La Cour procède à l’audition de la deuxième partie plaignante, LSM, représentée par Me Jakob.

Face au Tribunal, LSM a reconnu les autres plaignants ayant fait le voyage avec lui, ainsi que le prévenu. Il a ensuite affirmé l’avoir vu pour la dernière fois pendant la guerre, en 1993.

Questionné sur sa situation personnelle par le président de la Cour, le plaignant a expliqué que c’est la guerre qui l’a mené au Lofa, et qu’il était là-bas quand les NPFL ont capturé le Lofa. Il a par ailleurs déclaré avoir suivi une scolarité jusqu’à ce que la guerre soit arrivé, soit jusqu’à la sixième classe dans le système libérien. Il a expliqué être actuellement agent de sécurité privée.

À propos du climat régnant à Foya entre 1993 et 1995, le plaignant a d’abord expliqué que sous les NPFL, il y avait l’ordre et la sécurité. Les écoles étaient ouvertes et il pouvait se déplacer librement. Il a ajouté que la vie était alors normale. Il a poursuivi en déclarant que tout était parti de travers à l’arrivée des ULIMO, les écoles ont été fermées, et qu’à partir de ce moment, il y a vraiment eu la guerre.

Le président de la Cour lui a ensuite demandé quelle faction avait d’abord capturé Foya. LSM a répondu que les NPFL ont d’abord pris le contrôle du comté du Lofa, lorsque l’armée s’est enfuie en Guinée et en Sierra Leone.  Lorsque les ULIMO se sont emparés de Foya, il se trouvait dans la brousse. Il s’était réfugié par peur dans un petit village dans la ferme de sa tante. Il a précisé qu’il ne pouvait pas donner la date exacte de la prise de Foya, mais que les ULIMO avaient procédé à deux attaques contre le NPFL avant que le district ne soit sous leur contrôle. En réponse au président de la Cour, le plaignant a indiqué le nom du commandant ULIMO présent lors de la deuxième et dernière attaque.

Le tribunal a ensuite questionné la partie plaignante sur les enfants-soldats présents dans les factions ULIMO et NPFL. Cette dernière a expliqué que c’était une pratique courante pour les deux factions, précisant que certains de ces enfants pouvaient avoir 10, 13, 14 ans. Elle a expliqué que les membres du groupe ULIMO avaient de très nombreux enfants-soldats, appelés « RTO ». Sur le comportement des soldats à l’égard des civils, le plaignant a précisé que le groupe Alligator, présent lors de la première attaque ULIMO, était plus gentil avec eux. Ce groupe partageait la nourriture avec les civils. Il a cependant ajouté que les ULIMO se comportaient très mal envers les civils, notamment en leur imposant le travail forcé.

Le tribunal a demandé à la partie plaignante si elle avait soutenu une des parties au conflit. Elle a répondu que non. Elle a expliqué qu’elle était civile, mais qu’elle a rejoint les ULIMO pour sauver sa vie, lorsqu’ils l’ont capturée dans la brousse en 1993. Après une question du tribunal, LSM a déclaré qu’il était devenu un simple soldat affecté au groupe Alligator. Pour distinguer les NPFL des ULIMO, il a expliqué que les groupes criaient leur nom lors des prises de territoire. Les groupes rebelles ne portaient pas d’uniforme, sauf au quartier général. Au sujet du « Black Monday », le plaignant a déclaré que c’était un jour que tout le Lofa n’oublierait jamais, un grand génocide ayant eu lieu ce jour-là à Voinjama et à Foya. À la question de savoir si ce terme était connu de la population, il a répondu qu’il en avait entendu parler comme un jour de deuil parce que beaucoup de gens avaient perdu des proches. Il a affirmé que les seules personnes qui ne connaissaient pas le « Black Monday » ne vivaient pas dans le Lofa.

Sur la question des pillages, la partie plaignante a confirmé que les ULIMO ont pris des biens à la population civils comme du café, de l’huile ou du cacao, et qu’ils ne lui ont rien pris puisqu’il n’avait rien. Il a ajouté qu’il était rare qu’ils prennent de l’argent.  Sur question du cannibalisme, la partie plaignante a indiqué que c’était quelque chose de très commun au Libéria. Il a donné l’exemple d’un soldat membre des ULIMO avec qui il était ami. Il a dit de lui que c’était un vrai boucher qui mélangeait des morceaux de foie humain avec des morceaux de viande pour que personne ne sache ce qu’il y avait dedans.

