Jour 16 – Audition de 3 témoins

26.02.2021

Pour cette onzième journée du 26 février 2021, le Tribunal procède à l’audition des témoins MuK, AK et FK.

Audition de MuK

Le Tribunal a commencé par faire entrer MuK dans la salle. Sur question du Tribunal, le témoin a indiqué ne pas connaitre Alieu Kosiah. En raison de ses problèmes de vue,  le témoin a premièrement reconnu son frère MoK en la personne d’AS, et a ensuite reconnu FK, son neveu, en la personne de KK. Il a ajouté que lui et son frère vivent tous deux à Pasolahun, dans deux maisons séparées, et qu’il avait laissé son frère à Monrovia quand il est venu en Suisse témoigner. Le témoin a également précisé qu’il avait environ 60 ans et qu’il voit bien de près mais pas de loin. Le juge lui a ainsi demandé de s’approcher, MuK a rectifié ses propos : il a indiqué qu’AS était FJ, et a ajouté ne pas connaitre KK, mais l’avoir toutefois vu dans l’avion.

Le Tribunal a ensuite demandé à la partie plaignante AS s’il connaissait le témoin. Le plaignant a alors déclaré qu’il connaissait le témoin sous le nom de MK (le nom de famille était erroné), puis, plus tard, sous le nom de MN. Il a ajouté qu’il avait encore changé de nom après la guerre des ULIMO et s’était fait appeler MuK, soit par le prénom et le nom sous lequel la Cour le connaît. Il a enfin indiqué ne pas connaître FK ni FJ.

La partie plaignante KK a quant à lui corroboré les dires d’AS. Il a ajouté que le témoin avait un lien de parenté avec MuK et JMK. KK a expliqué que JMK refusait de voir MuK comme faisant partie de sa famille, et que c’est pour cette raison qu’il a changé de nom de famille. Les deux plaignants ont confirmé que MuK et MoK étaient frères. Ils ont ensuite indiqué que le témoin n’avait pas pris part à des transports forcés, et ont tous deux finis par indiquer le secteur dans lequel travaille MuK.

Le Tribunal a demandé à MuK de s’approcher de JMK, et le témoin a indiqué qu’il s’agissait de JMK, son neveu. Sur question de la Cour, MuK a reconnu MoK comme son frère.

Interrogé par le Tribunal, JMK a confirmé être le neveu de MuK et a indiqué qu’il s’appelle ainsi depuis sa naissance et que tel était le nom que ses parents lui avaient donné à la naissance. Il a également affirmé ne pas avoir demandé à MuK de venir témoigner ici et ne pas savoir qui lui a proposé.

Le témoin a ensuite été interrogé au sujet de différents nom et prénom des membres de sa famille. A la question de savoir qui lui a proposé de venir témoigner, MuK a répondu qu’il ne savait pas. Quant au sujet de sa demande d’indemnité, MuK a indiqué que son frère ainsi qu’un autre homme portant le même nom de famille que lui ont fait la demande à sa place. Le Tribunal a demandé au témoin s’il avait connaissance des accusations portées à l’encontre du prévenu Alieu Kosiah, ce à quoi le témoin a répondu par la négative.

Face au Président, MuK a expliqué qu’il vivait à Pasolahun pendant la guerre civile, et qu’il n’a pas participé à la guerre civile. Il a ensuite déclaré être le seul MuK vivant à Pasolahun, et qu’il y avait également qu’un seul MoK, soit son frère. Poursuivant ses réponses au Tribunal, MuK a indiqué ne pas savoir combien il y avait de maisons à Pasolahun pendant la guerre. Il a ensuite confirmé que Pasolahun avait une génératrice et qu’elle a été pillée pendant la guerre par les ULIMO, plus précisément par trois hommes, et que les gens du village ont été obligés à la porter.

Par ailleurs, MuK a indiqué avoir participé à un transport forcé de munitions en 1993 de Gondolahun à Baloma, ordonné par des soldats ULIMO. Étayant ses propos, MuK a expliqué qu’après avoir posé les munitions à Baloma il s’est échappé et s’est caché dans la brousse, et que son frère n’a pas participé au transport. Il a ajouté avoir également participé au transport de la génératrice de Pasolahun.

Détaillant les circonstances du transport de la génératrice, MuK a expliqué que quand les trois hommes sont venus pour rapporter la machine aux ULIMO, ils ont tenté de démarrer la machine mais elle ne fonctionnait pas. Un d’entre eux leur aurait alors dit « maintenant, vous allez travailler dans mes plantations et si vous travaillez dans mes plantations, je vais faire en sorte que la machine fonctionne et mettre de l’électricité dans le village ». Il a affirmé que personne n’avait été blessé ou tué pendant ce transport, et que son frère a également participé à ce transport. Il a ajouté ne pas avoir peur de parler de cela aujourd’hui. De plus, MuK a indiqué qu’aucune personne présente dans la salle n’a participé au transport de munitions, ni au transport de la génératrice.

MuK a ensuite affirmé qu’on ne lui avait rien promis en échange de sa venue en Suisse. Il a expliqué qu’il était lui-même pauvre et qu’il a seulement demandé de l’aide pour garder ses cinq enfants.

