[10/18/2022] Jour 7 : le meurtre d'une femme

Le Président a indiqué que deux témoins allaient être entendus au sujet des faits commis à Foya Dundu en 1993 au préjudice de KT, FP puis FG, le frère de KT. Un des témoins cités, KT, étant décédé, le Président a précisé qu’il procéderait à la lecture de son témoignage. Quant à NS, il est toujours hospitalisé. 

Audition de FP en qualité de témoin cité par le Ministère public

FP a indiqué qu’il était agriculteur à Foya Dundu et qu’il habitait dans le même quartier que la victime KT pendant la guerre civile. FP a indiqué qu’il était agriculteur à Foya Dundu et qu’il habitait dans le même quartier que la victime KT pendant la guerre civile.

Il a expliqué que l’enfant de KT était décédé et que Kunti Kamara était arrivé par Foya Tenga. Lorsqu’il a appris le décès de l’enfant, il a donné de l’argent à la famille, puis est allé à Foya. FP a indiqué qu’il y avait des militaires chez lui, qui parlaient un dialecte mandingue qu’il ne comprenait pas.

Il a expliqué que Kunti Kamara avait demandé à ses hommes de faire sortir KT de la maison où elle se trouvait et de l’amener dehors. Kunti Kamara a alors tiré sur KT. FP a indiqué que lui-même et d’autres villageois ont creusé une tombe, dans laquelle les soldats ont mis le corps de KT avant de le brûler. Ils ont utilisé les feuilles de palmier qui couvraient le toit d’une cuisine située à proximité.

La Cour questionne FP :

Compte tenu des difficultés d’interprétation, le Président a jugé nécessaire de reprendre le récit de FP.

Sur question, FP a indiqué que sa maison ne se trouvait pas à proximité de celle de FG. Invité à se déterminer sur ses déclarations devant le juge d’instruction selon lesquelles les soldats de l’ULIMO occupaient les lieux, FP a les a confirmées.

Questionné sur Kunti Kamara, FP a indiqué que ce dernier était basé à Foya et qu’il se déplaçait partout, parfois jusqu’à la frontière. FP a confirmé l’avoir souvent vu à Foya Dundu et l’a formellement reconnu et identifié dans le box des accusés. Sur question, FP a indiqué que Kunti Kamara était entouré d’un nombre variable de gardes du corps à l’époque des faits.

Interrogé au sujet de KT et de son enfant, FP a indiqué que KT était malade depuis longtemps et qu’elle ne pouvait plus marcher. Il a confirmé qu’elle était hébergée par son frère FG et que son enfant était mort d’une maladie. Ils l’ont enterré et les gens sont arrivés. Questionné au sujet de l’argent versé par Kunti Kamara que le Président a qualifié de geste d’apaisement et de condoléances, FP a précisé que Kunti Kamara avait versé la somme au chef du village TK. Il a par ailleurs confirmé que Kunti Kamara avait ensuite quitté les lieux pour ensuite revenir à Foya Dundu. FP a indiqué qu’il ignorait la raison pour laquelle Kunti Kamara était revenu chez FG.

Confronté à ses précédentes déclarations selon lesquelles Kunti Kamara était furieux car il avait appris que KT était une sorcière, FP a déclaré ne pas se souvenir comment Kunti Kamara avait appris cela. FP a ensuite confirmé que Kunti Kamara se trouvait devant la maison de FG avec ses hommes et leur a ordonné de faire sortir KT. FP a précisé que KT avait été traînée dehors et qu’elle était incapable de parler.

Questionné au sujet de la mise à mort de KT, FP a indiqué que Kunti Kamara portait un G3 et avait tiré à trois reprises sur KT qui se trouvait juste à côté de la maison de FG. Sur question, il a déclaré qu’il ignorait si les coups de feu avaient été tirés de façon individuelles ou en rafale. Il a confirmé que Kunti Kamara avait donné l’ordre aux villageois d’enterrer KT et déclaré qu’il ignorait la raison pour laquelle la dépouille avait été incinérée.

Sur question, FP a indiqué que le mari de KT, NS, ainsi que FG et TK étaient également présents lors de l’exécution de KT et que de nombreux villageois s’étaient déplacés pour assister à l’enterrement de l’enfant. Selon FP, le meurtre de KT a eu lieu entre 9h et 10h du matin, peu après l’enterrement de l’enfant. Sur question, il a précisé que les villageois qui ont assisté au meurtre de KT se trouvaient sur place, car ils étaient venus pour l’enterrement de l’enfant.

Interrogé au sujet de l’endroit où les personnes décédées étaient en principe enterrées, il a précisé qu’à l’époque, il était possible d’enterrer les corps n’importe où, mais qu’aujourd’hui, cela n’était plus possible en raison de l’installation de l’eau courante. 

Sur question, il a déclaré qu’il ignorait de quelle maladie KT était atteinte.

La partie civile questionne FP :

Sur question, FP a confirmé que l’ULIMO s’était approprié sa maison sans son accord et que celle-ci leur servait de base. Il a ajouté que les villageois n’avaient aucun contrôle sur quoi que ce soit à l’époque à cause de la guerre.

Interrogé sur l’identité des soldats qui occupaient sa maison, FP a cité les noms de Mohamed Kamara, Mohamed Jah, Mohamed Saho, et Jerry P. Sur question, il a répété que Kunti Kamara se déplaçait partout et venait fréquemment à Foya Dundu. Questionné sur les liens entre Kunti Kamara et Mohamed Saho, il a indiqué que ce dernier était assigné en tant que commandant à Foya Dundu.

