[10/13/2022] Jour 4 : l'enquête

Cette quatrième journée d’audience a été consacrée aux diverses procédures judiciaires menées dans le cadre l’affaire Kunti Kamara.

Audition du Général Jean-Philippe Reiland, chef de l’OCLCH, en qualité de témoin cité par le Ministère public

Le Général Reiland a commencé par présenter l’Office central de lutte contre les crimes contre l'humanité et les crimes de haine (OCLCH ou l’Office) avant d’en décliner les missions. Il a décrit l’OCLCH comme une structure administrative rattachée à la Direction Générale de la Police Nationale. L’OCLCH a été créé en 2013 par décret du Premier Ministre et déploie 5 activités : l’enquête, l’appui et le soutien aux unités, la coordination policière de l’action, la coopération judiciaire avec d’autres pays et l’établissement de l’état de la menace relative au contentieux géré grâce à ses compétences en matière de renseignement criminel.

Le Général Reiland a précisé que l’OCLCH avait été créé dans le but de répondre aux besoins issus des engagements internationaux de la France en matière de lutte contre les crimes internationaux, en particulier en lien avec la signature du Statut de Rome. Il a rappelé le fonctionnement de la Cour pénale internationale et expliqué de quelle manière le principe de la compétence universelle a été transposé en droit français. Il a précisé que des modifications constitutionnelles et législatives ont conduit à la création d’un pôle « crimes contre l’humanité » en 2011, puis de l’OCLCH en 2013.

Le Général Reiland a donné les raisons pour lesquelles les missions évoquées précédemment ont été confiées aux gendarmes. D’une part, les gendarmes ont accumulé une expérience considérable au sein de la Section de recherche de Paris, qui a notamment été sollicitée dans les affaires Touvier Barbie, Papon, et pour le Rwanda. D’autre part, les gendarmes sont les seuls à pouvoir enquêter en tant que force de police de l’armée et ont développé une capacité à accompagner l’armée sur les zones de guerre.

Le Général Reiland a ensuite présenté les trois divisions qui composent l’Office : la division de la stratégie et de la coopération internationale, la division de lutte contre les crimes de haine et la division de lutte contre les crimes contre l’humanité et crimes de guerre (ancienne division de l’investigation). Il a précisé que cette dernière division compte 18 membres et que le volume des enquêtes confiées à l’Office s’élève à ce jour à environ 150 dossiers concernant 32 pays, ce qui implique des déplacements 8 à 10 par an, parfois pour plusieurs semaines.

S’agissant des modes d’action, le Général Reiland a expliqué que l’OCLCH dispose des outils prévus par le code de procédure pénale. Il a précisé que compte tenu de l’éloignement dans le temps et dans l’espace des faits, les actes plus classiques de police judiciaire sont utilisés (audition de témoin, accès à des rapports, etc.). Il a indiqué en outre que tous les enquêteurs sont des officiers de police judiciaire spécialisés.

Au sujet des modes d’actions à l’étranger, le Général Reiland a expliqué que les pays sont souverains et peuvent accorder ou non le déplacement des enquêteurs de l’OCLCH sur leur territoire. Il a précisé que la coopération judiciaire internationale est en principe réglée dans des accords bilatéraux ou multilatéraux, mais qu’aucun accord n’a été conclu avec le Libéria à sa connaissance.

Concernant ce dossier, le Général Reiland a indiqué que le cadre de l’enquête internationale avait été respecté. Il a précisé qu’une demande d’entraide avait été déposée et que les autorités libériennes avaient accordé le déplacement des magistrats et enquêteurs français sur leur territoire. Il a précisé que ces derniers ne peuvent conduire que des auditions à l’étranger selon le code de procédure pénale français, à l’exclusion d’autres actes, et moyennant l’accord des autorités locales. Il a précisé que dans le cas d’espèce, les autorités locales avaient conduit elles-mêmes les auditions sollicitées par les autorités françaises. Les enquêteurs français étaient présents et ont pu apporter un appui technique, notamment en matière de prise de vues et de relevés GPS.

La Cour questionne le Général Reiland :

Questionné sur les éventuelles spécificités que comportait le dossier, le Général Reiland n’a pas relevé de particularités importantes, sous réserve de la saisine des autorités françaises dans la mesure où il y avait eu un dépôt de plainte par une ONG ainsi qu’une demande d’enquête internationale émanant de la Suisse.

Sur question du Président, le Général a souligné certaines difficultés rencontrées sur place pour mener l’enquête. Ces difficultés étaient principalement d’ordre logistique et concernaient les déplacements (mauvais état des routes) et la recherche des témoins. Sur question, le Général Reiland a indiqué que l’OCLCH ne travaillait pas sur d’autres dossiers au Libéria.

Interrogé sur les différences entre le recueil de preuves pour des crimes commis actuellement et celui pour des faits commis il y a 20 ou 30 ans, le Général Reiland a indiqué que la différence principale résidait dans les risques que prenaient les enquêteurs et la vigilance particulière à avoir en ce qui concerne le recueil de témoignages des parties au conflit. Il a précisé que les enquêteurs s’efforçaient à procéder à des remises en situation pour vérifier des informations qui leur étaient communiquées.