Le président de la Cour a ensuite demandé au plaignant s’il avait rencontré plusieurs personnes au Liberia qui avaient le même nom. Il a répondu que oui, expliquant que son nom était par exemple très répandu. La Cour a étendu sa question aux noms et prénoms. Il a alors indiqué que c’était également courant, donnant en exemple le nom de son fils.

Poursuivant ses réponses au tribunal, LSM a déclaré qu’il avait toujours connu le prévenu comme militaire. Il a expliqué qu’Alieu Kosiah était un membre important de la faction des ULIMO, le désignant comme deuxième personne du commandement de la région. Il a expliqué qu’il n’y avait personne en dessus de lui, en dehors de Pepper and Salt. Il a affirmé l’avoir vu pour la première fois lors de la prise définitive de Foya. Le plaignant a confirmé que le prévenu était bien la personne dénoncée. Il a expliqué le reconnaître à son apparence, à ses yeux de combattant. Le Tribunal lui a demandé pourquoi il avait eu de la peine à l’identifier sur les clichés du ministère public de la confédération en 2015. Il a répondu qu’on lui avait présenté une photo avec plusieurs seigneurs de guerre, mais qu’il l’avait reconnu tout de suite lorsqu’Alieu Kosiah était apparu devant lui.

Avant d’évoquer sa dénonciation pénale, le plaignant a tenu a précisé que son anglais n’était pas très bon, et qu’il était difficile pour lui de bien se faire comprendre.

Ordonner le traitement cruel de sept civils, dont LSM, à Foya

Pour rappel, Il est reproché à Alieu Kosiah d’avoir, dans le contexte du conflit armé interne s’étant déroulé au Libéria de 1989 à 1996 et en qualité de membre de la faction armée ULIMO, ordonné le traitement cruel de sept civils, dont LSM, à Foya en juillet 1993.

Questionnant le plaignant sur ces faits, la cour lui a demandé si cela c’était passé en 1993 ou en 1994, car les dates divergent selon deux auditions. Il a expliqué que cela c’était passé en 1993, et en ce qui concerne 1994, c’est un malentendu à cause de la barrière linguistique.

Le plaignant a expliqué s’être rendu à la ferme de sa tante pour trouver de la nourriture, lorsqu’il a été capturé par les ULIMO, dans la brousse, qui pensaient que c’était un rebelle. Il avait alors très peur et ne se rappelle donc pas du nombre de soldats présents. Il a poursuivi en expliquant que c’était une routine des ULIMO de patrouiller pour rapatrier les civils après la prise d’un territoire, car lorsque le combat éclate les civils fuient, et il fallait des civils pour travailler pour eux. Le président de la Cour lui a demandé comment les soldats étaient habillés à ce moment-là. Il a répondu qu’ils portaient des bandeaux verts, le vert étant le symbole des ULIMO. Il a ensuite expliqué que certains soldats avaient des perruques et du maquillage, et certains des vêtements de femmes, sans en connaître la raison. La partie plaignante a indiqué avoir été amenée à Foya avec beaucoup d’autres civils après avoir été capturée.

Après la pause, le Tribunal a demandé à LSM d’expliquer le traitement du « tabé ». Il a répondu que ce traitement consistait à attacher les deux coudes derrières le dos et les deux mains devant. Il a ajouté ne pas avoir subi ce traitement lors de sa capture, mais lors de son déplacement du bureau du S2 au marché. Au bureau, le commandant S2 Fine Boy notait les noms des civils avant leur départ au marché. Le prévenu était là, avec ses hommes et CO Kunti.

LSM a affirmé que le prévenu avait ordonné le « tabé » à l’encontre des civils. Selon lui, Alieu Kosiah était la personne la plus importante à ce moment-là. Les soldats ont attaché six autres civils en « tabé ». Le plaignant a ensuite expliqué qu’il a été trainé par terre, en « tabé », sur une distance équivalente à la salle d’audience, aller – retour, et qu’il a des problèmes avec son bras gauche et sa jambe droite depuis. Il a ajouté que c’était bien pire que d’être battu.