Réinterrogé sur l’exécution de KT, FP a déclaré avoir perçu un bruit de fusil lorsque Kunti Kamara a tiré sur cette dernière et qu’il avait entendu des tirs individuels. Selon lui, KT n’a rien dit lorsqu’elle était au sol. Il a expliqué à nouveau qu’il avait estimé que l’évènement s’était produit vers 9h ou 10h du matin, mais qu’il n’avait pas de montre. Sur question, FP a déclaré qu’il n’avait pas vu si KT portait des vêtements quand elle a été tuée.

Le Ministère public questionne FP :

L’avocate générale a commencé par interroger FP sur le temps écoulé entre l’enterrement de l’enfant et le retour de Kunti Kamara. FP a répondu que le bébé avait été enterré le matin. Il a précisé que selon leur tradition, lorsqu’un enfant meurt, il est enterré immédiatement et que peu de temps s’était écoulé entre l’enterrement de l’enfant et le retour de Kundi.

Il a ensuite expliqué qu’ils avaient enterré le bébé et que Kunti Kamara était arrivé pour sympathiser. FP a ajouté qu’il n’avait pas compris la discussion entre Kunti Kamara et ses hommes puisqu’il ne parlait pas leur dialecte.

Interrogé sur ses déclarations devant le juge d’instruction selon lesquelles il avait indiqué que le meurtre avait eu lieu dans l’après-midi, FP a expliqué qu’il avait dit entre dix et onze heure car il n’avait pas l’heure sur lui.

L’avocate générale a ensuite demandé à FP si Kunti Kamara était revenu en voiture et FP a répondu qu’il était revenu en marchant par un sentier. Questionné sur le nombre d’hommes qui accompagnait Kunti Kamara, FP a répondu qu’ils étaient plusieurs et a souligné que les événements remontaient à longtemps. 

Sur question, FP a indiqué que les personnes dont il avait cité les noms précédemment (i.e. Mohamed Kamara, Mohamed Jah, Mohamed Saho, et Jerry P.) avaient tiré KT hors de sa maison. Confronté à ses déclarations selon lesquelles Kunti Kamara avait ordonné à ses hommes d’aller chercher KT, mais qu’il y était finalement allé lui-même car ses soldats lui avaient dit qu’elle allait de toute façon mourir vu l’état dans lequel elle se trouvait, FP les a réfutées et maintenu que KK n’était pas entré dans la maison et avait envoyé ses hommes.

Sur question, FP a indiqué que la tombe avait été creusée par les gens du village sur ordre de Kunti Kamara. Il a par ailleurs confirmé que les feuilles de palmier déposées sur le corps avaient été ramassées sur le toit de la cuisine qui se trouvait à proximité.

Interrogé sur l’âge de KT au moment de son décès, FP a répondu qu’il ne s’en rappelait pas mais que c’était une femme assez mature puisqu’elle avait déjà eu quatre enfants. Le Président est intervenu en indiquant que FP avait dit qu’elle avait 45 ans.

Sur demande de l’avocate générale, une photo d’un fusil G3 a été présentée à FP. Sur question, il a indiqué reconnaître l’arme et précisé connaître la différence entre un G3 et une AK47. Il a par ailleurs confirmé que le jour de l’exécution de KT, Kunti Kamara était le chef des soldats qui l’accompagnaient puisqu’il avait donné les ordres. Sur question, il a indiqué que la population n’avait aucun moyen de s’opposer à ce qui se passait car l’ULIMO contrôlait tout. Il a ajouté qu’on lui avait tiré dessus.

Sur question, FP a confirmé qu’il habitait toujours à Foya Dundu. Invité à se déterminer sur sa déclaration à teneur de laquelle l’ULIMO avait pris sa maison parce qu’il était Malinké, FP a confirmé et a précisé que les Malinkés était une ethnie différente des Kissis et des Mandingues. Sur question, FP a expliqué que les villageois devaient travailler pour nourrir les soldats qui se trouvaient dans le district. Il a précisé que les femmes devaient faire de même.

Interrogé au sujet de la CVR, il a indiqué avoir été interrogé par la Commission. Questionné sur ses motivations à venir témoigner devant les juridictions françaises, en particulier s’il était venu pour se venger ou obtenir de l’argent, FP a répondu par la négative.

Sur question, FP a indiqué qu’il n’avait jamais pris les armes puisque son père avait été tué durant la guerre.

La défense questionne FP :

L’avocate de la défense s’est étonnée que FP ait reconnu Kunti Kamara dans le box des accusés, alors qu’il n’avait pas été capable de le reconnaître sur la planche photographique qui lui avait été présentée lors de son audition par le juge d’instruction. Elle a précisé que la photographie présentée à FP était une photographie actuelle de Kunti Kamara et que ce dernier n’avait pas changé depuis.

FP a répondu qu’il se souvenait très bien de Kunti Kamara et l’avait connu à Foya. Selon FP, aucune planche photographique ne lui a été présentée lors de son audition. L’avocate de la défense s’est alors référée au procès-verbal d’audition à teneur duquel FP a déclaré qu’il ne reconnaissait personne lorsque le juge d’instruction lui a présenté la planche photographique. FP a rétorqué que cela s’était passé il y a longtemps et que Kunti Kamara avait les mêmes traits à l’époque des faits.

Sur question, FP a indiqué qu’il avait vu Kunti Kamara pour la première fois en 1993 avec un groupe de soldats. Interrogé sur la façon dont il l’avait identifié comme étant CO Kundi, FP a répondu que c’était le nom par lequel les gens l’appelaient.

L’avocate de la défense a ensuite demandé à FP s’il avait personnellement vu revenir Kunti Kamara au village après qu’il a donné de l’argent au chef du village pour le décès du bébé. FP a précisé que Kunti Kamara n’avait pas quitté la ville de Foya Dundu et que la maison de KT se trouvait juste en bas. Selon FP, Kunti Kamara a quitté la maison de KT, est venu dans sa maison [i.e. la maison de FP] où les soldats étaient rassemblés, puis est retourné chez KT.