La partie civile questionne le Général Reiland :

Interrogé sur les difficultés liées au recueil des preuves et sur la méthode utilisée, le Général Reiland a indiqué que la plupart des enquêteurs étaient formés à la méthode « PROGREAI » (Processus général de recueil des entretiens, auditions et interrogatoires), développée partir du savoir-faire canadien. Il a précisé que les enquêteurs étaient formés pour détecter des divergences dans le recueil de la parole. Le travail de recueil de la parole est complexifié à l’étranger, dans la mesure où il faut passer par l’intermédiaire d’interprètes. Il a précisé qu’une attention particulière était portée au choix des interprètes en concertation avec l’ambassade de France sur place.

Le Ministère public questionne le Général Reiland :

A nouveau, le Général Reiland a été interrogé sur les défis principaux concernant le recueil des preuves de crimes de masse anciens. A cette question, il a répondu que l’identification des crimes, des victimes et des témoins était « le plus difficile et le plus crucial ». Interrogé sur l’intérêt des remises en situation, le Général Reiland a souligné l’importance de confronter les éléments recueillis à la réalité du terrain, en espérant que le terrain n’ait pas trop changé.

Questionné sur la mission effectuée dans le cadre de ce dossier, le Général Reiland a confirmé qu’il s’agissait selon lui de la première remise en situation effectuée par la justice française au Libéria.

La défense questionne le Général Reiland :

Interrogé sur la procédure en matière d’actes d’enquêtes à l'étranger, le Général Reiland a confirmé que les investigations dans les pays étrangers étaient faites à la demande des autorités françaises, plus précisément du juge d’instruction. Il a répété que les enquêteurs français pouvaient effectuer des auditions à l’étranger eux-mêmes si le pays d’accueil l’autorisait. Pour les autres actes d’enquêtes, il est nécessaire de passer par une demande d’entraide pénale internationale.

Interrogé par la défense sur les raisons de l’absence d’actes lourds d’enquête (prélèvements d’ADN et d’empreintes, perquisition, garde-à-vue, téléphonie) qui auraient pu être effectués par les autorités françaises, le Général Reiland a expliqué que ces actes pouvaient être réalisés par les autorités libériennes à la demande du magistrat français, mais que cela n’était pas réaliste compte tenu de l’ancienneté des faits. Le Général Reiland a souligné que ce qui était pertinent dans ce dossier, c’était l’identification des témoins.

La défense a rétorqué qu’il y avait des affaires criminelles en France, même très anciennes, pour lesquelles des actes d’enquête tels que des analyses de l’ADN prélevé sur des cadavres, ont été effectués. Le Général Reiland a répliqué que dans ces cas, la plupart des investigations avaient été conduites sur des scellés, qui font ici défaut.

Le Général Reiland a enfin confirmé qu’il était difficile de mener une enquête classique dans le cadre d’une affaire ancienne, en raison du temps écoulé.

* * *

Après avoir remercié le Général Reiland pour son témoignage, le Président a présenté à la Cour des photographies tirées du livre de James Faseukoi relatant la première guerre civile au Libéria. Différentes scènes y sont illustrées telles que les portraits des principaux seigneurs de guerre, les troupes des différentes milices (NPFL, ECOMOG, ULIMO), des enfants soldats, le désarmement, la malnutrition ou encore les conditions des routes.

* * *

Audition de Luther J. Sumo, procureur du comté de Lofa, en qualité de témoin cité par le Ministère public (visioconférence)

Avant de donner la parole à Luther J. Sumo, le Président a précisé que ce dernier a été entendu par le juge d’instruction le 10 janvier 2020 en qualité de témoin.

Lors de sa déclaration spontanée, le Luther J. Sumo a expliqué qu’au moment de la guerre civile, il était réfugié en Guinée, où il exerçait en tant qu’enseignant bénévole. Il a indiqué que c’était en cette qualité qu’il avait rencontré MN et qu’il s‘était entretenu longuement avec elle au cours de l’année 1994, ainsi qu’avec d’autres parents et élèves. Luther J. Sumo a déclaré avoir appris beaucoup de choses qui s’étaient passées à Foya. Il a également évoqué avoir vu des photos de tueries, de têtes décapitées, de personnes coupées en morceaux et mises dans des brouettes. Il a déclaré que certains rebelles avaient reçu l’ordre de prendre des morceaux de cadavres et que ces actes avaient traumatisés beaucoup de Libériens. Il a par ailleurs évoqué des pillages de biens par les rebelles et le transport de machines vers la frontière guinéenne. Il a raconté avoir été traumatisé par les actes commis sous le régime de Charles Taylor et s’être rendu en Guinée pour chercher de l’aide où il a retrouvé d’autres Libériens qui pleuraient. Il a indiqué avoir arrêté d’enseigner en 1988 pour continuer ses études, puis avoir travaillé en tant qu’avocat avant d’exercer la fonction de procureur.

