[10/19/2022] Jour 8 : travail forcé
Avant d’entendre les témoins sur les faits commis entre Foya et Solomba en 1993, au préjudice de JTC et de SFC, le Président a demandé à JTC s’il avait des précisions à apporter au sujet du meurtre de KT.
JTC a d’abord précisé qu’il n’avait pas été témoin oculaire de la scène, mais que les événements lui avaient été rapportés. Il a indiqué que lorsqu’il est arrivé à Foya Dundu avec ses compagnons, ils ont été informés qu’une femme avait été tuée. Selon lui, les gens étaient très tristes. Alors qu’il essayait de comprendre ce qui s’était passé, il a entendu qu’un dénommé C.O. Kundi avait tué une certaine KT après l’avoir extraite de sa maison. Interrogé par le Président sur le mobile du meurtre, JTC a indiqué qu’il avait appris que KT avait perdu un enfant et que Kundi était venu sur les lieux. Kundi est ensuite parti, puis est revenu. C’était à son retour que Kundi avait entendu que KT était une sorcière et c’était a priori pour cette raison qu’il avait décidé de la tuer. JTC a ajouté qu’il était préoccupé par le fait qu’il devait apporter de la nourriture à sa mère et à d’autres membres de sa famille et avait convaincu ses compagnons de quitter les lieux.
La suite de l’audience a été consacrée aux faits commis en 1993 au préjudice de JTC et SFC. Le Président a invité JTC à s’exprimer sur les faits le concernant et a rappelé que ce dernier avait indiqué au juge d’instruction, ainsi qu’aux autorités suisses et néerlandaises, qu’il avait été contraint de transporter des marchandises dans un contexte de pillage.
Audition de JTC en tant que partie civile
JTC est revenu sur les diverses marches forcées qu’il a été contraint d’effectuer pendant la première guerre civile. Il a relaté que durant la seconde partie de l’année 1993, les villageois avaient été rassemblés près de la centrale électrique de Foya. Un dénommé EP avait été désigné comme représentant des civils et avait été sollicité par l’ULIMO pour fournir de la main-d'œuvre dans le but de transporter les équipements qui se trouvaient dans la centrale. Les soldats participaient également à ce travail de rassemblement des civils.
JTC a expliqué qu’à son arrivée sur place dans la matinée, il a remarqué un vieux véhicule sans moteur à proximité de la centrale. Un certain nombre de composantes de la centrale avaient été démontées et rassemblées, afin que les personnes réquisitionnées puissent les charger pièce par pièce à bord du camion dépourvu de moteur. JTC a précisé qu’il fallait également déplacer le générateur électrique qui alimentait toute la circonscription et que celui-ci était imposant et particulièrement lourd, ce qui avait rendu la tâche difficile. Pour faciliter son chargement dans le camion, le générateur a été déposé sur des rondins de bois et acheminé progressivement en direction du camion. Les civils sont ensuite parvenus à le soulever et à le mettre dans le camion. JTC a ajouté que pendant que certains portaient des objets, d’autres poussaient le camion pour avancer et que l’opération avait mobilisé un grand nombre de personnes. Il a raconté que l’expression « Till Go » marquait le début de la marche et signifiait que les marchandises devaient être transportées jusqu’à leur destination. Durant la marche, les soldats de l’ULIMO menaçaient les civils de mort en leur disant que s’ils voyaient une broussaille bouger, c’était la mort. En d’autres termes, si quelqu'un tentait de s’enfuir, il serait exécuté (« Any bush shake, you die » ou « Any bush shake, your heart »). Selon JTC, ces menaces étaient proférées à de multiples reprises afin de faire avancer les civils.
JTC further explained that the civilians took turns moving the truck and noted the difficulties they encountered when the slope was uphill. They passed through Shelloe, Fassapo and Borliloe before reaching the border at Solomba and then the customs at Ma. He spoke of the terror that reigned during the journey, characterized by gunshots and the beating of several people by ULIMO members anxious to complete the operation. JTC said that several ULIMO commanders were present during the march to supervise it. He mentioned the names of Ugly Boy, CO Kundi, CO Deku and Mami Wata. According to JTC, Kundi was not the main commander of the march and did not personally force him to participate.
JTC a précisé qu’il s’agissait de l’une des manœuvres les plus importantes à laquelle il avait participé et qu’il avait été contraint de participer à d’autres marches forcées. Il a déclaré néanmoins ne pas avoir participé à toutes les marches forcées, car soit il avait été en mesure de se cacher, soit il restait en compagnie de EP pour éviter d’être réquisitionné.
JTC a raconté se souvenir d’une marche forcée en particulier organisée à l’initiative de Kundi et dirigée par celui-ci. Il a relaté que Kundi avait envoyé ses gardes du corps pour le chercher et le réquisitionner. JTC a expliqué que la charge qui lui avait été affectée était extrêmement lourde, mais que les soldats de l’ULIMO n’admettaient aucune excuse pour échapper à la tâche. Il a expliqué que dans la mesure où les habitants de Foya avaient pris la fuite à l’arrivée des soldats de l’ULIMO, l’ULIMO réquisitionnait la main-d’œuvre dans les villages avoisinants. La plupart des personnes réquisitionnées pour cette marche venaient donc des villages voisins et non de Foya.