Interrogé sur le mobile du meurtre de KT, FP a répondu que selon lui, la seule explication était que Kunti Kamara considérait que KT était une sorcière, sinon il ne l’aurait pas tuée. Sur question, FP a indiqué que Kunti Kamara n’avait pas adressé la parole à KT avant de la tuer.

Invité à indiquer l’endroit précis où il se trouvait au moment où KT a été sortie de sa maison, FP a déclaré qu’il était dans un groupe et a désigné un emplacement dans la salle, à environ cinq mètres de lui. Sur question, il a confirmé qu’il se trouvait face à la porte. Questionné sur la distance le séparant de Kunti Kamara lorsque ce dernier a ouvert le feu sur KT, FP a déclaré qu’il était assis derrière la maison avec les autres gens, à proximité directe de la scène.

Confronté à ses déclarations devant le juge d’instruction selon lesquelles KT aurait supplié Kunti Kamara de l’épargner, FP a répondu que KT était malade et que Kunti Kamara ne lui a pas adressé la parole, mais uniquement ordonné à ses hommes de la tuer. L’avocate de la défense s’est étonnée de cette réponse puisque FP aurait déclaré devant le juge d’instruction que Kunti Kamara avait traité KT de sorcière et lui avait dit qu’il allait la tuer. FP a répété que Kunti Kamara avait seulement ordonné à ses hommes de sortir KT de la maison et que Mohammed Jah avait dit à Kunti Kamara qu’elle n’allait de toute façon pas survivre.

Invité à donner une description de KT, FP a déclaré qu’elle était mince et petite. Il a précisé que sa maladie l’avait rendue encore plus menue. Il n’a en revanche pas été en mesure de décrire les cheveux de KT.

L’avocate des parties civiles a posé une dernière question à FP et lui a demandé de décrire son état d’esprit lors des évènements et notamment s’il avait peur. FP a répondu que les civils n’avaient pas le contrôle.

* * *

Dans la mesure où TK est décédé, le Président a donné lecture de ses témoignages.

Lecture par le Président de certains passages des notes de l’entretien du 28 avril 2018 entre TK et les enquêteurs de Civitas Maxima

Pour commencer, TK a indiqué aux enquêteurs qu’il devait avoir 85 ans mais qu’il n’en était pas sûr puisqu’il n’y avait pas de registre d’état civil à cette époque. Il a ensuite expliqué qu’il était chef de secteur lors de l’arrivée des ULIMO et qu’il se trouvait à Foya Dundu. En tant que chef de secteur, il avait été informé de l’attaque de Foya puisque cette information circulait dans les 7 villages qui étaient sous son contrôle.

TK a notamment relaté la mort de KT, qu’il a qualifiée de tuerie en précisant que Kundi en était responsable. TK a raconté qu’une jeune fille de sa ville nommée KT était mariée à NS et était malade. Elle a été malade longtemps et l’est restée jusqu’à la mort du bébé. Lors du décès du bébé, il avait été appelé en tant que chef et a vu CO Kundi. Il a expliqué que lorsque Kundi venait à Foya Dundu, il séjournait chez lui et a déclaré que “même lorsque des gens font des mauvaises choses, lorsqu’ils font le bien, on n’en a pas toujours connaissance”. Interrogé par les enquêteurs sur cette phrase, TK a précisé que Kundi Kamara ne lui faisait pas de mal et faisait en sorte que ses soldats ne lui fassent pas de mal non plus.

TK a ensuite expliqué que CO Kundi était arrivé avec un groupe de soldats sous ses ordres et lui avait demandé s'il savait que KT s’adonnait à la sorcellerie. Interrogé par les enquêteurs, il a affirmé ne pas avoir vu Kundi donner de l’argent pour l’enfant mort.

Ensuite, TK a expliqué qu’il était assis à l’extérieur de la maison de KT et que Kundi avait dit qu’il ne voulait pas voir de sorcellerie en ville parce que ses soldats mourraient. Il a attrapé KT, lui a tiré dessus et lui a explosé la tête. TK a précisé que CO Kundi avait lui-même tiré la femme hors de la maison et l’avait emmenée derrière. Il a précisé qu’elle était malade et peinait à parler distinctement, mais qu’elle pleurait et suppliait qu’on ne la tue pas. Elle était allongée à terre et ne pouvait pas tenir debout.

TK a expliqué qu’après cela, Kundi Kamara lui avait tiré une balle dans la tête et demandé de trouver des hommes en ville pour creuser la tombe. TK s’était donc dépêché de trouver des hommes qui ont creusé la tombe rapidement sous la supervision de Kundi. Les hommes ont rapporté des feuilles de palme de la cuisine qu’ils ont déposées sur le corps avant de le brûler. Kundi aurait alors déclaré : « Si une personne est une sorcière et meurt, et que vous brûlez le corps, la sorcière meurt aussi et ne va nulle part ».

TK a également indiqué que l’arme utilisée par Kundi était une AK à longue crosse. Sur question des enquêteurs, il a précisé que certaines AK avaient une crosse courte et d’autres une crosse longue, et que certaines avaient deux magasins, d’autres trois. Il a répété que c’était Kundi qui avait fait sortir la femme de la maison et qu’il était lui-même derrière la maison et avait entendu les coups de feu et assisté à la scène. Il a en outre indiqué se souvenir de deux détonations.

Concernant l’identification de Kunti Kamara, TK a indiqué que ce dernier se présentait comme commandant par rapport aux autres soldats. Il l’a décrit comme étant de petite taille. Selon TK, Kundi portait une tenue de camouflage avec un couvre-chef militaire le jour du meurtre de KT. Il a ajouté que lorsque Kundi allait au combat, il portait un RPG.