La Cour questionne Luther J. Sumo :

Interrogé sur l’existence d’une volonté politique ou juridique de poursuivre les exactions qu’il a évoquées, Luther J. Sumo a expliqué que les Libériens attendaient que le gouvernement agisse sur la base des recommandations émises par la Commission Vérité et Réconciliation (CVR).

Le Président a demandé à Luther J. Sumo s’il connaissait les seigneurs de guerre nommés dans le dossier. Ce dernier a répondu qu’il connaissait Alhaji Kromah. Interrogé sur les noms de Fine Boy et Ugly Boy, Luther J. Sumo a déclaré que tous les chefs de guerre avaient des surnoms et qu’il était difficile de les reconnaître aujourd’hui, même pour quelqu’un qui les avait vus à l’époque des faits. Interrogé sur le nom de Deku, Luther J. Sumo a répondu qu’il avait entendu parler de lui. Le Président lui a alors demandé s’il avait entendu parler de C.O. Kundi. Luther J. Sumo a précisé que l’abréviation « C.O. » signifiait « commanding officer » et que, bien qu’il ne l’ait jamais vu, il avait entendu parler de lui. Il a également indiqué que les gens qui s’appelaient C.O. recevaient des ordres des supérieurs et agissaient parfois de leur propre volonté, par exemple en pillant les denrées des villageois.

Questionné sur les moyens d’enquêtes à disposition des procureurs, Luther J. Sumo a déclaré ne pas disposer des moyens techniques pour faire des investigations criminelles telles que des analyses ADN et que cela était un problème majeur. Il a précisé que le comté de Lofa comptait deux procureurs et un juge, ainsi que trois avocats de la défense. Sur question, il a indiqué qu’il y avait des cours spécialisées à Monrovia, notamment une cour spécialisée en matière de crimes sexuels. Il a ajouté que dans les autres comtés comme le Lofa, un seul juge est compétent pour toutes les affaires, qu’elles soient civiles ou criminelles.

La partie civile questionne Luther J. Sumo :

Luther J. Sumo a confirmé qu’il s’était réfugié dans le village de Guéckédou et que la ville de Solomba était une ville frontalière entre la ville de Foya et la Guinée, divisée par une rivière.

Interrogé sur les pillages de biens, il a confirmé avoir évoqué le pillage de machines, telles que des générateurs électriques, mais aussi de marchandises. Il a par ailleurs confirmé qu’il s’agissait de biens appartenant à des ONG ou à des citoyens et précisé que les rebelles prenaient tout ce qu’ils trouvaient.

Sur question, il a confirmé que la population de Foya appartenait à l’ethnie Kissi.

Luther J. Sumo a ensuite été interrogé sur ses déclarations devant le juge d’instruction, selon lesquelles la population avait été réduite en esclavage. Il a confirmé ses déclarations en précisant que les gens ne pouvaient plus travailler dans leurs champs et n’étaient plus libres de faire ce qu’ils voulaient. S’ils résistaient, ils étaient tués. Luther J. Sumo a également déclaré que des jeunes filles de 12 à 14 ans avaient été violées. Questionné sur ce qu’il entendait par « esclavage », Luther J. Sumo a déclaré que les gens étaient déshumanisés et soumis à la volonté des groupes armés. Il a confirmé qu’il avait entendu parler de Mohamed Jabbateh, alias Jungle Jabbah, et d’Alieu Kosiah et qu’il avait vu Agnes Reeves Taylor en 1993. En revanche, il a indiqué n’avoir jamais entendu parler d’un marchand du nom de Kake. Interrogé sur l’identité de ceux qui réduisaient la population en esclavage, il a déclaré qu’il s’agissait de ceux qui avaient des armes, y compris ceux qu’il venait de mentionner.

Le Ministère public questionne Luther J. Sumo :

Interrogé sur le fonctionnement de l’administration à Lofa sous l’occupation de l’ULIMO, Luther J. Sumo a indiqué qu’il y avait toujours des activités et que des administrateurs étaient présents. Confronté à ses déclarations selon lesquelles il n’y avait plus d’hôpital ni de registres des naissances ni de médecins à l’arrivée de l’ULIMO, il les a confirmées.

Interrogé sur la mission des enquêteurs français d’avril 2019 à Foya, à laquelle il a confirmé avoir participé, Luther J. Sumo a indiqué qu’il ne connaissait pas tous les témoins et qu’ils étaient allés de village en village pour les localiser. Il a par ailleurs confirmé avoir procédé sous forme d’enquête de voisinage sans effectuer de recherches par le biais de la téléphonie ou de base de données. Il a précisé que des acteurs humanitaires avaient également fourni des informations pour aiguiller les enquêteurs dans la recherche des témoins.

Le Ministère public a précisé à l’attention de la Cour que seuls sept témoins avaient pu être localisés et entendus en dépit des demandes du juge d’instruction.