Il a poursuivi sa déclaration en disant que les civils avaient été attachés en « tabé » sous prétexte qu’ils étaient des rebelles. Parmi eux se trouvaient deux personnes de sa famille. Par ses réponses au président de la Cour, le plaignant a expliqué ne pas connaître le soldat qui l’avait trainé par terre. Le président de la Cour a demandé si CO Kunti et Alieu Kosiah avaient ordonné le « tabé ». LSM a répondu que le prévenu avait donné l’ordre, et qu’il a été exécuté.

Le président de la Cour a demandé pourquoi les autres civils n’avaient pas été trainés. La partie plaignante a alors expliqué qu’elle était en bonne forme et qu’elle était la seule à oser prendre la parole. Elle leur répétait qu’elle n’était pas un rebelle. Elle a poursuivi sa déclaration en disant qu’après avoir été trainée, elle était en sang. Elle a affirmé que le prévenu et CO Kunti étaient là et qu’ils voulaient tous les éliminer.

Ordonner les meurtres de six civils à Foya

Pour rappel, Il est reproché à Alieu Kosiah d’avoir, dans le contexte du conflit armé interne s’étant déroulé au Libéria de 1989 à 1996 et en qualité de membre de la faction armée ULIMO, ordonné les meurtres de six civils, dont PH et JM, à Foya, en juillet 1993.

En répondant aux questions du tribunal, la partie plaignante a décrit la scène relative au meurtre des six civils. Elle a expliqué que lorsqu’elle a vu un soldat écraser une grosse pierre sur la tête d’un civil, elle a pris peur et a fermé les yeux. Des coups de feu ont retenti, des cris ont suivis, et lorsqu’elle a rouvert les yeux, il n’y avait plus que des flaques de sang. Fine Boy et Dekou sont venu du bureau au même moment. Lors de leur arrivée sur les lieux, M. Kunti et M. Kosiah ont demandé pourquoi ils devraient épargner le dernier civil. La partie plaignante a expliqué ensuite qu’elle n’avait pas été tuée parce que Dekou et Fine Boy avaient plaidé sa cause. La partie plaignante a ensuite poursuivi en disant que c’est à ce moment-là qu’elle a reçu un coup de couteau. LSM a également expliqué que c’est Alieu Kosiah qui a donné l’ordre de les attacher et de tuer les six civils. Le prévenu les accusait d’être des rebelles, et disait qu’il fallait donc les tuer.

Le président de la Cour lui a demandé ce qu’il était advenu des corps des victimes. LSM a déclaré que les soldats les avaient jetés dans le puits, il n’a pas vu la scène puisqu’il avait les yeux fermés, mais le lendemain il y avait un nuage mouches au-dessus à cause des corps en décomposition. Il a ensuite expliqué que c’était un puits profond, et qu’à cause des mouches, il a été ordonné à des civils de le fermer.

Revenant sur le coup de couteau dont il a été victime, le plaignant a indiqué à la Cour qu’il n’avait pas vu la personne qui le lui avait infligé. Il a ajouté que c’est lorsqu’il nettoyait le bureau du S2, plus tard, que Fine Boy lui a dit qu’il s’agissait d’Alieu Kosiah.

Concernant l’auteur du coup de couteau, la Cour est venue sur la contradiction entre la plainte déposée par le plaignant et son témoignage aux autorités françaises, dans lequel il affirmait que Kunti l’avait poignardé. LSM a déclaré avoir témoigné tôt le matin alors qu’il travaillait de nuit, et qu’il était fatigué. Il a expliqué qu’il n’avait pas bien pu relire sa déposition et qu’il avait vraiment pris connaissance de son contenu en Suisse, par son avocat Me Jakob. Il s’est dit choqué de ce qui figurait dans sa déposition. Il a ensuite indiqué que M. Kunti et M. Kosiah voulaient tous deux sa mort, et qu’il ne sait donc toujours pas à ce jour lequel des deux l’a poignardé. Il a expliqué qu’il n’était pas dans tous ses esprits sur le moment puisqu’il était en train de se vider de son sang, et qu’il ne se souvient donc pas de qui l’a poignardé.