Par ailleurs, il a déclaré ne pas avoir fait de demande de compensation et qu’il pensait qu’après être venu témoigner certaines personnes pourraient l’aider, mais que personne ne lui a fait de promesse. Il a également affirmé que personne ne lui a dit de dire ou ne pas dire quelque chose avant de venir témoigner.

Enfin, MuK a indiqué ne pas connaître VD, ni Mohamed Kosiah ou encore Morisara Doumbia.

Questions des parties au témoin

Le Ministère public de la confédération n’a pas eu de question à poser au témoin.

Me Gianoli a demandé des précisions sur le transport forcé depuis Pasolahun. MuK a déclaré ne pas savoir les noms des soldats qui ont participé à ce transport forcé ni le nom des chefs. Puis, interrogé sur la raison pour laquelle il n’a fait qu’un seul transport de marchandises, MuK a expliqué que des soldats venaient parfois avec de la nourriture qu’il fallait transporter jusqu’au village suivant, et que les villageois devaient transporter de la nourriture parce que c’était ainsi que cela fonctionnait du temps de la guerre.

Sur question, MuK a expliqué qu’il faisait partie des anciens / aînés du village, et qu’il faisait de l’agriculture pendant la guerre. Au sujet des déclarations d’un témoin indiquant que les villageois de Pasolahun ont été « tabés » et battus par les ULIMO dans une ferme, MuK a indiqué qu’il était resté à Pasolahun du début jusqu’à la fin de la guerre et qu’il n’avait pas vu ça.

La Cour a enfin demandé au témoin combien de temps prenait un trajet entre Monrovia et Pasolahun. Celui-ci a répondu qu’il fallait trois jours de voiture pour effectuer ce trajet, ce que les plaignants ont ensuite démenti, expliquant qu’il fallait au maximum deux jours pendant la saison des pluies.

Audition de AK

Lors de son audition, AK a affirmé qu’il avait vu le prévenu pour la première fois sur le pont de la rivière Kehair à Kolahun, en 1993, durant la saison sèche ; et qu’il l’avait vu pour la dernière fois quelques mois après, de Gondolahun à Konehun. Il a ajouté ne pas l’avoir revu entre ces deux évènements. Il a précisé le reconnaître facilement aujourd’hui à ses yeux, malgré le fait qu’il avait grossi. Concernant les parties plaignantes présentes dans la salle, le témoin a reconnu AS, et croit avoir déjà vu KK. Il a précisé qu’il a rencontré AS une première fois à Pasolahun dans le village et plus tard en 2007 à Monrovia lorsqu’il était en douzième classe à Monrovia. AK a ensuite indiqué ne pas connaitre les autres parties plaignantes.

Il a déclaré qu’il vivait à Boawohun entre 1989 et 1996. Ce village se trouve actuellement dans le district de L. Il a expliqué s’être rendu à Pasolahun pendant la guerre et y être resté entre trois et quatre mois. Il a ajouté qu’il fallait une journée de marche pour atteindre Pasolahun depuis Boawohun, et a également indiqué ne pas savoir combien il y avait de maisons à Pasolahun, et ne pas savoir non plus s’il y avait un « town chief ». De plus, AK a affirmé qu’il était très courant que plusieurs personnes portent le même nom et prénom dans un même village au Liberia.

En réponse à une question du juge, AK a déclaré ne pas avoir participé à la guerre comme combattant, ni comme sympathisant de l’une ou l’autre des factions impliquées. A la question de savoir quelles factions armées ont occupé Pasolahun durant la première guerre civile, AK a déclaré qu’il y a d’abord eu les NPFL, dirigés par Charles Taylor, puis les ULIMO, dirigés par Alhaji Kromah. Poursuivant ses réponses, le témoin a déclaré ne pas savoir à quelle date les ULIMO sont arrivés à Pasolahun. Quant à la tenue vestimentaire des soldats ULIMO durant la première guerre civile, le témoin a indiqué qu’ils portaient parfois du rouge sous leurs vêtements militaire et parfois des vêtements civils. Il a également précisé qu’il n’y avait pas d’uniforme standard et qu’il n’y avait donc aucun moyen d’identifier la faction. AK a par la suite expliqué que les NPFL ont été les premiers à entrer au Liberia en 1989-1990, avant qu’ils ne se fassent repousser du Lofa par les ULIMO. Les NPFL ont ainsi été repoussés jusqu’à Monrovia, Foya et Gbanga.

En ce qui concerne les armes utilisées par les ULIMO, AK a déclaré qu’il avait pu identifier des G3, des AK47 et des M16, même s’il ne connait pas bien les armes. Il a ajouté que ce n’était pas une guerre professionnelle, et que les NPFL avaient aussi des G3, même si c’était une arme majoritairement utilisée par les ULIMO.

Le témoin a ensuite déclaré qu’il y avait des enfants-soldats chez les ULIMO. Il a précisé que les enfants étaient recrutés à partir du moment où ils pouvaient marcher sur de longues distances, et que les plus jeunes avaient environ dix ans. Il a ajouté que les ULIMO ne se comportaient de manière générale « pas bien du tout », et a indiqué avoir vu des soldats ULIMO commettre des crimes contre les civils durant la première guerre civile.