Interrogé enfin sur les victimes de violences sexuelles, Luther J. Sumo a expliqué qu’il était difficile de recueillir leurs témoignages car les femmes étaient traumatisées et se sentaient humiliées.

La défense questionne Luther J. Sumo :

Questionné sur les photos de têtes décapitées qu’il a évoquées précédemment, Luther J. Sumo a indiqué ne pas en disposer, mais uniquement les avoir vues. Il a déclaré par ailleurs avoir été témoin oculaire de la vente de certains biens par les membres de l’ULIMO, mais ne pas avoir assisté aux pillages. Selon lui, il était néanmoins évident que les biens avaient été pillés par les personnes citées précédemment. L’avocat de la défense a alors insisté sans succès pour que Luther J. Sumo cite des noms.

Sur question, Luther J. Sumo a déclaré qu’il avait quitté Gbarnga en 1991 pour se réfugier en Guinée, dans un camp à proximité de Foya. Il a précisé avoir fui le NPFL, qui occupait le Lofa au début de la guerre civile.

L’avocat de la défense l’a ensuite interrogé au sujet de ses déclarations selon lesquelles aucun registre n’était tenu pendant la guerre de sorte qu’il n’y avait ni certificats de naissance ni certificats de décès. L’avocat de la défense a demandé à Luther J. Sumo comment il pouvait savoir que quelqu’un était mort si aucun document ne pouvait l’attester. Ce dernier a demandé à son tour s’il était nécessaire d’avoir un certificat pour savoir que quelqu’un était mort. L’avocat de la défense a alors confronté Luther J. Sumo à ses déclarations au sujet de Fine Boy. Devant le juge d’instruction, il avait déclaré que selon ses informations, Fine Boy avait été tué. L’avocat de la défense a précisé que Fine Boy était vivant et qu’il a même été entendu dans le cadre du procès en Suisse concernant Alieu Kosiah. Luther J. Sumo s’est justifié en disant que plusieurs rebelles portaient le même nom et que certaines personnes lui avaient dit qu’un dénommé Fine Boy avait été tué alors qu’il traversait la frontière pour rejoindre un autre groupe armé. L’avocat de la défense a rétorqué que Fine Boy a indiqué lors de son audition en Suisse que « Fine Boy » était son vrai nom. Par ailleurs, l’avocat de la défense a relevé que Luther J. Sumo a déclaré lors de sa précédente audition que Fine Boy avait été tué lors d’un cambriolage.

Interrogé sur les noms de commandants ou soldats de l’ULIMO qu’il pouvait citer, Luther J, Sumo a cité Kunti Kamara et a ajouté avoir été plus concerné par les victimes que par les auteurs des crimes.

Il a confirmé avoir accompagné les enquêteurs français dans le comté du Lofa en sa qualité de procureur. Il a précisé que dans le cadre d’une enquête, le procureur a le pouvoir de chercher et d’identifier les victimes. Questionné sur la collaboration avec les enquêteurs français, il a déclaré que ces derniers n’avaient pas proposé de procéder à des excavations, à des expertises médico-légales ou à des analyses ADN. Il a précisé que la police libérienne avait auditionné des témoins en compagnie des enquêteurs français.

Audition de Patrick J. Massaly, avocat et commissaire de police adjoint à Monrovia (Liberia), cité en qualité de témoin par le Ministère public (visioconférence)

Avant de donner la parole à Patrick J. Massaly, le Président a indiqué que ce dernier a été entendu par le juge d’instruction le 13 janvier 2020.

Patrick J. Massaly a déclaré avoir été le chef du groupe de la police du Libéria qui a exécuté les commissions rogatoires à la demande des autorités françaises. Il a expliqué avoir été mandaté pour faire un déplacement dans le comté de Lofa pour enquêter sur des allégations de viol, d’esclavage et d’abus sexuel. Il a expliqué son rôle et son activité dans le cadre de l’enquête diligentée à l’encontre de Kunti Kamara. Sur place, il a recueilli des témoignages des victimes et de différents témoins, qui font était d’un certain nombre de crimes, dont la plupart auraient été commis par Kunti Kamara ou sous sa supervision.

Patrick J. Massaly est ensuite brièvement revenu sur certains témoignages qu’il a recueillis. D’abord, il a évoqué que certaines victimes ont déclaré avoir été forcées à marcher en portant des objets lourds sur des distances de 20km entre Foya et Solomba, ville frontalière, sous la supervision de Kunti Kamara. Il a ensuite évoqué un témoignage selon lequel Kunti Kamara se serait rendu dans une maison de laquelle il aurait extirpé une femme malade qu’il aurait ensuite abattue d’une balle dans la tête devant tout le monde sur la place du village. Patrick J. Massaly a aussi cité le meurtre d’un interprète sollicité par une ONG, à laquelle il aurait déclaré que les destructions de l'église et de l’hôpital [de Borma Mission] avaient été causées par les soldats de l’ULIMO sous le commandement de Kunti Kamara.