Le tribunal a ensuite demandé au plaignant s’il savait quel couteau avait été utilisé, et à quelle profondeur. Il a répondu qu’il s’agissait d’une baïonnette, et que la blessure était très profonde. LSM a affirmé que CO Kosiah et CO Kundi avaient la volonté de l’éliminer, car ils l’ont laissé au sol pour mort. Le plaignant a expliqué que sa cousine qui est sage-femme est arrivée peu après et l’a soigné.

Ordonner et diriger un transport forcé de café, cacao et d’huile de palme, par des civils, de Foya à Solomba, et de là à la frontière guinéenne

Pour rappel, il est reproché à Alieu Kosiah d’avoir, dans le contexte du conflit armé interne s’étant déroulé au Libéria de 1989 à 1996 et en qualité de membre de la faction armée ULIMO, ordonné et dirigé un transport forcé de marchandises (du café, du cacao et de l’huile de palme), par des civils, de Foya à Solomba, entre juillet et août 1993.

Le plaignant a commencé par expliquer qu’il était civil durant cette période. Il a indiqué au président de la Cour avoir été réquisitionné le matin, au bureau du S2, qu’il nettoyait. Le S2 était présent, ainsi que les charges.

En réponse aux questions du tribunal, LSM a affirmé que l’ordre du transport lui avait été donné par le S2. À la question de savoir s’il avait vu ou entendu un ordre donné par le prévenu, il a répondu qu’Alieu Kosiah était un des « big men» de la Strike Force et que comme il était sur place c’était lui qui était le commandant et qui donnait des ordres.

Poursuivant ses réponses, le plaignant a indiqué avoir participé au transport jusqu’à la frontière guinéenne, ajoutant que s’il refusait de participer il prenait le risque de perdre la vie. Le transport a été effectué par des hommes et des enfants soldats encadrés et dirigés par le S2 Fine Boy, qui était chargé de faire la liaison avec les civils. Ils transportaient du café, de l’huile de palme et du cacao. LSM a précisé qu’il portait environ 25 kg de café sur la tête puisque c’était lui le plus fort. Le convoi est parti le matin, et le plaignant a expliqué être arrivé de retour tard le soir. Les soldats étaient disséminés autour et dans le groupe de civils, et certains se comportaient de manière très arrogante. Il a toutefois expliqué que lorsque les soldats se reposaient, ils avaient également le droit de faire une pause et que parfois ils pouvaient s’arrêter pour boire au bord des rivières. Il a précisé qu’ils ne s’arrêtaient jamais trop longtemps parce que cela était considéré comme trop dangereux, les civils pouvant fuir à tout instant. Ils portaient des armes du type RPG et AK47, et d’autres des mitrailleuses lourdes. Le plaignant a indiqué qu’il avait été menacé durant le transport, dès le départ. Concernant Alieu Kosiah, le plaignant a affirmé qu’il battait les civils. Il ne portait pas d’arme mais son entourage en portait.

Il a conclu ses propos en expliquant que lui-même avait reçu des menaces, un soldat lui ayant dit avant de partir que s’il s’arrêtait il se ferait battre.

[Pause de midi]

Concernant les mauvais traitements, le plaignant a affirmé qu’Alieu Kosiah était informé de tout ce qui se passait durant le convoi. Il n’y a pas eu de mort. De plus, le plaignant n’a pas vu le prévenu empêcher ou tenter d’empêcher les mauvais traitements infligés aux civils par les soldats. Le plaignant n’a pas été rémunéré pour ce transport.

Ordonner le pillage de la centrale électrique de Foya

Pour rappel, il est reproché à Alieu Kosiah d’avoir, dans le contexte du conflit armé interne s’étant déroulé au Libéria de 1989 à 1996 et en qualité de membre de la faction armée ULIMO, ordonné le pillage de la centrale électrique de Foya entre juillet et décembre 1993 ou entre mars 1994 et décembre 1995.