Concernant les pillages, le témoin a expliqué avoir été témoin de nombreux pillages, et a ajouté que les soldats ULIMO prenaient tout, et en particulier tous les objets qui contenaient du métal comme les générateurs ou les machines à coudre, mais aussi les vêtements et la nourriture. Selon le témoin, les soldats faisaient cela pour revendre les objets en Guinée.

Concernant les transports forcés, il a déclaré que c’était une pratique très courante et qu’il était impossible pour les civils de refuser d’y participer, au risque de mourir. Il a ajouté que les civils n’étaient pas rémunérés pour cela, et qu’ils ne recevaient ni nourriture ni eau. Étayant ses propos, AK a expliqué qu’il n’y avait pas d’autre moyen de transporter les marchandises que de les porter sur la tête et de marcher parce que les routes avaient été très endommagées depuis le début de la guerre avec Charles Taylor. De plus, les ponts ayant été détruits, il fallait passer à gué dans les rivières. AK a ajouté qu’il y avait parfois deux troncs au-dessus de la rivière pour permettre aux véhicules de passer, mais qu’ils n’avaient là laissé qu’un seul tronc pour que seulement les gens puissent passer, afin d’éviter que les véhicules n’entrent trop fréquemment dans les villages.

AK a affirmé qu’il était courant que les civils subissent des violences pendant le transport, et que de nombreux civils ont été tué durant ces transports. AK a notamment précisé que les soldats frappaient parfois sans raison les civils ; que pour eux, il n’y avait pas de Dieu ; que ce qu’ils disaient ainsi que leur propre volonté étaient les seules choses qui comptaient, et qu’il n’y avait pas de gouvernement qui les contrôlait. Ainsi, selon AK, les soldats n’écoutaient pas forcément les ordres des commandants et que, dès qu’un soldat voulait quelque chose, ils le prenaient, opprimaient les civils, sans que ces derniers ne puissent faire quelque chose. Il a ajouté qu’il avait souvent entendu parler de viols commis par les ULIMO. Il a ensuite décrit la pratique du « tabé » au Tribunal comme suit : « ça consistait à attacher quelqu’un avec, d’un côté, les mains qui se rejoignaient devant, et de l’autre côté, les coudes qui se touchaient derrière ». Le Tribunal a ensuite demandé à AK si cette pratique servait à immobiliser quelqu’un ou à le faire souffrir. Le témoin a répondu que cette pratique était utilisée pour plusieurs raisons, et a donné l’exemple d’un enseignant qui s’est fait tuer par son élève devenu soldat, pour la simple raison qu’il avait échoué à un des examens de l’enseignant. AK a conclu en affirmant que beaucoup de choses se passaient ainsi, les soldats se prenant pour des dieux.

Questionné sur les pratiques de cannibalisme, le témoin a répondu que les soldats mangeaient le foie, et d’autres organes du corps humain pour prouver qu’ils étaient forts et pour faire étalage de leur cruauté.

Au sujet du « Black Monday », le témoin a déclaré qu’il avait entendu qu’il était question de détruire la vie des gens, et que beaucoup de gens étaient morts à Voinjama mais qu’il ne pouvait pas en témoigner lui-même, n’aillant pas assisté à cela.

Le témoin a expliqué qu’il avait entendu que le prévenu était H&H, sans avoir ce que cela signifiait, et qu’il se faisait également appeler « Chief », et qu’il est possible qu’on l’appelait commandant.

En ce qui concerne le prévenu, AK a indiqué ne pas savoir où est-ce qu’il se situait entre 1993 et 1995, mais a toutefois indiqué qu’il était passé dans le clan H. et qu’il est passé sur les routes principales pour aller à Foya ou à Massabolahun. Sur question, AK a ajouté avoir reconnu le prévenu à ses yeux, à sa peau qu’il a décrit comme noire, et à sa taille.

Au sujet de la génératrice de Pasolahun, le témoin a expliqué au Tribunal que celle-ci se trouvait en bordure du village sur un terrain qui n’était pas privé. Il a ajouté ne pas savoir si c’était une génératrice, qu’il la décrirait plutôt comme une machine, sans savoir à quoi elle servait, ni si elle fonctionnait ou non avant la guerre. Il a ensuite confirmé sa déclaration devant le Ministère public de la Confédération au sujet du pillage de la génératrice, expliquant que Sky Face Kabbar avait alors déclaré que c’était un ordre d’Alieu Kosiah, et non pas d’autres commandants. Il a précisé que parmi les Mandingo il y avait beaucoup de mécaniciens, et qu’il ne savait pas si ce sont certains soldats ULIMO ou des simples mécaniciens qui ont démonté la génératrice. Il a ajouté qu’il ne pouvait pas donner davantage de précisions, ayant toujours vu la machine démantelée.