Patrick J. Massaly a indiqué que de nombreuses victimes étaient des femmes et a évoqué des témoignages de viols répétés, dont un commis à l’aide d’une baïonnette introduite dans les parties génitales d’une jeune femme. Cette dernière aurait encore été violée à plusieurs reprises alors qu’elle saignait.

Il a enfin déclaré que les corps des personnes exécutées étaient coupés en morceaux et placés dans des brouettes et que les villageois étaient obligés de prendre ou d’acheter des parties de corps humains. S’ils refusaient, ils étaient sévèrement battus. Un homme avait aussi été forcé à boire du sang qu’on lui avait présenté dans une coupe, et était décédé quelques jours plus tard des suites de cette ingestion.

La Cour questionne Patrick J. Massaly :

Patrick J. Massaly a été questionné sur les difficultés auxquelles ont été confrontés les enquêteurs dans l’identification et la localisation des différents témoins. Il a indiqué que la plupart ont été identifiés par les indications données par les villageois, en l’absence de papiers d’identité, de registres d’état civil et d’adresses précises. Il a ajouté qu’il était commun au Libéria que les personnes écrivent leurs noms comme elles le prononcent, ce qui a davantage compliqué la tâche des enquêteurs. La saison des pluies a aussi rendu difficile l’accès aux zones reculées pour aller à la rencontre des victimes et des témoins.

Il a confirmé, que lors des auditions, certains témoins ont été en mesure de reconnaître Kunti Kamara sur la base de photographies actuelles, alors que d’autres ont éprouvé des difficultés en raison de l’écoulement du temps (celui-ci avait une façon de se vêtir différente à l’époque). L’accusé était décrit par les victimes et témoins comme très arrogant, jeune et toujours aux commandes.

La partie civile questionne Patrick J. Massaly :

Interrogé sur ses précédentes déclarations devant le juge d’instruction, Patrick J. Massaly a précisé que le seul fait de prononcer le nom de Kunti Kamara suscitait la crainte chez certains témoins et victimes, qui ont préféré ne pas témoigner par peur des représailles

Le Ministère public questionne Patrick J. Massaly : 

Patrick J. Massaly a indiqué avoir recueilli lui-même les déclarations des témoins, notamment celles de EN et de TT. Il a précisé que les victimes et les témoins craignaient de parler de ce qui leur était arrivé, mais qu’une fois rassurés par les enquêteurs, ils ont accepté de témoigner.

La défense questionne Patrick J. Massaly :

Interrogé sur ses déclarations concernant le pillage de l’association religieuse « Mission d’Orient », Patrick J. Massaly a déclaré ne pas avoir mené d’investigations particulières à cet égard. Il a précisé avoir reçu de simples informations de l’association, qui se serait chargée de la réhabilitation de l’église et de l’hôpital [de Borma Mission].

Questionné sur l’identification de la victime EN, Patrick J. Massaly a expliqué l’avoir identifiée grâce à des locaux qui avaient indiqué où elle se trouvait. Il a précisé que l’identification d’une personne ne se faisait pas sur la base de papiers d’identité, mais grâce aux locaux qui se connaissent entre eux et qui ont accompagné les enquêteurs auprès de la personne recherchée. Selon lui, il n’y avait pas lieu de remettre en question les indications des villageois.

Interrogé sur les noms de personnes responsables d’exactions au sein de l’ULIMO qu’il connaissait, Patrick J. Massaly a cité Alieu Kosiah qu’il a désigné comme le premier dans la hiérarchie, Kunti Kamara, qui arrivait en second, Ugly Boy alias Saah Chuey qui tuait uniquement avec une hache et Fine Boy. Il a précisé qu’il avait déduit que Kunti Kamara était second dans la hiérarchie en raison du fait qu’il était très actif (« always around ») et très agressif et qu’il était en position de pouvoir.

Questionné sur les lieux où se trouvent d’anciens combattants de l’ULIMO selon ses déclarations devant le juge d’instruction, Patrick J. Massaly a indiqué ne pas avoir été mesure d’identifier ces anciens combattants dans la mesure où ils utilisent des noms différents en fonction des endroits où ils se trouvent. La défense a manifesté son étonnement quant à cette réponse puisque Patrick J. Massaly avait indiqué avoir identifié la présence d’anciens soldats de l’ULIMO dans certains quartiers de Monrovia (Camp Johnson Road, Caldwell, Chocolate City, Chicken Soup Factory, Jacob Town, Congotown et Paynsville).

Interrogé au sujet de EN qui aurait été victime de viol avec une baïonnette, il a déclaré qu’aucun examen médical n’avait été réalisé sur cette dernière pour examiner les séquelles du viol qu’elle a subi. EN lui a dit qu’elle souffrait beaucoup et qu’elle saignait par intermittences, et qu’elle avait reçu un traitement à base de plantes.

