village de B., EBJ répondant à cette question.

Sur question du président, la partie plaignante à souhaiter remercier le tribunal, le procureur mais aussi les avocats pour l’opportunité qui lui a été donnée. Il a également remercié tous les officiers de sécurité, l’avocat de la défense, ainsi que toutes les personnes présentes pendant ce procès. Il a exprimé son souhait de voir le Tribunal travailler en collaboration avec le gouvernement libérien pour qu’une telle Cour puisse être établie au Libéria.