Poursuivant son récit, AK a expliqué qu’une fois la machine démantelée, les soldats ULIMO ont fait se rassembler les civils dans le but d’organiser son transport. Sur question, le témoin a confirmé que toutes les pièces de la génératrice ainsi que quelques biens pillés et de la nourriture avaient été transportés. Il a affirmé avoir participé au transport de la génératrice de Pasolahun à Kolahun organisé par Elephant Tail, un des officiers les plus gradés. À cet égard il a précisé qu’AS, KK, MuK et MoK y avaient également pris part, et que le prévenu n’y était pour rien en ce qui concerne le transport. Il a indiqué se souvenir de ces noms parce qu’il leur est arrivé quelque chose et que leurs noms ont été prononcés durant le transport. Donnant davantage de détails sur le transport, AK a indiqué que les civils ont été réquisitionnés par les soldats ULIMO aux alentours de cinq heures du matin, quand ils dormaient encore, afin que les gens ne soient déjà partis pour leurs fermes respectives. Il a ajouté ne pas se souvenir si des femmes avaient également transporté des pièces de la génératrice, mais que des jeunes de moins de 18 ans étaient présents ; et qu’il avait été impossible pour lui de refuser de participer au transport.

Poursuivant ses réponses, le témoin a indiqué avoir aperçu Alieu Kosiah lors de l’arrivée du transport à Kolahun, et a ajouté que les soldats nommés Lahlaji, Sky Face Kabbar, ou encore Elephant Tail avaient encadré le transport. Alieu Kosiah donnait des ordres aux soldats, en employant un ton autoritaire, et paraissait être la personne la plus importante du groupe à ce moment-là. Il avait des vêtements militaires. Le témoin a ensuite déclaré que tout au long du transport, les soldats disaient qu’Alieu Kosiah voulait ceci ou cela, et qu’aucun des soldats ne parlaient aux civils avec respect.

Pour sa part, le témoin a indiqué avoir porté une lourde pièce métallique, sans toutefois pouvoir estimer son poids. Il a précisé que c’était difficile, mais qu’il n’avait pas d’autre choix que d’y arriver. En ce qui concerne la raison pour laquelle il fallait transporter ces objets et marchandises jusqu’à Kolahun, AK a indiqué que Kolahun était la capitale du district.

Décrivant le transport, le témoin a déclaré qu’il pouvait y avoir jusqu’à cinq, six ou sept personnes pour porter une seule pièce, et que d’autres choses ont également été transportées, les soldats pillant tout ce qu’ils aimaient. Poursuivant son témoignage, AK a expliqué que les pièces les plus lourdes étaient portées sur la tête, et qu’elles étaient accrochées entre elles par des structures de bois croisés.

Il a également expliqué avoir marché neuf heures ou plus pour arriver jusqu’à Kolahun, sur une route qui n’était pas carrossable. Il a ajouté ne pas avoir effectué de pauses en chemin, ni avoir reçu à boire ou à manger durant le transport. Concernant la position des civils et des chefs durant le transport, le témoin a indiqué que tout le monde pouvait être n’importe où dans le convoi, y compris les civils. En ce qui concerne le comportement des soldats, AK a déclaré qu’ils étaient arrogants, brutaux. Les commandants avaient de manière générale des pistolets, et les soldats portaient les armes les plus lourdes, soit les soldats. Alieu Kosiah quant à lui était selon le témoin armé d’un pistolet.

Il a indiqué que presque chacun des civils avaient été menacés durant le transport. AK a notamment expliqué que quand quelqu’un traînait à l’arrière du groupe, les soldats disaient « bouge ton cul vers l’avant », et s’assuraient que les civils restent concentrés sur la marche et qu’ils n’aient pas d’occasion de se sauver. Le témoin n’a personnellement pas subi de violences physiques, mais il a déclaré avoir reçu des insultes. En revanche, il a indiqué que les civils ont reçu des coups de pied au derrière, des claques, ainsi que des menaces pendant le transport, et qu’il n’avait pas vu le prévenu empêcher cela. Il a ensuite expliqué que trois civils avaient été tués par un chef du groupe, soit un civil nommé K, un autre nommé B, et enfin un civil nommé MoK, notamment parce qu’ils étaient fatigués. Il a ensuite indiqué que c’était vraisemblablement Sénégali ou Elephant Tail ou Skyface Kabbar qui les avait tués, selon ce qu’en disait les civils sur place. Il a précisé que les chefs du groupe pouvaient décider de punir ou fouetter les civils sans aucune pitié.

Au sujet des corps de K et B, le témoin n’a pas su dire ce qu’ils étaient devenus, mais a toutefois indiqué qu’ils avaient été enlevés.

Au sujet de la mort MuK, il a affirmé avoir vu son corps. Il a ensuite expliqué qu’il ne le connaissait pas avant les faits, étant un étranger au village. Le témoin a précisé qu’il avait vu le prévenu tirer sur MuK, avec son pistolet, près du pont, à environ douze mètres et que MuK était immédiatement tombé au sol. Il a ensuite précisé que MuK avait été touché à la poitrine, qu’il y avait du sang partout, et qu’il ne savait pas ce qui avait été fait de son corps. Il a ajouté qu’il y avait peut-être plusieurs MuK à Pasolahun durant la guerre. Il a précisé que tout cela avait commencé quand il s’était plaint d’être fatigué, et qu’il portait une charge plus lourde que la sienne.

Poursuivant ses réponses au Tribunal, AK a indiqué que chacun des civils avait eu peur pour sa vie durant le transport et que, s’ils essayaient de s’enfuir, ils risquaient d’être tués avec leur fusil, et a ajouté que pour fuir, il fallait planifier sa fuite à l’avance et que le mieux était de coopérer.