Questionné sur la force probante des témoignages, Patrick J. Massaly a souligné l’absence de moyens techniques et scientifiques à disposition des enquêteurs pour mener d’autres investigations et a indiqué que le recueil des témoignages des témoins et des victimes avait permis de dresser une typologie de la situation et de faire des recoupements. Il a reconnu ne pas avoir eu connaissance du nom de l’accusé avant le début de son enquête en 2019.

A l’issue de la déclaration de Patrick J Massaly, le Président a tenu à rappeler les difficultés d’identification des témoins rencontrées dans le cadre de l'organisation de ce procès. Il a rappelé que la plupart des témoins cités ne disposaient d’aucun document d’identité officiel et a salué à ce titre le travail des ambassades de France au Libéria et en Côte d’Ivoire, grâce auxquelles les témoins ont pu être acheminés afin de témoigner à l’audience.

Audition de Romuald Peruggia, adjudant-chef de l’OCLCH, cité en qualité de témoin par le Ministère public

L’adjudant-chef Peruggia a commencé par expliquer qu’il était cité en qualité de témoin afin de relater les actes d’enquêtes réalisés par l’OCLCH. Il a expliqué que le 3 août 2018, le Parquet de Paris avait informé l’OCLCH de l’ouverture d’une enquête préliminaire à l’encontre de Kunti Kamara, lequel était visé pour des actes de torture constitutifs de crimes contre l’humanité à l’issue de la plainte déposée par Civitas Maxima. Kundi Kamara était présenté comme un responsable de l’ULIMO. Les faits dénoncés s’étaient déroulés entre 1993 et 1997 dans le comté du Lofa et concernaient des atrocités commises contre la population civile, notamment l’ethnie Kissi, lors de l’occupation du Lofa par l’ULIMO. Ces atrocités consistaient en des réductions en esclavage, des meurtres et du cannibalisme. Dans la plainte, Kunti Kamara était présenté comme un responsable de l’ULIMO, personnellement impliqué dans ces faits, lesquels étaient corroborés par les récits de plusieurs témoins.

L’un des témoins, JTC, expliquait avoir été forcé de porter des charges pour le compte de l’ULIMO jusqu’à la frontière guinéenne. Il dénonçait par ailleurs les sévices subis par DN, qui aurait été arrêté en présence de Kunti Kamara, conduit sur l’ancien terrain d’aviation et attaché selon la technique du tabé avant d’être frappé au niveau du torse avec une hache par un dénommé Ugly Boy. Son cœur aurait été arraché par Ugly Boy puis consommé par les chefs de l’ULIMO sur le perron de la maison d’Ugly Boy pour terroriser la population. Le dernier fait dénoncé était le meurtre de KT. Kunti Kamara se serait rendu dans le village de Foya Dundu, aurait extirpé KT de sa maison en l’accusant d’être une sorcière, et l’aurait abattue d’une balle dans la tête avant d’ordonner aux civils présents de lui creuser une tombe et de mettre feu à son corps.

L’adjudant-chef Peruggia a expliqué que l’OCLCH avait été saisi de ces faits et que les premières investigations menées visait à identifier Kunti Kamara. Les recherches à partir de bases de données n’ont pas permis de l’identifier formellement. Kunti Kamara était déclaré comme habitant à Évreux, mais n’a pas été retrouvé à l’adresse indiquée. Grâce à la demande d’entraide formée par les autorités suisses, qui souhaitaient l’entendre [dans le cadre du procès d’Alieu Kosiah], l’OCLCH a obtenu une photo de Kunti Kamara. Il a alors été décidé de procéder à un déplacement à Évreux le 27 août 2018 pour rencontrer Faliku Donzo. Ce dernier a indiqué aux enquêteurs avoir hébergé Kunti Kamara pendant quelque temps. Selon ses dires, Kunti Kamara avait ensuite déménagé. A l’adresse indiquée par Faliku Donzo figurait le nom de Kunti Kamara. En raison de son absence, une convocation a été déposée dans sa boîte aux lettres. Les enquêteurs ont procédé à des investigations sur le numéro de téléphone de Kunti Kamara. Il est apparu que ce dernier avait quitté Évreux et se dirigeait vers la région parisienne. Le téléphone de Kunti Kamara avait déclenché un relais situé à Bobigny. Le lendemain, Kunti Kamara s’était procuré un nouveau téléphone. Parmi ses interlocuteurs figurait Layee Bamba, domicilié à Bobigny. Une fuite de Kunti Kamara était soupçonnée. Sa ligne téléphonique a été mise sur écoute et a laissé apparaître une communication avec un interlocuteur au Portugal, lors de laquelle Kunti Kamara faisait état de sa volonté de quitter la France avec de faux papiers. Il a alors été décidé de mettre sur pied un dispositif d’interpellation à Bobigny. Le téléphone de Kunti Kamara a été localisé au domicile de Layee Bamba et l’interpellation a été déclenchée. Kunti Kamara a tenté de s’échapper par la fenêtre, sans succès. Il a été arrêté et placé en garde-à-vue. Une perquisition a été effectuée au domicile de Layee Bamba et a permis notamment de découvrir un billet de bus pour Lisbonne prévu pour le lendemain ainsi qu’un document d’identité et de voyage délivré par l’ambassade guinéenne à Paris au nom de Moussa Bamba avec la photo de Kunti Kamara. Ce dernier a fait usage de son droit au silence lors de sa garde-à-vue.