L’avocate des parties civiles a sollicité la lecture d’autres passages du témoignage de TK, à teneur desquels TK a indiqué aux enquêteurs que Kundi demandait de la viande pour se nourrir et ordonnait aux membres de la communauté d’aller chasser. Il a ajouté que les habitants redoutaient un châtiment sévère s'ils ne trouvaient pas d’animaux à chasser. TK a également relaté que Kundi les laissaient régulièrement au soleil pendant deux ou trois heures et que la population avait beaucoup souffert pendant trois mois. Interrogé par les enquêteurs, TK a confirmé que la maison de FP était utilisée par les soldats et que Kundi y dormait parfois. TK a également indiqué que le plus redouté était Ugly Boy et que les gens de l’ethnie Kissi l’appelaient Saah Chuey.

Les avocates générales ont ensuite précisé qu’un RPG était une sorte de lance-roquette et ont demandé à ce qu’une photo soit projetée.

Lecture par le Président de l’audition de TK devant la police libérienne en date du 30 avril 2019

Dans sa déposition volontaire, TK a déclaré que lorsque les soldats de l’ULIMO sont entrés dans Foya en 1993, il était le chef de quartier de Foya Dundu et Kunti Kamara a été le premier commandant de l’ULIMO posté dans le village. Après que Kunti Kamara a quitté Foya Dundu, un autre soldat répondant du nom de Mohamed l’a remplacé. Kunti venait lui rendre visite et dormait dans la maison où vivait Mohamed, laquelle appartenait à FP.

Sur les faits relatifs à KT, TK a déclaré qu’un soir, l’enfant de KT est décédé à Foya Dundu et que des gens s’étaient réunis pour le pleurer. Le dénommé Mohammed a demandé pourquoi les gens pleuraient et TK lui a répondu que l’enfant de KT était mort. Peu après, Kunti Kamara s’est rendu sur place pour s’informer à son tour de la situation. Il a alors ordonné à trois soldats de faire sortir KT de la maison et a dit que KT était une sorcière. Les soldats de l’ULIMO tenaient KT qui suppliait Kunti Kamara de l’épargner, mais Kunti ne l’a pas écoutée et lui a tiré une balle dans la tête.

TK a raconté que Kunti Kamara avait ensuite ordonné à des villageois de creuser une tombe et de la recouvrir de la chaume de feuilles de palmier séchées. Il a ensuite mis le feu aux feuillages et le corps a brûlé. Des civils ont alors recouvert le corps brûlé de terre.

En outre, TK a expliqué qu’à cette époque, les soldats forçaient les civils à aller chercher de la nourriture et à la porter sur leurs têtes. Les soldats ne partageaient pas toujours la nourriture avec les villageois, qui étaient parfois passés à tabac et dépossédés de leur nourriture.

Sur question, TK a indiqué avoir vu Kunti Kamara pour la première fois lorsque ce dernier a été affecté à Foya Dundu comme commandant des soldats de l’ULIMO. Il a précisé que Kunti avait vécu dans la maison d’un habitant dénommé FP pendant environ un mois, avant d’être remplacé par un certain C.O. Mohamed qui a vécu dans la même maison que C.O. Kundi.

Interrogé sur le nombre d’hommes que Kundi avait sous ses ordres, TK a répondu qu’il avait beaucoup d’hommes sous ses ordres à Foya Dundu, y compris des femmes et des enfants qui portaient des armes. Sur question, TK a indiqué qu’il ignorait si Kundi recevait des ordres, mais qu’à sa connaissance, certains chefs lui étaient supérieurs hiérarchiquement. TK a précisé avoir entendu parler notamment d’un certain Dagu, de C.O. Polo et de Ugly Boy. Sur question, il a indiqué qu’il ne connaissait pas les noms des hommes qui étaient sous les ordres de Kundi.

Interrogé sur la dernière fois qu’il avait vu Kundi, TK a indiqué que c’était le jour du meurtre de KT et que Kundi n’était pas revenu à Foya Dundu après cet évènement. C’était la seule fois où TK avait vu Kunti Kamara tuer quelqu’un. Il a ajouté que d’autres meurtres avaient été commis à Foya Dundu, mais qu’il ignorait si Kundi en était le commanditaire. La seule chose qu’il savait, c’était que ces meurtres avaient été commis par les soldats de l’ULIMO.

Sur question, TK a indiqué que lors du séjour de Kundi à Foya Dundu, il ne l’avait vu tuer personne hormis KT. Interrogé sur le comportement de Kundi à l’égard des villageois, TK a indiqué que ce dernier demandait aux villageois de lui apporter de la nourriture et de l’eau. Il lui arrivait de plaisanter, mais il était imprévisible et pouvait changer à tout moment. Sur question, TK a indiqué qu’il n’avait jamais entendu dire que Kunti Kamara avait forcé une femme à avoir des relations avec lui et a affirmé que les femmes allaient d’elles-mêmes le voir pour lui demander de l’argent et d’autres objets de valeur. TK a indiqué qu’il en allait de même en ce qui concerne les soldats de Kundi, à tout le moins dans le village de Foya Dundu.

Invité à donner une description de Kundi, TK l’a décrit comme un homme mince et pas très grand. Il a déclaré qu’il avait un problème à l'œil et qu’il portait un uniforme militaire de camouflage. TK a indiqué qu’il n’avait jamais vu Kundi porter des vêtements de femme, du maquillage ou une perruque. TK a poursuivi en affirmant qu’à l’époque, Kunti Kamara avait toujours les cheveux coupés courts. Questionné sur les armes que portait Kundi à l’époque, TK a déclaré avoir vu Kundi porter un fusil d’assaut AK47, et parfois un gros fusil doté d’une baïonnette.