Concernant la mort de MoK, le témoin a expliqué que celui-ci était mort après MuK, et qu’il avait été tué par un coup de feu du prévenu pour avoir fait tomber la caisse de munitions, sur la Lofa River, à Konehun, une fois arrivés à destination. Alors que tout le monde déposait sa charge doucement sur le sol, MoK a laissé tomber la caisse, et c’est ce qui a déclenché la colère d’Alieu Kosiah. Selon le témoin, le prévenu et la victime étaient éloignés d’une dizaine de mètres. AK a expliqué que les biens qu’ils transportaient comptaient beaucoup pour eux, et que la vie des civils importait peu en comparaison. Il a ensuite précisé que MoK n’était pas mort sur le transport de la génératrice, n’y ayant pas participé, mais sur un autre transport. AK a également indiqué que les soldats, et non pas Alieu Kosiah, directement après l’incident, ont dit aux civils d’avancer et sifflaient. Le témoin a ainsi ajouté que tout le monde devait avancer pour ne pas être pris pour cible parce que sinon, le corps à terre pouvait être le leur.

Revenant sur le transport de la génératrice, les pièces ont été déposées à Kolahun. Des véhicules étaient stationnés là-bas pour emmener les pièces en Guinée. Après avoir déposé les pièces, AK a expliqué que les civils étaient libres de rentrer, et que M. Kosiah n’est pas rentré avec eux. Il a ajouté avoir regagné Pasolahun dans la nuit.

Le témoin a poursuivi ses réponses en déclarant ne pas avoir été rémunéré pour avoir participé à ce transport et qu’il n’a pas cherché d’autres civils ayant participer au transport qui sont encore en vie pour venir témoigner. Interrogé sur les corps de B et K, AK a déclaré qu’il ne les a pas vus sur le chemin du retour.

À propos du transport forcé de munitions à Fassama, le témoin a déclaré avoir vu Alieu Kosiah ordonné et diriger le transport. AK a ajouté que les civils avaient été menacés et que Kosiah avait participé au transport. Les soldats cherchaient en particulier de jeunes hommes robustes. AK se trouvait à ce moment-là à Pasolahun, et il a été emmené avec les autres jeunes réquisitionnés très tôt le matin à Gondolahun. C’est de là qu’ils sont partis avec les munitions en direction de Konehun. Il a précisé que le convoi se déroulait en ligne car le sentier était très étroit, et que c’était davantage le sentier qui organisait le convoi, et non les soldats.

Le Tribunal a ensuite demandé à AK s’il connaissait d’autres civils qui avaient participé à ce transport. Ce dernier a ainsi déclaré se souvenir de la tête de la partie plaignante AS, sans toutefois se souvenir de son prénom et de son nom. Sur question du Tribunal, le témoin a indiqué qu’Alieu Kosiah dirigeait le transport mais qu’il ne portait rien.

Parmi les civils ayant participé au transport au transport, AK a indiqué que parmi les civils ayant participé au transport il y avait des adolescents, et qu’il aurait été impossible pour lui de refuser d’effectuer le transport. Parmi les nombreux soldats présents, AK a indiqué qu’il y avait également des enfants-soldats, mais qu’il ne pouvait citer aucun nom. Interrogé sur le type d’ordres que le prévenu donnait, AK a donné l’exemple suivant : « Prenez les munitions et allons-y ».

En ce qui concerne le déroulé du transport, AK a indiqué qu’un ami était avec lui et qu’ils se relayaient la charge. Il a ajouté s’être arrêté à Konehun et ne pas être allé jusqu’à Fassama, la destination finale du transport. Pendant le transport, AK a déclaré qu’il n’y avait pas eu de pauses et que les soldats ne leur ont ni donné à boire, ni à manger durant le trajet. Alieu Kosiah n’était pas statique, il se déplaçait autant à l’avant qu’à l’arrière du convoi, et portait sur lui un pistolet.

Poursuivant ses réponses au Tribunal, le témoin a déclaré que les rebelles n’étaient jamais amicaux avec les civils et que les soldats étaient armés. Il a affirmé avoir été menacé durant le transport pour qu’il avance plus vite, mais il n’a jamais été battu. Il a ajouté que quand les soldats étaient violents, cela signifiait que leur chef aussi l’était, et qu’Alieu Kosiah n’est jamais intervenu pour empêcher des soldats de menacer ou battre des civils.

Le juge a ensuite fait entrer MoK et MuK, témoins de la défense. Il a alors demandé à AK s’il reconnaissait ces deux personnes. Le témoin a alors affirmé que le visage de MoK lui disait quelque chose, et qu’il avait vu MuK dans l’avion, sans toutefois connaître leurs prénoms. La Cour lui a ensuite demandé s’il était sûr que MoK et MuK dont il avait parlé étaient bien morts et si les deux personnes présentes ne pouvaient pas être les victimes en question. AK a répondu que c’était possible, et qu’il ne voulait pas s’avancer pour ne pas mentir à la Cour.

A propos des déclarations des témoins MoK et MuK selon lesquelles il n’y a jamais eu durant la guerre des personnes avec le même nom qu’eux, AK a déclaré que dans son village quatre personnes portent le même prénom que lui, et qu’il ne pouvait ainsi ni confirmer ni affirmer les déclarations des témoins.