L’adjudant-chef Peruggia a ensuite rappelé que Kunti Kamara avait été entendu par les autorités suisses en tant que témoin dans le cadre de la procédure contre Alieu Kosiah. Lors de son audition, Kunti Kamara a uniquement reconnu avoir rejoint les rangs de l’ULIMO en 1992 en réaction aux actes commis par les rebelles de Charles Taylor à l’encontre des Mandingues.

L’adjudant-chef Peruggia a ajouté que plusieurs témoins avaient été entendus en France, mais que ces auditions n’avaient rien apporté sur le fond. Elles ont uniquement permis de déterminer que Kunti Kamara serait arrivé en France en 2016. Il a par ailleurs été décrit par son voisinage comme une personne calme et gentille, discrète sur son passé. Layee Bamba a également été auditionné et a indiqué ne rien savoir sur la vie de Kunti Kamara au Libéria. Il a déclaré avoir acheté le billet de bus pour Lisbonne pour le compte de ce dernier et l’avoir accompagné à l’ambassade de Guinée à Paris.

L’adjudant-chef Peruggia a relaté les témoignages recueillis au Libéria, en particulier ceux de FG, SFC, RK. Il a ensuite précisé que la présence des enquêteurs français sur place consistait essentiellement en une assistance technique (prise de photographies, géolocalisations GPS) des autorités libériennes, qui réalisaient elles-mêmes les actes ordonnés par le juge d’instruction français. L’adjudant-chef Peruggia est finalement revenu sur les remises en situation qui avaient notamment permis de se rendre compte du faible niveau de développement du pays en termes d’infrastructures et d’accessibilité (absence de routes goudronnées, d’électricité et d’eau courante à Foya).

La Cour questionne Romuald Peruggia :

Interrogé sur le nom de Mohamed Soumawolo utilisé pour désigner Kunti Kamara, l’adjudant-chef Peruggia a indiqué que ce nom avait été cité dans la plainte de Civitas Maxima et dans la demande d’entraide des autorités suisses, mais il ignorait si des investigations avaient été menées à cet égard.

Il a expliqué qu’en raison des difficultés d’identification de Kunti Kamara, les enquêteurs avaient orienté leurs investigations autour de son entourage à Évreux. L’interpellation de l’accusé en fuite a été rendue possible par la mise en œuvre de moyens techniques importants (écoutes téléphoniques, surveillance de sa carte bancaire, localisation de son boîtier téléphonique). Grâce aux éléments saisis lors de la perquisition, il a pu être établi que Kunti Kamara envisageait de quitter le territoire français le lendemain à 10h30. Il était donc urgent de le localiser. Selon les explications fournies par les enquêteurs, Kunti Kamara avait également adressé une photo à son correspondant au Portugal pour que ce dernier établisse d’autres faux documents.

L’adjudant-chef Peruggia est ensuite revenu sur les conditions de travail au Libéria qu’il a qualifiées de très compliquées pour les raisons évoquées précédemment (réseau routier quasi inexistant, absence d’électricité à Foya). Le travail d’enquête a également été rendu difficile par l’absence d’adresses précises pour localiser les témoins. A cela s’ajoute que l’assistance apportée aux enquêteurs libériens était strictement délimitée par la commission rogatoire internationale, de sorte que les enquêteurs français n’ont pas pu auditionner eux-mêmes les témoins, mais seulement assister à ces auditions et fournir en amont un questionnaire et une planche photographique aux enquêteurs libériens.

L’adjudant-chef Peruggia a relevé l’absence d’exagération et d’esprit de vengeance de la part des victimes et témoins interrogés, qui se sont limités à rapporter ce qu’ils ont vécu. Interrogé sur la théorie du complot avancée par Kunti Kamara, il a indiqué qu’aucun témoin ne semblait avoir déposé dans l’espoir de bénéficier d’une protection en Europe. Selon lui, la France ne représente pour eux qu’un pays lointain.

L’adjudant-chef Peruggia a enfin déclaré que la guerre du Libéria, par la cruauté des actes commis, présentait des similitudes avec le génocide rwandais sur lequel il a eu l’occasion de travailler.

La partie civile questionne Romuald Peruggia : 

Interrogé sur les actes d’enquêtes réalisés au Rwanda, où il s’est rendu à 27 reprises, l’adjudant-chef Peruggia a confirmé que les investigations portant sur des faits anciens consistaient principalement en des recoupements, des auditions de témoins et des remises en situation, à défaut d’investigations scientifiques. Il a confirmé par ailleurs que les difficultés liées à l’ancienneté des crimes commis ne l’avaient pas empêché de mener convenablement son enquête que ce soit au Rwanda ou au Libéria.