Une planche photographique a été présentée à TK, mais il s’est dit incapable de reconnaître Kunti Kamara, car les faits remontaient à très longtemps et l’apparence de Kundi à l’époque n’était pas la même qu’aujourd’hui.

Interrogé sur la raison pour laquelle KT a été accusée d’être une sorcière, TK a déclaré qu’il ignorait si quelqu’un l’avait dit à Kundi. Il a seulement entendu Kundi le dire lui-même. Sur question, il a indiqué que sur ordre de Kundi, trois de ses gardes du corps sont entrés dans la maison de KT et deux d’entre eux l’ont fait sortir en la traînant. Celle-ci pleurait et suppliait Kundi de ne pas la tuer après avoir été emmenée derrière la maison où ils l’ont fait asseoir par terre. Deux des gardes du corps lui tenaient les mains et Kundi lui a tiré une fois dans la tête sans dire un mot.

TK a tenu à préciser que Kundi, Ugly Boy et d’autres commandants étaient selon lui des hommes mauvais, mais que Kundi ne lui avait jamais fait de mal. Il a ajouté que de manière générale, Ugly Boy était pire que Kundi. Sur question, il a indiqué qu’il ignorait lequel des deux était le plus haut gradé et que Kundi parlait le mandingue.

* * *

Le Président a décidé de projeter les planches photographiques qui avaient été présentées à TK lors de son audition. L’avocate de la défense a rappelé que TK n’avait pas été en mesure d’identifier Kunti Kamara et le Président a souligné que l’identification n’était pas évidente [compte tenu de la mauvaise qualité des clichés].

Audition de FG en tant que partie civile

Avant de donner la parole à FG, le frère de KT, le Président a rappelé que ce dernier a été entendu à plusieurs reprises et confronté à Kunti Kamara, TK et NS.

FG a commencé par remercier la Cour de lui permettre de s’exprimer et de s’être saisie du décès de sa sœur.

Il a raconté que le lendemain du décès du fils de KT, le chef du village TK est venu pour procéder à l’enterrement de l’enfant. Kundi est arrivé sur les lieux et s’est rendu à la maison de FG. Il a demandé ce qui se passait et on lui a expliqué que le fils de KT était décédé. Il a donné la somme de 100 dollars libériens pour les funérailles, puis est reparti vers Foya. FG a déclaré que de nombreux villageois étaient présents.

Selon FG, Kundi est revenu peu après, accompagné de 5 gardes du corps, et leur a ordonné de faire sortir KT de la maison. Celle-ci a été allongée sur le sol à l’extérieur de la maison et Kundi a pointé son G3 sur elle. KT l’a supplié de ne pas la tuer. FG a déclaré que Kundi avait tué sa sœur, puis demandé à TK de creuser une tombe. Des personnes sont donc venues et ont creusé la tombe.

Selon FG, Kundi a ensuite déclaré : « Si je vois les membres de la famille de KT, je les tue tous ». FG s’est alors éloigné doucement et s’est caché derrière un bananier. Depuis sa cachette, FG pouvait toujours assister à la scène, sans que Kundi le voie. FG a raconté que Kundi avait ordonné que le corps de sa sœur soit placé dans la tombe et inhumé. Il a déclaré avec émotion que KT était son unique sœur et qu’elle n’avait rien fait à Kundi. Apparemment, quelqu’un avait dit à Kundi que KT était une sorcière et Kundi a porté un jugement selon ses propres critères puisqu’il avait le pouvoir. FG a indiqué que Kundi avait menacé de revenir le lendemain et d’exécuter tout le monde.

FG a raconté s’être enfui avec sa famille dans un autre village. Il a expliqué être revenu seul au village pour se recueillir sur la tombe de sa sœur et que des gens étaient venus le consoler. Des amis lui ont alors proposé leur aide pour construire une autre maison, car la sienne avait été saccagée par Kundi. FG a déclaré que Kundi était une personne très méchante qui avait détruit à sa famille. Il a expliqué que sa mère était morte de chagrin l’année du décès de KT. FG a déclaré qu’il n’avait plus sa sœur ni sa mère et que c’était Kundi qui les avaient tuées toutes les deux.

La Cour questionne FG :

Interrogé sur sa sœur, FG a indiqué qu’elle était plus jeune que lui et qu’elle avait eu seulement un enfant qui est décédé alors qu’il ne marchait pas encore. Il a indiqué qu’il ignorait l’âge de cette dernière à l’époque des faits, mais a confirmé qu’elle avait probablement la quarantaine. Il a par ailleurs confirmé qu’elle était mariée à NS selon un mariage traditionnel.

Questionné sur la maladie dont sa sœur était atteinte, FG a précisé qu’elle était malade depuis longtemps et avait reçu un traitement à l’hôpital. Elle avait des douleurs dans tout le corps et le traitement qu’elle prenait la soulageait un peu. Sur question, FG a indiqué que sa sœur et son mari NS vivaient sous son toit, de même que la femme et le fils de FG, ainsi que les soldats de l’ULIMO. FG a également confirmé que deux responsables du village, EP et TK, étaient venus à l’enterrement de l’enfant de sa sœur.

Le Président a ensuite demandé à FG s’il connaissait Kunti Kamara avant cet incident. FG a répondu qu’il le connaissait déjà et qu’il l’avait connu à Foya lorsqu’il faisait porter aux civils des charges sur la tête. Il a ajouté qu’avant d’arriver à Foya Dundu, Kundi avait passé deux mois à Foya et confirmé qu’il l’avait également vu à Foya Dundu.