À propos de la centrale de Foya, le plaignant a indiqué à la cour qu’elle se trouvait dans les faubourgs de la ville, et qu’elle l’alimentait en courant électrique. Il a ensuite expliqué que l’ordre du pillage était venu de l’état-major ULIMO et du prévenu. La machine fonctionnait avant l’arrivée des ULIMO. Ne pouvant pas refuser les ordres de son supérieur, LSM déclare avoir été contraint de participer à ce pillage.

Ordonner et diriger le transport forcé du moteur de la centrale électrique de

Foya, par des civils, de Foya à Solomba, et de là à la frontière avec la Guinée

Pour rappel, il est reproché à Alieu Kosiah d’avoir, dans le contexte du conflit armé interne s’étant déroulé au Liberia de 1989 à 1996 et en qualité de membre de la faction armée ULIMO, ordonné et dirigé le transport forcé du moteur de la centrale électrique de Foya jusqu’à Solomba, par des civils, entre juillet et décembre 1993 ou entre mars 1994 et décembre 1995.

Le Tribunal a ensuite longuement interrogé le plaignant sur le transport forcé de la génératrice de Foya qui avait été placée sur un véhicule poussé par les civils. LSM a expliqué à la Cour que le transport avait été ordonné par la hiérarchie ULIMO. Toute la hiérarchie des ULIMO accompagnait le convoi dont Alieu Kosiah ainsi que Dekou. Le prévenu était le deuxième commandant de la « Strike Force » et portait un pistolet sur le côté. Il n’y avait pas de militaire supérieur hiérarchiquement à M. Kosiah sur ce convoi. Selon le plaignant, le commandant ULIMO Jackson lui aurait dit que CO Kunti faisait partie du convoi mais lui-même ne l’avait pas vu, le convoi étant très grand. Les civils ont été rassemblés tôt et ont dû mettre les pièces de la génératrice dans un van et sur un truck Mercedes, d’autres marchandises s’étaient ajoutées au transport, tel que de l’huile, du cacao et du café. Ils devaient pousser les véhicules, car l’un n’avait plus de moteur, et l’autre pas d’essence. Étant soldat à l’époque, le plaignant a indiqué que son rôle était de protéger les biens pillés, car les rebelles RUF de Sierra Leone et les NPFL pouvaient se trouver en embuscade.

Le convoi comportait de nombreux civils. Il n’y avait pas de femmes ni d’enfants. Le plaignant a déclaré qu’il y avait également beaucoup de soldats tous armés, et que des enfants-soldats se trouvaient parmi eux. Il a ajouté qu’il fallait marcher six ou sept heures pour atteindre la frontière. La route n’était pas asphaltée dans le Lofa. Les civils étaient fouettés par les soldats ULIMO et devaient trouver leur propre nourriture. Alieu Kosiah était à l’arrière du convoi pour superviser ce qui se passait. Étant l’officier de plus haut rang, c’est lui qui dirigeait tout le groupe.

Interrogé à propos du comportement des soldats avec les civils durant le convoi, LSM a expliqué que son commandant était une bonne personne et qu’il ramenait du pain et des sardines de Guinée pour les partager avec les autres soldats et les civils avec lesquels il vivait.

Poursuivant ses réponses au Ministère public de la confédération, LSM a affirmé que les soldats portaient des AK-47, des RPG ou des LMG. Alieu Kosiah quant à lui avait une arme de longue distance lorsqu’il se rendait sur le front. Autrement, il avait toujours une arme de poing.

Revenant sur les déclarations du plaignant au Ministère public de la confédération, la cour lui a demandé si un civil avait été tué pendant le transport. Il a alors répondu qu’un soldat avait tiré une balle dans le front d’un civil qui se plaignait d’être fatigué. Il a ensuite déclaré n’avoir jamais vu Alieu Kosiah empêcher ou tenter d’empêcher les mauvais traitements infligés aux civils.

Le groupe est arrivé en fin de soirée à la frontière guinéenne et a poussé les véhicules sur le ferry pour que les pièces traversent la frontière. Les civils sont ensuite rentrés escortés par les soldats et sont arrivés à Foya au milieu de la nuit. Sur question, LSM a affirmé que les civils n’ont reçu aucune forme de rémunération pour avoir participé à ce transport.