JTC a expliqué qu’une fois de plus, les civils avaient travaillé sans eau ni nourriture, sous la terreur, les coups, les tirs et la menace constante d’être tués. Ils étaient constamment entourés des soldats qui s’assuraient que le travail n’était pas ralenti. Il a raconté n’avoir eu d’autre choix que de boire l’eau d’une rivière polluée pour se désaltérer. Une fois arrivé à destination, JTC a expliqué qu’il était fréquent que le groupe armé auquel les marchandises étaient livrées remette d’autres marchandises en échange. Il arrivait donc que les civils doivent porter des marchandises sur le chemin du retour, à moins de parvenir à s’échapper. Selon lui, les personnes qui pouvaient directement rentrer chez elles étaient chanceuses.
Il a expliqué que la participation des civils à ces marches suscitait une grande inquiétude chez les proches des réquisitionnés, qui craignaient pour leurs vies. En effet, de nombreuses personnes avaient trouvé la mort durant ces marches, notamment les personnes faibles ou âgées qui n’avaient pas la force de porter les charges.
Lors de la marche dirigée par Kundi, JTC a indiqué ne pas l’avoir vu tuer ou tirer sur qui que ce soit, mais certaines personnes avaient été frappées avec des crosses pour les faire avancer.
JTC a affirmé avoir participé à huit marches forcées au total, dont deux dirigées par Kosiah et 3 par Ugly Boy. JTC a poursuivi en indiquant que l’ULIMO avait également pillé un moulin, une fabrique d’huile, un organisme de formation professionnelle appelé « LOIC » et une coopérative agricole où les producteurs rassemblaient leurs productions pour les vendre ou les troquer. De même, des domiciles privés avaient été pillés. Il a précisé que fin 1993 et 1994 avaient été des périodes plus calmes.
JTC a ensuite évoqué la venue de Alhaji Kromah, général de l’ULIMO, dans le district en 1994. Selon lui, celui-ci était venu pour voir comment les choses se passaient, et avait réuni les commandants qui contrôlaient la zone, dont CO Deku, CO Kundi et d’autres, à l’église pentecôtiste libre de Foya. Alhaji Kromah a constaté ce qui s’était produit à Foya et a déclaré publiquement aux membres de l’ULIMO : « Soldats, vous vous êtes rémunérés vous-mêmes ». Selon JTC, l’objectif de cette déclaration était de présenter des excuses à la population de Foya. JTC a cru discerner dans les propos de Alhaji Kromah qu’il compatissait avec ce que la population avait vécu. JTC a ensuite affirmé que Alhaji Kromah était revenu en 1995 et avait apporté du bétail à la population. Selon lui, cette démarche visait à nouveau à présenter des excuses et à tenter de compenser non pas les pertes matérielles, mais les pertes humaines infligées à la population.
La Cour questionne JTC :
Sur question, JTC a confirmé que la marche du générateur électrique avait eu lieu durant la seconde moitié de l’année 1993, lors de la saison des pluies. Il a également confirmé que les conditions météorologiques avaient rendu la marche encore plus difficile puisque la région ressemblait à un véritable « marais » à cette période de l’année.
Sur question, il a confirmé que CO Kosiah était également présent lors cette marche, aux côtés de Mami Wata, CO Kundi et Ugly Boy. Selon son estimation, entre 50 et 100 civils avaient été réquisitionnés. Il a confirmé qu’ils étaient moins nombreux au retour, car ils ne pouvaient pas s’attendre les uns les autres, le but étant de se disperser afin de ne pas être réquisitionné pour une autre marche.
Interrogé sur la façon dont les civils avaient été rassemblés, JTC a indiqué que l’ULIMO avait demandé à EP de réunir des civils et qu’en parallèle, les soldats de l’ULIMO réquisitionnaient des personnes de partout pour s’assurer du succès de l’opération. Selon lui, les civils étaient sélectionnés au hasard, sans tenir compte de leurs caractéristiques physiques.
Sur question, il a confirmé que le but de l’opération était de vendre les marchandises en Guinée. Interrogé sur l’intermédiaire dénommé Kake qu’il a cité devant le juge d’instruction, JTC a confirmé que Kake venait à Solomba et était l’un des intermédiaires principaux entre l’ULIMO et la Guinée.
Interrogé sur le déroulement de la marche, il a confirmé qu’il n’avait ni mangé ni bu et indiqué que la marche du générateur électrique s’était étendue sur une distance approximative de 16 miles parcourus en l’espace de 6 ou 7 heures sans aucun répit. Le Président a précisé que les distances avaient été vérifiées et estimées à environ 22 km, soit une distance un peu moins longue que celle que JTC venait d’indiquer.
Interrogé sur les violences auxquelles il a assisté au cours de cette marche, JTC a affirmé n’avoir vu personne se faire tuer par l’ULIMO, mais a expliqué avoir entendu plusieurs coups de feux, sans savoir s’ils avaient été tirés à destination des civils.
Sur question, JTC a réitéré qu’il avait effectué au total 8 marches forcées. Questionné sur la marche forcée effectuée sous le commandement de Kundi, il a précisé avoir été contraint de porter une charge importante de café. Invité à confirmer ses précédentes déclarations selon lesquelles les charges pouvaient peser jusqu’à 70kg, JTC a précisé qu’il ne connaissait pas le poids exact et que les civils portaient ce que les soldats leur disaient de porter.
Questionné sur les séquelles physiques qu’il a évoquées lors d’une autre audition, JTC a insisté sur l’impact psychologique dont il subit encore aujourd’hui les effets négatifs, notamment en raison du stress important provoqué par ces marches et du traumatisme lié à la vue de cadavres. Sur le plan physique, il a indiqué qu’il avait une cicatrice à l’épaule gauche qui n’avait aucun lien avec les faits, puisqu’elle remontait à l’enfance et qu’en ce qui le concernait, les séquelles étaient surtout psychologiques.