Invité à identifier l’accusé dans le box, FG a confirmé qu’il reconnaissait Kunti Kamara. Il s’est adressé à lui en lui disant : « C’est toi qui as tué ma sœur ».

Le Président a alors rappelé la description donnée par FG lors de son audition par les gendarmes, à savoir quelqu’un de petit, cheveux rasés, avec une dent en moins et une tenue militaire de camouflage. Il a ajouté que c’était le seul chef qu’il connaissait et que tout le monde avait peur de lui. L’avocate de la défense a précisé que FG avait donné une description différente dans le cadre d’une autre audition, à savoir que Kunti Kamara avait les cheveux abondants et portait un tissu blanc sur la tête.

Interrogé sur la somme de 100 dollars libériens versée par Kunti Kamara à sa famille, FG a confirmé qu’il s’agissait d’un geste de condoléance traditionnel. Il a par ailleurs confirmé que Kunti n’avait pas assisté à l’enterrement, mais était revenu à la maison de FG en prétendant qu’on lui avait dit que KT était une sorcière. Selon FG, Kunti a prononcé le terme de sorcière avant d’ordonner à ses hommes de sortir KT de la maison. Il a indiqué que sa sœur suppliait Kunti de ne pas la tuer, mais ce dernier l’a tuée derrière la maison. Il a précisé que Kunti avait vidé son chargeur sur sa sœur par une rafale de coups de feu.

Questionné sur la distance à laquelle il se trouvait, FG a indiqué qu’il se trouvait à l’écart, mais suffisamment près pour assister à toute la scène. Il a confirmé avoir assisté de loin à l’enterrement de sa sœur. Interrogé sur l’inhumation du corps de sa sœur, FG a déclaré qu’il n’était pas d’usage de brûler les corps et que Kunti avait ordonné de mettre feu au corps de sa sœur car il l’accusait d’être une sorcière.

Sur question, FG a confirmé que les menaces de mort proférées par Kunti à l’égard de toute la famille de KT s’expliquaient a priori par le fait que Kunti estimait qu’ils pratiquaient tous la sorcellerie. Il a par ailleurs confirmé que tout le monde avait peur de C.O. Kundi.

Interrogé au sujet de la maison photographiée lors de la remise en situation, FG a indiqué qu’il s’agissait d’une nouvelle maison reconstruite par ses soins, étant donné que l’ancienne maison avait été détruite. Sur question, il a déclaré que c’était la première fois qu’une personne avait été accusée de sorcellerie et que Kunti en était l’initiateur.

La partie civile questionne FG :

Interrogé sur sa première rencontre avec Kundi, FG a indiqué qu’elle avait eu lieu sur la piste d’atterrissage à Foya.

Questionné sur la description physique qu’il a donnée de Kundi, en particulier sur sa dentition, FG a réaffirmé que selon lui, il lui manquait une dent au milieu de la mâchoire supérieure.

Sur question, il a confirmé que les soldats de l’ULIMO occupaient Foya Dundu au moment des faits. Il a par ailleurs confirmé s’être enfui dans un autre village après les faits et a expliqué qu’à son retour à Foya Dundu, les soldats ULIMO avaient quitté le village.

Invité à s’adresser à Kunti Kamara, FG a déclaré qu’il était heureux que la Cour se soit saisie de cette affaire et a demandé au gouvernement français de prendre en charge la situation afin d’éviter qu’il soit tué dans le cas où Kundi reviendrait au Libéria. 

Le Ministère public questionne FG :

Réinterrogé sur l’état de santé de sa sœur, FG a déclaré qu’elle était très malade, mais était apte à marcher.

Questionné sur la chronologie de l’incident, FG a expliqué qu’il s’était écoulé moins d’une heure entre le premier départ de Kundi et son retour dans la maison de FG et que les faits s’étaient déroulés dans la matinée. Sur question, il a confirmé qu’il n’était pas caché lorsque Kundi a tiré sur sa sœur.

Invité à désigner l’arme utilisée par Kundi, FG a pointé un G3 sur la planche photographique présentée par les avocates générales. Sur question, il a expliqué que personne n’avait essayé d’empêcher Kundi de tuer KT, car il était armé, et que de nombreux villageois étaient présents lors du meurtre de sa sœur, y compris NS et FP.

Interrogé sur l’enterrement de sa sœur, il précisé que Kundi avait ordonné à TK et EP de trouver des hommes pour creuser la tombe. Sur question, il a indiqué que Kundi s’était déplacé à pied ce jour-là.

Invité à confirmer ses déclarations devant le juge d’instruction concernant sa première rencontre avec Kundi, qui avait eu lieu deux mois avant les faits, à Foya, lors d’une réunion organisée par les commandants de l’ULIMO durant laquelle ils auraient affirmé vouloir aider la population, FG les a confirmées. Sur question, il a indiqué que le seul commandant qu’il connaissait était Kundi. Il a par ailleurs confirmé que l’ULIMO réquisitionnait les maisons des civils et que les soldats s’installaient dans sa maison lorsqu’ils venaient à Foya Dundu. Il a également indiqué ne pas avoir le souvenir de la présence d’autres groupes armés avant l’arrivée de ULIMO.

Interrogé sur le travail forcé, FG a confirmé avoir été contraint, sous menace de mort, de porter des charges tous les jours jusqu’à la frontière, jusqu’au jour il a décidé de se cacher dans la brousse.

Sur question, FG a déclaré ne pas avoir connaissance d’autres crimes commis par Kundi et a précisé que la majorité de la population de Foya Dundu était Kissi, y compris sa famille.