AK a finalement indiqué être sûr que les MoK et les MuK qu’il avait mentionné étaient morts, car il avait vu leurs corps tomber, et qu’il en déduisait ainsi que les deux MoK et MuK présents dans cette procédure ne sont pas celles qu’il a vu se faire tirer dessus durant les transports en question.

Interrogés, MoK et MuK ont affirmé ne pas connaître AK.

Le témoin a indiqué avoir toujours peur d’Alieu Kosiah, surtout pour sa sécurité et celle de sa famille au Liberia, et a indiqué avoir dû mentir au gens sur la raison de sa venue en Suisse. Il a ainsi expliqué que « même si vous venez en Suisse pour vos propres affaires, tout le monde va penser que vous venez ici pour témoigner dans cette affaire », tout le monde étant focalisé sur cette affaire. Le témoin a indiqué que ce qui la motivé à venir témoigner en suisse c’est pour que la justice, et qu’il détestait que quelqu’un puisse profiter des gens et prendre la vie d’innocents et aussi d’enfants.

Il a ajouté ne pas avoir reçu de l’argent pour sa participation dans cette procédure et qu’il n’a pas non plus reçu de bourse, comme un de ses amis lui avait dit.

Il a indiqué ne pas avoir été menacé ou intimidé au Liberia en raison de sa participation dans cette procédure car personne ne sait qu’il est venu ici. Il a ajouté qu’il y a encore des « supporters » d’Alieu Kosiah au Liberia, même si la plupart des gens ne veulent plus entendre parler de Charles Taylor, et a illustré ses propos en indiquant que le frère d’Alieu Kosiah faisait régulièrement signe de compassion envers lui dans le « hatay shop ». AK a toutefois expliqué qu’un révérend dont il a tu le nom lui a conseillé de ne répondre à aucune question, que ce soit au Tribunal ou simplement des personnes curieuses de savoir pourquoi il est en Suisse.

Le témoin a ensuite affirmé ne pas avoir témoigné devant la TRC, pour la simple raison qu’il n’a pas été contacté par cette dernière. Il a également expliqué ne pas avoir tenté d’obtenir justice au Liberia, mais qu’il aimerait beaucoup voire un jour une cour être établie au Liberia.

Le juge a ensuite demandé à KK et AS s’ils avaient des commentaires à faire sur les déclarations du témoin AK. KK a répondu que les ULIMO avaient d’abord passé une nuit au village de Pasolahun avant de démonter la génératrice. Quant à AS, celui-ci a expliqué qu’il avait vu Alieu Kosiah tuer MuK à l’aide d’un AK47, qu’il avait pris à son garde du corps. Il a toutefois précisé que ce n’était pas une situation normale et qu’il était fort possible qu’ils ne se souviennent pas de la même chose.

Le Tribunal a ensuite demandé à KK s’il avait entendu la brève conversation entre MuK et Alieu Kosiah avant que le prévenu ne tire sur lui. Il a alors répondu qu’il les a en effet vus parler mais que son attention était concentrée sur son groupe, étant très apeuré à ce moment-là. Il a précisé n’avoir regardé seulement quand il a entendu le coup de feu.

Le tribunal a ensuite demandé à AK, s’il connaissait les autres parties à la procédure, il a indiqué connaître reconnaitre les plaignants GMS et EBJ, mais n’a pas reconnu LSM, ni JMK. Il a précisé les avoir rencontrés à l’université. Les plaignants JMK et LSM ont tous deux affirmé ne pas connaître AK.

Sur question de Me Gianoli, le témoin a indiqué avoir décider de témoigner dans cette affaire quand on lui a expliqué à Monrovia comment obtenir justice. Il a ajouté ne jamais avoir parlé des faits concernant l’affaire à quelqu’un, car en parler revient à mettre en danger sa vie.

AK a ensuite indiqué que ce sont les personnes du GJRP qui lui ont en premier parler du prévenu.

Poursuivant ses réponses à Me Gianoli, AK a déclaré ne pas avoir parlé avec GSM ni avec AS de cette affaire et qu’il ne savait pas qu’il allait également témoigner dans cette procédure.

Au sujet des pillages, AK a indiqué que les NPFL se sont également livrés au pillage. Il a indiqué que les NPFL prenaient parfois les vêtements des civils mais qu’ils les laissaient la plupart du temps dans un autre village, et qu’ils pouvaient ainsi retrouver leurs vêtements. Au contraire, tout ce qui était pillé par les ULIMO était revendu en Guinée, donc ils ne retrouvaient jamais leurs affaires.

AK a ensuite expliqué que Pasolahun était un centre pour déplacés, et que beaucoup de personnes déplacées se retrouvaient là-bas, pensant être en sécurité étant loin de la route principale. Il a ajouté que malgré la petitesse du village, Pasolahun est devenu la capitale du district en raison de son importance pour les pèlerins. Il a précisé qu’il n’avait aucun membre de sa famille avec lui à Pasolahun.

En ce qui concerne le transport de la génératrice, AK a expliqué que toutes les personnes y compris lui savaient avant de débuter le transport que Kolahun était la destination, et que la destination se situait proche du lieu où MuK a été tué.

Me Gianoli a ensuite posé plusieurs questions à AK concernant les familles respectives d’AS et de MuK et MoK, le témoin indiquant ainsi à chaque fois qu’il ne savait pas.