Sur question, il a confirmé ne pas avoir été concerné par la marche forcée organisée en lien avec le pillage de l’hôpital de Borma. Il a confirmé par ailleurs que la destruction des établissements qu’il a mentionnés précédemment était motivée par le prélèvement de matériaux.
Interrogé sur l’organisation de l’écoulement des marchandises à la frontière, JTC a indiqué avoir constaté que les marchandises traversaient la frontière et étaient récupérées par des personnes de l’autre côté. Selon lui, les marchandises étaient transportées de l’autre côté de la frontière sur de larges embarcations sans moteur, de type canoë ou pirogue, que l’on faisait avancer à la rame ou à l’aide de perches. Il a précisé qu’il était possible de rassembler deux embarcations et d’y déposer des planches afin de constituer une plateforme où étaient disposées les marchandises.
La partie civile questionne JTC :
Questionné sur le générateur pillé, JTC a affirmé que l’alimentation de la centrale électrique avait été démontée et qu’il n’avait pas assisté personnellement au démantèlement. JTC a indiqué ne pas se souvenir de la marque de la machine démantelée et pillée dans la centrale et a confirmé que l’électricité à Foya n’avait pas été rétablie depuis cet évènement.
Sur question, il a déclaré qu’il n’était pas commun de voir les membres de l’ULIMO se déplacer en voiture et que les véhicules étaient également pillés.
Questionné sur l’importance de la marche du générateur au vu du nombre important de commandants ayant participé, JTC a expliqué qu’il s’agissait en effet d’une mission très spéciale compte tenu de la valeur commerciale des objets transportés. Selon lui, lorsque les objets avait une valeur conséquente, cela nécessitait le rassemblement des commandants. Interrogé sur le marché où les marchandises étaient écoulées, il a indiqué qu’il se situait à Guéckédou, ville frontalière en Guinée.
Sur question, il a précisé que les civils ne pouvaient en aucun cas traverser la frontière, ni même toucher les embarcations, au risque de se faire tuer. Questionné sur le type de marchandises que les commandants ramenaient de Guinée, il a indiqué que de la nourriture, des vêtements, des munitions et des armes étaient rapportés.
Invité à se déterminer sur les déclarations des autres témoins selon lesquels il y avait un marché le jeudi à Foya, et sur celles de TFT, qui a affirmé qu’il avait une boutique de réparation de radio pendant la guerre, JTC a déclaré que sous l’occupation, il n’y avait pas de jour de marché défini et que le marché avait été interrompu, avant de reprendre progressivement vers la fin de l’année 1993. Il a ajouté que les femmes étaient utilisées non seulement comme esclaves sexuelles mais aussi pour aller vendre des marchandises sur le marché. Invité à expliquer comment TFT avait pu continuer son activité pendant la guerre, JTC a précisé que les radios fonctionnaient avec des batteries et que comme TT était connu pour son habileté, il pouvait travailler et les soldats de l’ULIMO lui apportaient des appareils à réparer.
Interrogé sur la liberté d’aller et venir des villageois sous l’occupation de l’ULIMO, notamment durant les périodes d’accalmie qu’il a mentionnées dans sa déclaration, JTC a précisé qu’il était obligatoire de se procurer un laissez-passer au bureau S2 pour se déplacer. Il a expliqué que si quelqu'un se présentait à un checkpoint sans laissez-passer, il risquait de se faire abattre sur le champ.
Questionné sur le fonctionnement des checkpoints, JTC a indiqué que parfois les soldats de l’ULIMO battaient les villageois et les détroussaient des provisions qu’ils étaient allés chercher dans la brousse. JTC a ensuite confirmé les propos de Massa Washington, qui avait expliqué que des morceaux de corps humains étaient exposés aux checkpoints pour terroriser la population. JTC a évoqué les atrocités subies par son beau-frère, dont la tête avait été coupée et placée sur un piquet à un checkpoint. Les passants étaient obligés de saluer cette tête. Quant aux intestins de son beau-frère, ils ont été utilisés en guise de barrière. Il a également évoqué un homme qui s’est enfui alors qu’on lui avait coupé ses parties génitales. Celui-ci a été abattu après s’être cogné contre un arbre. JTC a ajouté que bien d’autres atrocités avaient été perpétrées à cette époque.
Le Ministère public questionne JTC :
Interrogé sur le rôle de Kundi lors de la grande marche du générateur, JTC a indiqué qu’il avait vu Kundi au moment du rassemblement avant le départ, à l’endroit où se trouvait l’ancienne centrale électrique. D’autres commandants étaient également présents et ils se parlaient entre eux. Sur question, il a précisé qu’il avait vu les commandants tout au long de la marche, parfois derrière, parfois devant, y compris à la frontière de Solomba et la douane de Ma. Selon JTC, Kundi était armé.
Les avocates générales ont ensuite demandé à JTC s’il avait entendu CO Kundi dire les expressions « Till go » et « Any bush shake your heart ». Le témoin a répondu qu’il s’agissait d’un langage normal pour les commandants, y compris CO Kundi.
Questionné sur la deuxième marche, JTC a expliqué qu’il croyait que la marche du générateur avait eu lieu avant celle ordonnée par Kundi, qu’il a située vers octobre-novembre. Il a précisé ne pas être en mesure de donner une date précise. Sur question, il a confirmé que Kundi était le commandant et qu’il avait des soldats sous son autorité. JTC n’a pas été en mesure d’en préciser le nombre mais expliqué qu’il ne s’agissait pas d’une grosse marche. Il a estimé le nombre de civils réquisitionnés à 20 ou 30 et ajouté que les hommes étaient frappés avec des armes afin qu’ils avancent plus vite.