La défense questionne FG :

Questionné sur la manière dont il a été contacté pour témoigner contre Kunti Kamara, FG a expliqué que des enquêteurs français et libériens étaient venus à sa rencontre et lui ont proposé de prendre sa déposition. Interrogé sur les questions que lui ont posées les enquêteurs, il a répondu qu’on lui a demandé s’il connaissait Kunti Kamara et s’il pouvait raconter ce qu’il avait fait à sa sœur. L’avocate des parties civiles est intervenue et a déclaré que selon elle, FG confondait avec les auditions devant les enquêteurs français et libériens. L’avocate de la défense a alors précisé que deux enquêteurs de Civitas Maxima étaient venus discuter avec FG à Monrovia en avril 2018. Sur question, FG a répété que ces personnes lui avaient demandé des renseignements concernant Kunti Kamara, ainsi qu’au sujet du meurtre sa sœur.

FG a ensuite confirmé que la première fois qu’il a dû identifier Kunti Kamara, c’était lors de sa confrontation avec ce dernier dans le bureau du juge d’instruction. Confronté aux diverses descriptions capillaires qu’il a données de l’accusé, dont l’avocate de la défense a relevé les contradictions, FG a indiqué que Kundi avait un grand volume de cheveux sur le dessus de la tête et portait une casquette.

Sur question, FG a indiqué qu’il s’était caché avant que Kundi ait tiré sur sa sœur. Questionné sur le mobile du meurtre, il a déclaré avoir entendu Kundi dire à quelqu'un que KT pratiquait la sorcellerie. Il a par ailleurs confirmé ses déclarations devant le juge d’instruction selon lesquelles Kundi avait quitté le village après avoir donné 100 dollars libériens, s’était dirigé vers une rivière puis avait fait demi-tour, le tout en moins d’une heure. Sur question, il a déclaré que Kundi était resté à proximité de la tombe jusqu’à ce que le feu se termine. Il a confirmé que le feu avait consumé tout le corps et répété qu’il n’y avait pas de soldats à Foya Dundu avant l’arrivée de l’ULIMO. Sur question, il a déclaré ne pas connaître le NPFL.

Réinterrogé sur la façon dont il a été approché par les enquêteurs, FG a indiqué qu’ils lui avaient demandé s’il connaissait Kunti Kamara et qu’ils avaient interrogé de nombreuses personnes. L’avocat de la défense s’est étonné que les enquêteurs de Civitas Maxima/GJRP soient venus parler spécifiquement à FG au sujet de Kunti Kamara. L’avocate des parties civiles est intervenue pour rappeler l’existence d’un procès-verbal de l’entretien avec FG relatant la manière dont FG a rencontré les enquêteurs.

Présentation de documents et pièces tirés du dossier. Remise en situation de FG.

Diverses photographies concernant la remise en situation de FG sur les lieux où sa sœur a été exécutée ont été projetées et FG a été sollicité pour les commenter.

Les premières photographies projetées sont des vues aériennes de Foya Dundu. Interrogé sur la photo où il pointe le pont où Kunti Kamara aurait fait demi-tour, FG a indiqué que des gens lui avaient rapporté qu’ils avaient vu Kundi faire demi-tour à la rivière. Concernant les photos de sa maison, FG a confirmé qu’il avait reconstruit une nouvelle maison sur l’emplacement de l’ancienne.

Les photographies suivantes illustrent notamment le chemin par lequel Kunti Kamara serait arrivé avec ses cinq gardes du corps, l’emplacement où se trouvait FG lorsqu’il aurait assisté à la mort de sa sœur, l’emplacement où sa sœur aurait été tuée, le lieu où se serait trouvé Kunti Kamara lorsqu’il l’aurait tué, l’endroit où FG se serait caché et l’emplacement du lieu d’inhumation de KT.

Le Président a précisé que selon sa compréhension, FG se trouvait à 9,6m de Kunti Kamara qui se trouvait lui-même à 3,60m de KT lorsqu’il lui a tiré dessus. Concernant la bananeraie dans laquelle FG se serait caché, les avocates générales ont relevé que celle-ci se trouvait à 34m de l’endroit où KT a été inhumée.

Interrogé sur les différentes photographies projetées, FG a déclaré qu’elles représentaient les faits tels qu’ils s’étaient déroulés.

Sur question de l’avocat de la défense, FG a indiqué que les enquêteurs ne lui avaient pas proposé de faire des analyses sur le corps de sa sœur et de son neveu. A la question de savoir si les enquêteurs avaient recherché des douilles, FG a répondu que la tête de sa sœur avait explosé.

Les avocates générales ont fait remarquer à la Cour que la distance entre Foya Dundu et Foya était d’environ 5km.

Présentation de documents et pièces tirés du dossier. Remise en situation de TK.

Le Président a poursuivi la présentation de photographies prises cette fois-ci en lien avec la remise en situation de TK [l’ancien chef du village de Foya Dundu, aujourd’hui décédé].

Ces photographies présentent successivement l’endroit où Kundi serait arrivé avec ses gardes du corps, l’endroit où TK se serait trouvé lorsque Kundi aurait tiré sur KT, ainsi que l’emplacement où il se serait trouvé lorsque le corps de KT a été brûlé.

L’avocate de la défense a observé que TK avait indiqué un lieu différent de celui indiqué par FG concernant le meurtre de KT. L’avocate des parties civiles a rétorqué que TK pensait que la maison actuelle était la maison de l’époque et le Président a précisé qu’un ruban avait été placé par les policiers à la demande de FG pour délimiter la maison de l’époque et que TK s’était finalement rétracté. Le Président a ajouté que NS et FG s’accordaient sur un certain nombre d’éléments et que TK disait qu’ils avaient peut-être raison.

Interrogatoire au fond de Kunti Kamara sur ces faits

La Cour interroge Kunti Kamara :

Le Président a rappelé que trois témoins avaient été entendus par la Cour au sujet du meurtre de KT et que seul NS devait encore être entendu. Il a invité l’accusé à se déterminer sur les témoignages entendus jusqu’à présent.