De plus, Me Gianoli a  demandé davantage des précisions sur les transports forcés de la génératrice et le meurtre de MuK, le témoin réitérant ainsi à chaque fois les propos qu’il a tenu précédemment.

Enfin, Me Gianoli a énuméré certains prénoms à AK, demandant s’il connaissait certains d’entre eux. Sur les huit prénoms mentionnés, AK a indiqué connaître SK, expliquant ainsi que c’était un des commissionner pour le district de Kolahun, qui est devenu député sous Samuel Doe.

Audition du témoin FK

Sur question du Tribunal, le témoin a confirmé connaître Alieu Kosiah, mais ne pas connaitre les parties plaignantes. De plus, interpellées, les parties plaignantes GMS, EBJ et LSM ont également affirmé ne pas connaître FK. Le témoin a affirmé reconnaître Alieu Kosiah à son apparence, son teint de peau, ses « pop eyes » et sa carrure, et a affirmé que c’est bien lui la personne qu’il a dénoncée.

Sur question du Tribunal, FK a indiqué avoir vécu à Monrovia entre 1989 et 1990, puis être parti chez son oncle et sa tante à Kolahun pour aller à l’école.

Il a indiqué ne pas avoir pris parti à la guerre civil, n’avoir soutenu aucune faction, et ne jamais avoir utilisé d’arme. De fait, il a déclaré ne pas pouvoir dire quelles armes étaient utilisées durant la guerre.

Au sujet des enfants-soldats enrôlés par les ULIMO, FK a déclaré qu’il avait entendu dire qu’ils utilisaient des enfants-soldats, mais que les autres factions aussi en utilisaient. Ainsi, FK a indiqué qu’il avait vu des enfants-soldats pendant la guerre des LURD.

Le témoin a décrit le climat qui régnait dans le Lofa pendant la guerre comme une situation anormale. Il a illustré ses propos en expliquant que les gens allaient d’un endroit à un autre en quête de nourriture et qu’ils étaient tourmentés et harcelés. Au sujet du comportement des soldats ULIMO, le témoin a indiqué qu’il avait appris qu’ils harcelaient les civils. FK a déclaré avoir entendu parler des crimes commis contre les civils, et en particulier des pratiques liées au « tabé », des actes de cannibalisme, des pillages, des meurtres de civils, ainsi que des transports forcés et des atrocités liées aux transports.

Étayant ses propos, FK a indiqué n’avoir jamais participé à des transports ou à des travaux forcés, étant parti pour Monrovia. Il a expliqué que des civils lui avaient rapporté les mauvais traitements et les atrocités commises par les soldats ULIMO durant les transports. En ce qui concerne la pratique du « tabé », FK a indiqué que c’était quand quelqu’un était attaché « très fortement ». Par ailleurs, le témoin a affirmé ne pas savoir dans quel but les soldats se livraient à des actes de cannibalisme. Enfin, au sujet de l’expression « Black Monday », le témoin a indiqué ne jamais avoir entendu parler de cela.

Le témoin a déclaré que les soldats ULIMO ont capturé son village en 1993. . FK était à ce moment-là scolarisé à Kolahun, mais il était revenu au village pour chercher de la nourriture. C’est à ce moment-là que le village a été capturé. Des coups de feu ont été échangés, et pour cette raison FK s’est caché dans la brousse. Il a précisé ne pas savoir combien de personnes ont été tuées ou capturées, mais avoir la certitude que son oncle s’est fait tuer. Poursuivant son récit, le témoin a indiqué avoir vu Alieu Kosiah descendre de son pick-up avec un bandeau, vêtu d’un jean et d’une chemise ; et qu’étant le commandant sur place, le prévenu était la personne la plus importante parmi les soldats présents. FK a précisé que c’était là la première fois qu’il voyait M. Kosiah, et qu’il portait un pistolet de type AK-45, et que l’on pouvait reconnaître à sa manière de s’habiller qu’il était supérieur aux autres. Les soldats appelaient le prévenu « Chief Kosiah ».

Le Tribunal a ensuite interrogé FK sur le meurtre de son oncle SK, dans le village de B, capturé par les ULIMO en 1993. Donnant davantage de renseignements à propos de son oncle, FK a indiqué qu’il était le frère de son père et que c’était un agriculteur.

Décrivant les circonstances du meurtre de son oncle, le témoin a déclaré que son oncle a été tué dans l’après-midi où le village a été capturé. FK a expliqué qu’Alieu Kosiah était venu avec ses hommes pour prendre les objets de valeur appartenant à son oncle, celui-ci possédant un pressoir à canne à sucre et faisant pousser du cacao et du café. À ce moment, le témoin a indiqué qu’il était caché dans la brousse à proximité de la maison. Il a ensuite affirmé que les hommes de Kosiah avaient ligoté son oncle et l’avaient emmené car son oncle avait déclaré ne rien posséder et ne pas avoir d’argent. FK a ensuite déclaré qu’il avait vu Alieu Kosiah tirer une balle et son oncle tomber au sol. Il a précisé que la balle avait touché le côté de la poitrine de son oncle et qu’il avait entendu un seul coup de feu. Il a ensuite déclaré qu’il était parti rejoindre sa tante à Kolahun et qu’il avait eu très peur lors de l’exécution de son oncle. Il a ajouté qu’il ne pensait pas qu’il y avait d’autres témoins de la scène. Le témoin a ensuite affirmé qu’il avait entendu que le pressoir de canne à sucre de son oncle avait été pillé. À une question du Président, le témoin a précisé qu’Alieu Kosiah avait utilisé son pistolet pour tuer son oncle.