Les avocates générales ont donné lecture des déclarations de JTC devant les autorités néerlandaises : « Certaines personnes ont été punies […] Personnellement, je n’ai jamais été puni car j’étais fort et que j’arrivais à poursuivre la marche ». JTC les a confirmées.
Concernant la marche du générateur électrique, les avocates générales ont rappelé à JTC que lorsqu’on lui a demandé si d’autres commandants y avaient participé, il a déclaré devant les autorités suisses en 2016 : « Oui, ils étaient mélangés … C’était une force conjointe et pas le fait d’un seul homme ». Le témoin a confirmé qu’il s’agissait de la bonne description des événements. Sur question, JTC a indiqué qu’il n’avait pas discerné de hiérarchie parmi les commandants, mais a précisé que Kosiah avait fait le déplacement et qu’il avait donc ressenti que son rôle était plus important. Il a confirmé que chaque commandant avait participé à part égale avec ses soldats et expliqué qu’ils s’appelaient « CO », mais il était difficile de savoir qui avait un rang supérieur.
Le Président est intervenu pour demander au témoin si les commandants avaient des signes distinctifs de leur grade. JTC a répondu par la négative et expliqué qu’il était difficile d’identifier leur grade dans la mesure où ils ne portaient pas tous un uniforme.
Les avocates générales ont demandé à JTC s’il avait vu un commandant réprimander ou punir un soldat qui aurait menacé un civil. Le témoin a répondu que non et confirmé que les ULIMO cautionnaient ce genre de comportement puisqu’ils se conduisaient de cette façon.
Finalement, les avocates générales ont rappelé au témoin qu’il avait expliqué aux autorités suisses qu’il n’avait pas assisté au démontage de la machine, mais pensait que les ULIMO avaient fait venir des mécaniciens de Guinée pour participer au démontage. JTC a confirmé ses déclarations et précisé qu’après le démontage, des personnes spécialisées étaient venues pour réassembler la machine.
La défense questionne JTC :
L’avocate de la défense a interrogé le témoin au sujet de ses déclarations lors de sa confrontation avec Kunti Kamara devant le juge d’instruction, selon lesquelles il avait indiqué que le générateur se trouvait à l’origine à Bamoro. JTC a répondu que la centrale électrique se trouvait à Kpormbu Road. L’avocate des parties civiles a souligné qu’il y avait probablement eu une erreur de retranscription dans le procès-verbal d’audition.
L’avocate de la défense a ensuite questionné le témoin sur les pièces détachées, qu’elle a qualifiées de très imposantes, et s’est interrogée sur la façon dont ces pièces avaient pu être transportées sur un simple camion. JTC a réitéré que la centrale électrique était équipée de générateurs très imposants de type « Caterpillar Blackstone », qui alimentaient tout le district. La seconde alimentation était utilisée localement. Il a précisé que c’était la seconde alimentation, ainsi que certains composants de l’alimentation principale qui avaient été pillés. Selon lui, la seconde alimentation a été placée sur des rondins. Il a nié avoir déclaré que l’intégralité du matériel avait été pillé et chargé dans le camion. L’avocate de la défense s’est étonnée des déclarations du témoin dans la mesure où il n’en avait pas parlé lors de la remise en situation. JTC a répondu avoir peut-être été mal compris et a déclaré avoir été constant dans ses déclarations.
Sur question, JTC a indiqué que Kundi était à pied.
L’avocate de la défense a ensuite confronté le témoin à ses déclarations devant les autorités suisses à teneur desquelles il était moins nuancé sur le fait que tout le monde avait la même importance. Il avait en effet déclaré que Kosiah avait un rôle prépondérant, qu’il était la figure la plus importante et le plus haut gradé. JTC a répondu qu’il avait entendu le terme « CO » à plusieurs reprises et qu’il n’avait jamais su qui était le plus important. Il a souligné que Kosiah se déplaçait à l’extérieur de Foya et revenait. Comme il était présent ce jour-là, le témoin en a déduit qu’il était la personne en charge. Le témoin est ensuite revenu sur ses déclarations devant les autorités suisses et précisé que les mouvements de Kosiah donnaient l’impression qu’il était le plus important, sans que cela signifie que les autres ne l'étaient pas.
L’avocate de la défense s’est étonnée que les civils aient été en mesure de déplacer le camion en pleine saison des pluies, alors que les routes sont impraticables en cette période même pour des véhicules non chargés. JTC a confirmé que c’était en saison des pluies et précisé que beaucoup de main d’œuvre avait été utilisée.
Interrogé sur les canoës permettant de faire transiter les marchandises sur la rivière, le témoin a indiqué qu’il était habituel de voir de tels canoës traverser la rivière pour transporter des charges lourdes et qu’ils [i.e. les membres de l’ULIMO] savaient très bien comment les assembler. Il a en outre ajouté que ces canoës étaient toujours utilisés à l’heure actuelle. L’avocate de la défense a rétorqué qu’elle avait du mal à imaginer que les canoës puissent flotter avec un tel chargement.
Questionné sur les excuses présentées par Kromah à la population de Foya, le témoin a indiqué l’avoir vu s’exprimer publiquement.
Les avocates générales sont intervenues pour préciser les déclarations du témoin faites devant les autorités suisses concernant Kosiah, dans la mesure où elles auraient été tronquées par l’avocate de la défense. L’avocate de la défense est alors intervenue à son tour en citant un autre passage desdites déclarations.
Audition du Dr Hervé Boissin, médecin généraliste à Paris, expert CA Paris et agréé CC, entendu en qualité d’expert cité par le Ministère public
Le Dr Hervé Boissin s’est présenté en indiquant qu’il était expert auprès de la Cour d’Appel de Paris, agréé par la Cour de Cassation.