Kunti Kamara a répété à maintes reprises qu’il ne connaissait ni les témoins ni la victime. Sur question, il a indiqué qu’il n’avait jamais vu ni FP ni FG au Libéria. Il s’est dit choqué que FP prétende le connaître. Questionné sur les déclarations de FP selon lesquelles sa maison avait été réquisitionnée par l’ULIMO, Kunti Kamara a répété qu’il ne connaissait pas FP.

Sur question, il a déclaré être passé une fois par Foya Dundu, sans s’y être arrêté pour autant, et a indiqué que les 5km séparant Foya Dundu de Foya n’étaient pas une longue distance. Interrogé sur le dénommé Mohamed qui l’aurait remplacé à Foya Dundu, l’accusé a déclaré qu’il ne pouvait rien dire sur Foya Dundu et qu’il ne connaissait pas ces personnes.

Le Président lui a alors demandé comment il expliquait le fait que quatre personnes le reconnaissaient comme étant C.O. Kundi, le responsable de la mort de KT, et que les descriptions physiques données par ces personnes étaient concordantes. Kunti Kamara s’est dit confus et convaincu qu’il s’agissait d’un complot contre lui. Il a répété qu’il ne connaissait pas ces personnes.

Interrogé sur la déclaration de FG qui a indiqué qu’il lui manquait un dent à la mâchoire supérieure, Kunti Kamara a déclaré avoir perdu ses dents en Europe, et non au Libéria. Le Président a rappelé le témoignage du psychologue Philippe Oudy qui, au moment où il s’est entretenu avec l’accusé en avril 2019, a remarqué sa mâchoire largement édentée. L’avocate de la défense est intervenue en disant que les photos Facebook de l’accusé pouvaient attester qu’il avait toutes ses dents auparavant. Selon les avocates générales, ces photos laissaient surtout apparaître un écart entre les dents. Sur question du Président, Kunti Kamara a confirmé que ses problèmes dentaires étaient survenus pour la première fois lorsqu’il était en détention.

Sur question, il a indiqué que les personnes ayant prétendu le reconnaître comme auteur du meurtre de KT mentaient. Il a confirmé qu’il n’avait jamais vu KT de sa vie.

Interrogé sur le témoignage de TK, qui avait déclaré que Kundi ne lui voulait pas de mal et était plutôt aimable avec lui, l’accusé a déclaré qu’il était choqué car il ne le connaissait pas. Il a confirmé qu’il fallait comprendre ces témoignages comme une sorte de complot général contre lui.

Questionné sur les photographies des remises en situation, Kunti Kamara a juré qu’il ne connaissait pas ces endroits.

Interrogé sur les raisons qui l’ont poussé à fuir au moment de son interpellation alors qu’il se dit innocent et choqué, l’accusé a répondu que plusieurs personnes lui avaient rapporté des choses et qu’il ressentait de la pression sur lui.

La partie civile interroge Kunti Kamara :

L’avocate des parties civiles a confronté l’accusé à la description qu’il a donnée devant les juridictions suisses de sa tenue vestimentaire et des armes qu’il portait en soulignant qu’elle était corroborée celle donnée par FG et FP. Kunti Kamara a répondu qu’avant l’arrivée de l’ULIMO, il y avait d’autres soldats qui portaient les mêmes armes. L’avocate des parties civiles a rétorqué que FG avait pourtant affirmé n’avoir vu aucun militaire avant l’arrivée de l’ULIMO.

Le Ministère public interroge Kunti Kamara :

Les avocates générales sont revenues sur les déclarations de Kunti Kamara devant le juge d’instruction selon lesquelles FG et TK étaient des Kissis et savaient ce qu’ils faisaient. Compte tenu du fait que FP n’est pas Kissi, les avocates générales ont demandé à l’accusé d’expliquer pourquoi FP l’avait également mis en cause. Kunti Kamara a répondu qu’il ne le connaissait pas.

Les avocates générales ont ensuite demandé à l’accusé comment les témoins avaient pu donner des descriptions aussi précises et cohérentes si, comme il le prétend, elles ne le connaissaient pas. Kunti Kamara a répondu qu’il ne niait pas que l’ULIMO était à Foya et que lui était sur le champ de bataille, mais que tout le reste était faux.

Les avocates générales sont revenues sur le témoignage de Massa Washington et ont demandé à l’accusé s’il connaissait le Général Dombuyah. Kunti Kamara a répondu par l’affirmative et a précisé l’avoir vu dans le Lofa et qu’il était son supérieur, mais qu’il n’avait pas joué de rôle particulier dans sa carrière au sein de l’ULIMO. Les avocates générales ont alors confronté l’accusé à ses déclarations devant le juge d’instruction selon lesquelles le Général Dombuyah était le chef d’état-major et l’avait nommé commandant. Kunti Kamara a précisé que c’était Alieu Kosiah qui l’avait recommandé auprès du Général Dombuyah.

Interrogé sur les atrocités dont Massa Washington a été témoin et sur les menaces qu’elle a reçues, il a déclaré qu’il était dans le Lofa et qu’il n’avait pas connaissance des faits relatés par Massa Washington.

La défense interroge Kunti Kamara :

Sur question, Kunti Kamara a confirmé que pendant la guerre, les combattants portaient des AK47, des RPG et des tenues de camouflage. Il a précisé que les soldats de l’ULIMO portaient des tenues de camouflage, mais pas les soldats NPFL.

L’avocat de la défense lui a ensuite demandé s’il y avait d’autres soldats de petite taille au sein de l’ULIMO. Kunti Kamara a répondu par la négative, en précisant que peu de gens étaient petits.

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