Questionné sur la réaction des villageois lors de la remise en situation concernant les faits commis au préjudice de DN, il a indiqué avoir ressenti de la curiosité de leur part et aucune agressivité.

L’avocate de la partie civile a finalement évoqué l’incident survenu au Libéria avec l’avocate de la défense et son chauffeur, qui ont été surpris en train de prendre des photos et des vidéos des remises en situation. L’adjudant-chef Peruggia a précisé que le chauffeur était visiblement un membre de la LIMAF, mais que l’OLCH n’était pas compétent pour mener des investigations à son égard. Les avocates générales ont alors donné des explications à la Cour sur la procédure, qui a été soumise au Parquet de Rouen. Aucune suite n’a été donnée faute de domiciliation de l’intéressé en France.

Le Ministère public questionne Romuald Peruggia :

L’adjudant-chef Peruggia a souligné l’important travail de documentation qui doit être réalisé en amont par les enquêteurs de l’OCLCH pour comprendre le contexte dans lequel les crimes ont été commis. Il a réexpliqué les difficultés auxquelles sont confrontés les enquêteurs qui mènent des investigations à l’étranger, en insistant notamment sur les moyens techniques très limités et sur le cadre imposé par la commission rogatoire internationale.

L’adjudant-chef Peruggia a confirmé que dans les dossiers de crimes anciens, la preuve est uniquement testimoniale. Il a donc souligné l’importance d’obtenir des témoignages de personnes non citées par les parties pour démêler le vrai du faux. Selon lui, les remises en situation permettent également de vérifier la véracité des déclarations recueillies.

Questionné sur les auditions de témoins et de parties civiles effectuées en France, il a indiqué que chaque personne interrogée a réagi de manière différente et qu’il n’avait pas relevé d’exagération dans leur discours. Il n’a pas eu le sentiment que les récits avaient été appris par cœur et a souligné qu’il pouvait y avoir certaines divergences entre les déclarations, ce qui s’explique par le fait que les faits remontent à plus de 30 ans. Il a par ailleurs confirmé que le traumatisme de la guerre pouvait avoir un impact sur la mémoire.

Interrogé sur les remises en situation au Libéria, il a indiqué qu’elles avaient permis de confirmer les témoignages recueillis et que certaines constatations avaient dû être faites en des lieux qui n’étaient plus les mêmes qu’il y a 30 ans, ce qui a une influence sur le rapport des témoins avec l’espace-temps.

Questionné sur les auditions de témoins et de parties civiles effectuées au Libéria, il a précisé que les autorités locales s’en étaient chargées et que chaque personne avait été entendue séparément. Pour finir, il a brièvement commenté une planche photographique représentant les armes utilisées par l’ULIMO.

La défense questionne Romuald Peruggia :

Interrogé sur l’absence de tapissage lors des auditions de témoins, l’adjudant-chef Peruggia a d’abord admis qu’il s’agissait d’une erreur. Il a précisé avoir exigé que la planche photo soit présentée à EN lors de son audition. Cela n’a en revanche pas été exigé à l’égard de tous les témoins, notamment un témoin âgé de dix ans à l’époque des faits qui avait indiqué ne pas pouvoir identifier Kunti Kamara. Interrogé sur l’absence de tapissage lors des auditions de témoins, l’adjudant-chef Peruggia a d’abord admis qu’il s’agissait d’une erreur. Il a précisé avoir exigé que la planche photo soit présentée à EN lors de son audition. Cela n’a en revanche pas été exigé à l’égard de tous les témoins, notamment un témoin âgé de dix ans à l’époque des faits qui avait indiqué ne pas pouvoir identifier Kunti Kamara.

Questionné sur la force probante des témoignages, l’adjudant-chef Peruggia a réaffirmé que les divergences entre les déclarations et l’absence d’exagération des témoins tendaient à démontrer que les récits n’étaient pas téléguidés. Il a précisé que les témoignages servaient à éclairer le juge et qu’il était difficile de recueillir d’autres preuves que la preuve testimoniale dans ce dossier.

La défense a ensuite interrogé l’adjudant-chef Peruggia sur les remises en situation et les investigations menées au Libéria. La défense a relevé qu’aucune enquête n’avait été menée pour déterminer le moment de la disparition du générateur, en sachant que la règle « pay yourself » prévalait également sous l’occupation du NPFL. Le lieu où se trouverait la dépouille de DN selon les déclarations des témoins n’a pas non plus été fouillé, alors même que la découverte du cadavre aurait pu faire avancer l’enquête. Vu la gravité des charges qui pèsent contre Kunti Kamara, la défense s’est étonnée avec véhémence de la manière dont l’enquête a été menée par les autorités françaises. L’adjudant-chef Peruggia s’est justifié en affirmant que de tels actes d’enquête n’avaient pas été requis par le juge d’instruction dans le cadre de la commission rogatoire internationale et qu’il n’était dès lors pas en son pouvoir de les exécuter.

Laisser un commentaire