Avant qu’il ne commence sa déclaration, le Président a précisé qu’il avait été désigné par le juge d’instruction pour réaliser une expertise médico-légale sur JTC. Son rapport d’expertise a été déposé le 27 novembre 2018. Le Président a ajouté qu’il avait pour mission de vérifier les séquelles physiologiques de JTC en lien avec les marches forcées.
Le Dr Hervé Boissin a indiqué avoir examiné JTC le 22 novembre 2018 à 16 heures à son cabinet en présence d’un interprète. JTC l’a informé être marié et père de trois enfants. Il a ajouté qu’il était titulaire d’un master et exerçait en tant qu’auditeur-comptable. Son loisir était le chant. Le témoin lui a également fait part de ses douleurs dans le dos, dans le cou et dans le bras, ce qui l’obligeait parfois à prendre des antalgiques. Lors de l’examen, JTC était âgé de 50 ans.
Le Dr Hervé Boissin a fait état d’une cicatrice au niveau du moignon de l’épaule gauche, laquelle datait de l'enfance, ainsi que d’une cicatrice au niveau du rachis dorsolombaire d’origine rituellique. Il n’a pas fait état d’une quelconque contracture ou de point douloureux à la palpation du rachis cervical. S’agissant du rachis dorso-lombaire, le Dr Hervé Boissin a noté une hyperlordose avec bascule du bassin vers l’avant ainsi que des douleurs à la palpation.
Le Dr Hervé Boissin a conclu à l’absence de limitation fonctionnelle. Il a ajouté que sans examen radiologique, la bascule du bassin ne pouvait être mise en relation directe et certaine avec les faits.
Questionné par le Président sur son rapport, le Dr Hervé Boissin a confirmé que les séquelles physiologiques ne pouvaient pas être mises en lien direct et certain avec les éléments rapportés par le témoin. Il a ensuite précisé que l’examen du rachis dorso-lombaire était presque normal et qu’il ne pouvait donc pas se prononcer sur l’impact des marches sur JTC. Sur question, il a indiqué que le port de charges lourdes pouvait entraîner des lésions traumatiques immédiates, mais que JTC était jeune et souple à l’époque.
Interrogé par un juge assesseur, il a confirmé que l’état physique de JTC n’était absolument pas incompatible avec les marches forcées dont il a été victime.
Présentation de documents et pièces tirés du dossier. Remise en situation de JTC.
Le Président a présenté des photos à la Cour représentant la remise en situation de JTC. Les premières photos étaient des plans et des vues aériennes des trajets des marches forcées. La longueur du trajet était de 22 kilomètres. Le Président a ensuite montré une photo de JTC devant la maison de sa sœur où il se trouvait lorsqu’il a été attrapé par les ULIMO pour effectuer la marche forcée du générateur. Une photo de la centrale électrique a également été projetée.
Le Président a ensuite présenté une photo de l’intérieur de la centrale électrique au témoin en lui demandant où se trouvait le générateur. JTC a expliqué qu’on voyait l’alimentation principale en arrière-plan, laquelle était très lourde et très puissante. Il a ajouté que c’était la raison pour laquelle il y avait une alimentation secondaire qui était plus petite avec une alimentation moindre. L’un des jurés a précisé qu’il s’agissait d’un convertisseur. Le témoin a ajouté que des éléments avaient été emportés sur le générateur principal. Sur question du Président, JTC a confirmé que des éléments du générateur principal ainsi que le convertisseur avaient été emportés. Il a confirmé par ailleurs que le générateur principal n’était pas en état de fonctionner à l’heure actuelle.
Le Président a ensuite montré des photos du lieu où se trouvaient les pièces détachées. Il a demandé au témoin s’il confirmait ses déclarations selon lesquelles Kundi était actif, ne restait pas en place et faisait des allers et venues devant le bâtiment. JTC a confirmé.
Interrogé sur le véhicule à l’intérieur duquel les pièces du générateur avaient été placées, JTC a précisé qu’il s’agissait d’un camion à six roues. L’avocate de la défense est intervenue en citant les déclarations du témoin dans lesquelles il avait décrit une « petite camionnette ouverte à l’arrière », raison pour laquelle l’avocate avait utilisé le terme de pick-up. Le témoin a nié avoir mentionné un pick-up et indiqué avoir décrit un truck, c’est-à-dire un grand camion. Le Président a demandé s’il pouvait y avoir eu une erreur de traduction lors des explications données par JTC. Ce dernier a précisé à nouveau que le véhicule qu’il avait vu n’était pas un pick-up et qu’il existait différentes tailles de camion.
Le Président a continué en indiquant que le témoin avait dit que le camion était stationné au bord d’une route nommée Kpormbu Road. L’avocate de la défense a souligné que dans la retranscription, le nom de la route avait été orthographié « Bamoro ». Le Président a demandé au témoin de prononcer une nouvelle fois le nom et ajouté qu’il y avait vraisemblablement une erreur de retranscription.
Sur question du Président, JTC a confirmé qu’il avait fallu plus d’une heure pour charger les pièces dans le véhicule. Une fois les pièces chargées, il a estimé la durée du trajet jusqu’à Solomba à 6-7 heures.
Questionné sur la deuxième marche, le témoin a précisé que Deku était présent. Il a indiqué ne pas avoir eu accès au contenu des sacs à transporter, mais que ceux-ci pouvaient contenir toute une variété de produits (huile, café, coco, cuivre, zinc, etc.) en précisant que ce jour-là ils n’avaient pas transporté de riz car il y avait peu de riz à Foya. Il a également confirmé que Kundi était présent avec Deku et qu’il n’était pas possible de déterminer si Deku était réellement au-dessus de Kundi.