Questionné sur son rapport actuel au prévenu, le plaignant a déclaré ne pas avoir peur de lui. Il a néanmoins ajouté qu’il avait été intimidé et attaqué au Liberia suite à son témoignage par d’anciens soldats ULIMO loyaux à M. Kosiah et des anciens généraux de Charles Taylor. Il a raconté avoir presque perdu un œil et avoir eu sept points de suture à l’œil. Il a précisé avoir dû déménager trois fois, et que ces attaques visaient également à le dissuader de témoigner. Il a expliqué craindre maintenant pour sa sécurité et pour sa vie, ainsi que pour celle de sa famille. Le Tribunal lui a demandé s’il avait témoigné devant la TRC. Il a alors répondu que cela aurait été un suicide pour lui.

Les questions sont adressées par le procureur du Ministère public de la confédération

À propos du coup de couteau au puits, le plaignant a précisé que Dekou et Alieu Kosiah se disputaient quant au sort à lui réserver. Selon lui, le prévenu était fâché de le laisser en vie car il représentait une menace pour sa vie.

Quant aux transports, LSM a déclaré qu’il avait entendu le prévenu donner des ordres aux soldats. Il a ajouté que selon lui, le plus gradé entre CO Dekou et CO Kosiah était CO Kosiah.

Les questions sont adressées par Me Jakob, avocat du plaignant

Me Jakob a soumis une photo au plaignant. Celui-ci a expliqué reconnaître la place où se trouvait le bureau du S2. Il a ensuite indiqué à quel endroit se trouvait le bureau.

En réponse aux questions de Me Jakob, LSM a affirmé être parti en Sierra Leone lors de la scission entre les ULIMO K et J.

La Cour a ensuite demandé à LSM de préciser quelles étaient les raisons pour lesquelles il n’avait pas donné le numéro de téléphone de sa cousine à la Cour. Il a expliqué que sa cousine ne voulait surtout pas avoir quelconque lien avec la procédure. Après avoir essayé plusieurs fois de la convaincre au téléphone, elle a fini par changer de numéro de téléphone et reste injoignable à ce jour.

LSM a également évoqué les séquelles qui lui restent d’avoir été trainé en « tabé » au sol, expliquant avoir toujours des cicatrices aujourd’hui. Enfin, il a précisé avoir changé de nom lorsqu’il était soldat, et que les ULIMO ne l’avaient pas reconnu.

Finalement, le plaignant a expliqué à nouveau sur questions son premier contact avec Civitas Maxima et respectivement GJRP.

Les questions sont adressées par Me Gianoli, avocat du prévenu

Me Gianoli a longuement interrogé le plaignant sur la ligne de commandement des ULIMO et les personnes qui la composaient.

Au sujet du « Black Monday », le plaignant a affirmé qu’il s’agissait d’un vrai génocide. Il a déclaré que cet événement avait coûté la vie au seul fils de sa tante, et que les soldats lui avaient pris le cœur.

Revenant sur la scène du puits, il a ajouté que Dekou et Fine Boy étaient intervenus pour qu’il ne soit pas tué. Il a expliqué que Dekou était d’un grade inférieur au prévenu, mais qu’il s’agissait de son territoire, il pouvait donc s’opposer à certains ordres d’Alieu Kosiah. Il a cependant expliqué que lui, en tant que soldat, aurait été emprisonné, traîné par terre ou encore dévêtu pour le couvrir de honte s’il avait refusé un ordre de son supérieur ou s’il allait contre l’ordre qui avait été donné.

LSM a réitéré sa souffrance et sa peur au moment où il a été détaché puis poignardé par M. Kunti ou M. Kosiah.

Me Gianoli est ensuite revenu sur l’audition du plaignant face aux autorités françaises, ainsi que le retour des civils après le transport forcé de la génératrice de Foya. Enfin, il a questionné le plaignant sur la scission des ULIMO et la composition ethnique des différentes factions, ainsi que sur des différents membres de la faction ULIMO.

Enfin, la partie plaignante a expliqué que les violences sexuelles étaient très communes durant la guerre. Les femmes et les filles étaient victimes de ces violences.