Sur question du tribunal le témoin a affirmé avoir été intimidé au Libéria en raison de la participation à cette procédure. Il a expliqué que quelqu’un voulait s’en prendre à lui mais qu’il a réussi à s’enfuir. De plus, FK a indiqué que témoigner était systématiquement source de danger au Liberia, et que ceux qui témoignent doivent parfois déménager pour leur propre sécurité. Il a ajouté qu’il y avait des meurtres très étranges au Liberia et qu’il n’était pas rare que les gens qui témoignent se fassent tuer.

FK a ensuite affirmé que personne n’avait essayé de le convaincre de dire ou de ne pas dire certaines choses durant ce procès, et a indiqué être motivé par la justice, et qu’obtenir justice est la raison pour laquelle il participe à cette procédure, le gouvernement libérien ne voulant pas, selon lui, mettre en place une cour pour juger les criminels de guerre.

Revenant sur les raisons pour lesquelles Alieu Kosiah aurait tué son oncle, FK a expliqué que c’était sûrement par appât du gain, c’est-à-dire qu’il voulait sûrement piller le pressoir à canne à sucre pour ensuite aller le vendre. Le témoin a ajouté que les ULIMO n’hésitaient pas à recourir au travail forcé et à des traitements inhumains par appât du gain, afin de financer leur mouvement.

Sur question du Tribunal, le témoin a développé sa pensée selon laquelle le Liberia a un fort besoin de réconciliation, et que, pour atteindre ce but précis, il faut d’abord qu’une cour soit mise en place pour juger les criminels de guerre au Liberia. FK a ajouté qu’une fois justice faite, les citoyens libériens pourront se réconcilier et travailler ensemble pour aller de l’avant.

Interrogé par Me Werner au sujet de sa petite amie, FK a affirmé qu’il avait en effet eu à l’époque une relation avec une fille mandingo, mais qu’ils ne s’étaient pas mariés. Par ailleurs, le témoin a confirmé sa déclaration selon laquelle toutes les ethnies du Liberia viennent du bassin soudanais. De plus, FK a également confirmé sa déclaration selon laquelle si l’on prend un groupe de 50 personnes, il y en aura toujours qui auront les « pop eyes ».

Poursuivant ses réponses à Me Werner, FK a affirmé qu’il était focalisé sur l’idée qu’il se rendait avec sa tante à Monrovia, et non sur le fait de savoir quelle faction contrôlait quel endroit. Au sujet de son oncle, le témoin a expliqué qu’il était comme un père pour lui.

Enfin, Me Werner a demandé à FK de préciser sa déclaration selon laquelle la guerre civile au Liberia était « insensée ». Étayant ses propos, le témoin a expliqué qu’il n’y a eu ni gagnant, ni perdant durant la guerre. Poursuivant sa réponse, FK a affirmé que cette guerre n’a fait que ramener le Liberia des années et des années en arrière, les infrastructures ayant été détruites, les centrales électriques pillée et les biens de beaucoup de personnes ainsi que du gouvernement dérobés. Encore aujourd’hui, le Liberia n’a pas de système de canalisation d’eau, et Monrovia n’a pas d’approvisionnement constant en électricité. Le pays a également accumulé un fort retard en ce qui concerne le développement de son système routier. Le témoin a expliqué que toutes ces raisons font qu’aujourd’hui, nous ne pouvons pas affirmer qu’un clan est sorti vainqueur de la guerre.

Me Gianoli a posé une série de question au témoin sur son voyage de B. à Kolahun, Et ensuite à Monrovia. Le témoin a ainsi expliqué qu’après la mort de son oncle, il s’est rendu chez sa tante à Kolahun, puis ils sont immédiatement partis pour Monrovia. Me Gianoli a ensuite demandé davantage de précisions au témoin quant à son trajet de Monrovia jusqu’à Kolahun. FK a alors répondu avoir voyagé seul, et s’y être rendu en voiture en empruntant la route principale. Interrogé sur les factions qui contrôlaient les territoires par lesquels il est passé depuis Monrovia, FK a indiqué que c’était à l’époque les soldats de Charles Taylor qui contrôlaient la zone et qu’il était possibles de circuler librement dans ces territoires depuis Monrovia.

Me Gianoli a ensuite demandé au témoin si les NPFL utilisaient également des enfants-soldats, ce à quoi il a répondu qu’il n’en avait pas vu, mais qu’on lui avait en effet dit que les deux factions utilisaient des enfants-soldats.

 Il a également demandé au témoin si une liste de noms lui évoquait quelque chose. Répondant à Me Gianoli, le témoin a indiqué ne pas savoir ce que désignait le « Black Friday ». Il a ensuite déclaré avoir entendu parler de Pepper & Salt, Dekou, Kunti et Senegalee, mais ne pas savoir qui sont ces personnes.

Enfin, la Cour lui a demandé davantage de renseignements en ce qui concerne son trajet en Suisse.