Interrogé sur la traversée de la rivière à la frontière guinéenne, JTC a confirmé que Kundi avait interpellé les personnes de l’autre côté de la rivière pour faire traverser les marchandises sur des pirogues.
La partie civile n’a pas eu de questions.
Le Ministère public questionne JTC :
Sur question, JTC a confirmé que les premières photos représentaient le lieu de départ et le lieu de son arrestation chez sa sœur s’agissant de la marche forcée du générateur. Les avocates générales ont précisé que les planches photographiques mélangeaient les deux marches effectuées par JTC.
Le Président a expliqué que la distance de 22 kilomètres évoquée précédemment correspondait à la distance entre la maison de la sœur de JTC et la frontière de Solomba, mais que le générateur se trouvait plus bas. Il a précisé qu’il fallait donc rajouter 1,7 kilomètres, pour arriver à un total de 23,7 kilomètres s’agissant de la marche du générateur
La défense n’a pas eu de question.
* * *
Audition TSKF en qualité de témoin cité par le Ministère public à la demande de la défense
TSKF s’est présenté en indiquant qu’il était agriculteur à Foya.
Avant de lui donner la parole, le Président a indiqué que TSKF a précédemment été entendu par la police libérienne le 29 avril 2019 dans le cadre de la commission rogatoire internationale.
Le témoin a débuté sa déclaration spontanée en indiquant qu’il était à Foya pendant la guerre en 1993. Un matin, il était assis avec d’autres personnes lorsqu’ils ont aperçu Kundi accompagné de soldats [ndlr. la mention de « child soldiers » par le témoin n’a pas été traduite]. Quelqu'un s’appelait Kotor. Selon le témoin, il y avait un portail à proximité où Kundi et ses soldats avaient tué des hommes et les avaient décapités. Ils ont ensuite apporté les têtes coupées vers le témoin et les personnes avec lesquelles il était assis. Ces derniers ont pris peur et sont rentrés dans leurs maisons en pleurant. Le témoin a ajouté que « lorsqu’on vous entend pleurer, c’est encore des problèmes » et que c’était dans ces circonstances qu’il avait rencontré Kundi.
La Cour questionne TSKF :
Le Président a interrogé TSKF sur le travail forcé qu’il avait évoqué lors d’un précédent interrogatoire. Le témoin a expliqué qu’ils [les soldats de l’ULIMO] forçaient les civils à travailler pour eux et que quand ils attrapaient les civils, ils leur mettaient un lourd fardeau sur la tête. Il a raconté qu’il avait lui-même été contraint à plusieurs reprises de porter des charges lourdes sur sa tête, notamment plus de 100kg de café, sur la route de Foya jusqu’à la frontière guinéenne. Il a déclaré que « il fallait porter, même si on n’avait pas la force. » Il a ajouté que lui et les autres civils se cachaient, mais que parfois, les soldats les cherchaient partout jusqu’à ce qu’ils les trouvent.
Sur question du Président, TSKF a cité certains noms de commandants qui encadraient ces marches, dont Ugly Boy, Mami Wata et CO Blaki [tbc], mais il a précisé que le nom qui revenait le plus souvent était celui de Kundi.
Le Président lui a demandé des précisions sur son frère et le témoin a répondu qu’il n’avait pas de nouvelles et ignorait s’il était toujours vivant. Le Président a alors relevé que lors de son audition, il avait indiqué que des gens avaient pris son frère, puis l’avaient tué et décapité. TSKF a répondu qu’il parlait de Kotor et qu’il le considérait comme son frère car leurs mères respectives venaient de la même famille. Sur question, il a indiqué que Kundi avait ordonné à ses hommes d’attraper Kotor. Il a précisé qu’il n’avait pas assisté à la scène de décapitation, mais avait seulement vu Kundi et ses hommes avec la tête de Kotor.
Le Président a ensuite confronté TSKF à la description physique qu’il a donnée de Kundi lors de son audition, étant précisé qu’il a décrit l’accusé comme quelqu’un de « pas très petit », portant des dreadlocks et un ensemble en jean. Le Président lui a indiqué que cette description ne semblait pas correspondre à Kundi et a demandé au témoin s’il avait pu confondre Kundi avec un autre gradé de l’ULIMO. TSKF a affirmé qu’il connaissait Kundi et qu’il ne portait pas toujours un uniforme, en particulier lorsqu’il se rendait en Guinée. Le témoin s’est tourné vers le box des accusés et a confirmé qu’il reconnaissait Kunti Kamara, en précisant qu’il était mandingue. Il a précisé qu’il était lui-même de l’ethnie Kissi, mais qu’il comprenait le mandingue.
Sur question, il a confirmé avoir vu Kundi pendant la guerre et indiqué que Kundi l’avait attrapé une seule fois pour une marche forcée, lors de laquelle il a dû transporter du café.
La partie civile questionne TSKF :
Sur question, TSKF a confirmé que Kundi était accompagné d’enfants soldats et précisé que l’un deux se prénommait Saddam. Il a par ailleurs confirmé qu’il se trouvait devant le portail d’une maison lorsqu’il a vu Kundi, et non à proximité d’un checkpoint. Sur question, il a précisé que la tête de Kotor n’avait pas été placée sur un piquet.
Invité à préciser le nom de la rivière traversée lors des marches forcées, le témoin a indiqué qu’il s’agissait de la Makona River. Sur question, il a déclaré qu’il avait été contraint uniquement par Kundi à faire une marche forcée, à l’exclusion d’autres commandants.
Le Ministère public questionne TSKF :
Sur question, TSKF a confirmé l’existence d’un couvre-feu. Il a ajouté que des gens avaient été forcés à transporter les pièces du grand générateur sur leurs têtes. Questionné à cet égard, il a confirmé qu’il s’agissait du générateur qui alimentait la ville de Foya et indiqué qu’il n’avait pas participé à l’acheminement de ces pièces, mais en avait entendu parler.
Sur question, TSKF a confirmé l’existence de laissez-passer délivrés par le bureau S2, dont il fallait obligatoirement être muni pour sortir de Foya.
Interrogé sur le nombre de soldats qui accompagnaient habituellement Kundi, le témoin n’a pas été en mesure de donner un chiffre exact, mais a précisé qu’ils étaient nombreux. Interrogé sur le nom d’un soldat qu’il avait donné lors de son audition devant la police libérienne, TSKF a confirmé que l’un deux se prénommait Saddam. Les avocates générales lui ont alors demandé s’il se prénommait Saddam ou Saddam Hussein. TSKF a répondu que son nom était seulement Saddam.
Sur question, il a confirmé que les soldats s’installaient dans les maisons des civils et que ces derniers devaient les nourrir.
Réinterrogé sur la marche forcée organisée par Kundi à laquelle il a participé, le témoin a confirmé que la rivière jusqu’où il fallait marcher se trouvait à proximité de Solomba. Invité à se déterminer sur sa déclaration selon laquelle certaines personnes ayant participé aux marches forcées avaient peur de parler, TSKF l’a confirmée. Sur question, il a indiqué qu’il n’avait pas envisagé de porter plainte car il était persuadé que la police ne ferait rien pour arrêter les coupables.
La défense questionne TSKF :
Interrogé TSKF sur sa capacité à identifier formellement Kunti Kamara dans le box des accusés, alors que lors de son audition en 2019, il avait indiqué ne pas le reconnaître sur les planches photographiques en invoquant le temps écoulé, le témoin a répondu que les photographies qui lui avaient présentées en 2019 n’étaient pas assez claires pour lui permettre d’identifier l’accusé. L’avocate de la défense a rétorqué que, selon elle, la seule différence entre les photographies de 2019 et la confrontation d’aujourd’hui résidait dans le fait qu’en 2019, TSKF devait reconnaître Kunti Kamara parmi neuf autres personnes, alors qu’aujourd’hui il était seul dans le box. TSKF a maintenu qu’il reconnaissait Kunti Kamara.
Interrogé sur l’identité des personnes qui lui ont proposé de témoigner contre Kunti Kamara, TSKF a répondu qu’il avait entendu dire que Kundi avait été attrapé et qu’il avait ensuite été approché par la police pour témoigner. L’avocat de la défense a ensuite remis en question la véracité des déclarations de TSKF, en s’appuyant sur ses déclarations concernant son frère au sujet duquel il a déclaré qu’il ignorait s’il était vivant ou mort avant de dire qu’il avait été tué par Kundi ou encore concernant la marche du générateur lors de laquelle les personnes réquisitionnées avaient portées les pièces sur leurs têtes.
Audition de ENB en qualité de témoin cité par le Ministère public à la demande des parties civiles
ENB s’est présenté en indiquant qu’il était né en 1974 et était officier à la police des polices. Sur question du Président, il a indiqué qu’il n’avait jamais eu de contact avec Kunti Kamra, mais qu’il connaissait certaines parties civiles, notamment SC et JTC, qui était son enseignant.
Avant de laisser la parole à ENB, le Président a indiqué que ce dernier a été entendu par la police libérienne en avril 2019 dans le cadre d’une commission rogatoire internationale.
Le témoin a débuté sa déclaration spontanée en racontant l’arrivée des soldats de Charles Taylor à Foya, alors qu’il était en train de travailler dans un marais. Il a expliqué que les soldats de Charles Taylor leur attachaient un tissu rouge autour du bras afin de les identifier et signaler aux autres troupes que l’identification avait été faite. Selon lui, l’occupation était relativement pacifique : les soldats se contentaient de prendre les animaux sans tirer sur les civils qui pouvaient continuer leurs activités quotidiennes. Il a déclaré qu’en 1992-1993, ils avaient vécu une autre guerre. Les rebelles de Taylor ont fui dans la brousse et l’ULIMO a pris le contrôle. Le témoin a déclaré qu’il entendait les noms de Deku, Kundi et Ugly Boy.
Le témoin a évoqué une réunion organisée par les soldats de l’ULIMO lors de laquelle ces derniers ont déclaré aux civils : « Dites aux membres de vos familles de revenir ici, sinon nous irons dans la brousse pour les tuer ». Certains sont donc partis dans la brousse pour ramener les gens en ville. Lors d’une autre réunion convoquée par C.O. Deku, les soldats de l’ULIMO ont menacé d’aller chercher et de tuer les rebelles de Taylor qui étaient restés dans la brousse. Selon le témoin, les rebelles de Taylor sont entrés dans la ville pour attaquer l’ULIMO, mais ils étaient impuissants car ils n’avaient plus de munitions pour combattre. L’ULIMO a donc chassé les rebelles du NPFL et les civils sont devenus les ennemis.
ENB a indiqué que L’ULIMO avait mis en place un couvre-feu de 17h à 8h du matin. La plupart des villageois n’ayant pas de notion du temps, l’ULIMO a mis en place un son de cloche qui indiquait aux habitants de rentrer chez eux. Selon ENB, si quelqu'un était chez un ami et que la cloche retentissait, il arrivait souvent qu’il se fasse attraper sur le chemin du retour à la maison et que l’on retrouve son corps le lendemain. Il a ajouté que beaucoup de citoyens avaient fui dans la brousse, mais que sa famille était restée en ville à cause des enfants et qu’ils avaient par conséquent laissé leurs vies entre les mains de Dieu.
Il a déclaré par ailleurs que les enfants soldats suivaient les civils, notamment lorsqu’ils allaient faire leur toilette à l’extérieur, et les obligeaient à les suivre, afin de constituer des groupes – pouvant aller jusqu’à 100 personnes – pour les marches forcées. S’agissant des marches forcées, ENB a expliqué que les charges consistaient en des marchandises diverses telles que des machines, du zinc, des moteurs, des congélateurs et frigos de toutes tailles, qu’il s’agissait de transporter jusqu’à la frontière. Lorsque quelqu'un se plaignait d’être fatigué, il pouvait être jeté à terre, frappé voire tué. Le témoin s’est rappelé en particulier de Ugly Boy, surnommé Saah Chuey, car il découpait des gens avec une hache. Il a précisé que lorsque les civils arrivaient à la frontière avec leurs charges, ils ne pouvaient pas partir, mais devaient rester sur place et attendre que les soldats de l’ULIMO fassent leur commerce de marchandises.
ENB a poursuivi en relatant une marche forcée lors de laquelle les rebelles de Taylor avaient tenté d’attaquer l’ULIMO dans la dernière ville avant la frontière, mais ont finalement dû fuir car ils étaient impuissants. Selon le témoin, un Krahn dénommé Prince a pris quelques hommes pour aller chercher les rebelles de Taylor dans la brousse. Ils sont tombés sur un jeune écolier et des personnes âgées. Prince a déclaré qu’il allait les tuer et certains soldats ont tenté vainement de l’en dissuader. Prince a abattu l’écolier alors qu’un enfant soldat a exécuté les personnes âgées. ENB et les autres civils se sont dit qu’ils n’étaient pas en sécurité et se sont cachés. Après cet incident, les soldats de l’ULIMO ont réitéré leur menace et déclaré que toute personne qui se cachait serait tuée. ENB et les autres se sont donc présentés à eux, puis les soldats sont partis faire du commerce en Guinée avant de ramener les civils à Foya.
Le témoin a enfin indiqué que selon lui cette guerre était une guerre de tribus. Il a précisé qu’à Foya, avant la guerre, il existait déjà un conflit territorial entre les Gbandis et les Kissis, deux ethnies voisines.
La Cour questionne ENB :
Sur question du Président, ENB a confirmé qu’il se trouvait à Foya en 1993 et qu’il avait déménagé à Monrovia en 1994. Interrogé sur les commandants de l’ULIMO, il a indiqué n’avoir jamais vu Kundi, mais en avoir entendu parler. Il a ajouté qu’il ignorait où se trouvait Ugly Boy, mais serait en mesure de le reconnaître, et que Deku avait été tué en Guinée selon lui.
Questionné sur la mort de DN qu’il a évoquée lors d’une précédente audition devant les policiers libériens, ENB a déclaré qu’il se trouvait à Foya le jour où DN est mort. Il a expliqué avoir entendu que trois blancs étaient venus et ont demandé au chef traditionnel TT de les emmener à l’hôpital de Borma. ENB était sur place. Les blancs ont demandé qui était responsable des destructions et TT a répondu : « Je ne peux pas le dire parce que nous sommes les victimes de la guerre ». ENB a indiqué qu’à sa surprise, DN était également présent et a déclaré : « Je ne vais rien cacher. Ces dégâts ont été causés par l’ULIMO ». Selon le témoin, Kundi et Deku contrôlaient Foya à l’époque. C’était à son retour en ville qu’il avait appris que DN avait été tué. Il a précisé n’avoir vu ni le meurtre ni le corps de DN.
Interrogé sur les charges portées par les civils sous la contrainte, en particulier sur le générateur, ENB a indiqué qu’il ignorait s’il s’agissait du générateur de la ville de Foya ou de celui de l’hôpital. Il a ajouté que la centrale électrique de Foya avait été construite sous le régime de Doe et lorsque le NPFL a pris le contrôle de Foya, le générateur est resté en place. En revanche, lorsque l’ULIMO est arrivé, ils ont tout pris. Il a confirmé avoir dû porter les pièces du générateur.
Interrogé sur Fine Boy, le témoin l’a décrit comme une personne intelligente et bien formée qui traitait correctement la population. Il parlait poliment et ne battait pas les gens. Questionné sur Ugly Boy, il l’a décrit comme quelqu’un de laid et redouté par la population. Interrogé sur la réputation de Kundi et Deku, ENB a affirmé qu’ils avaient le pouvoir et étaient toujours ensemble. La population les craignait.
La partie civile questionne ENB :
L’avocate des parties civiles a interrogé le témoin sur les propos tenus par l’ULIMO à leur arrivée à Foya. Selon lui, les ULIMO ont déclaré qu’ils étaient venus libérer la population des souffrances infligées par Charles Taylor. ENB a ajouté que : « Au vu de leurs actions, nous savons que c’était des mensonges ».
Le Ministère public questionne ENB :
Interrogé sur le déroulement des marches forcées, ENB a affirmé que les personnes étaient réquisitionnées de force, battues, et ne recevaient pas un centime. Selon lui, beaucoup de personnes sont mortes en chemin. Invité à se déterminer sur ses déclarations selon lesquelles certaines personnes sont mortes sur le trajet en raison de charges lourdes qu’elles portaient, ENB a les confirmées. Il a par ailleurs confirmé que certains avaient été exécutés. Il a précisé que les marches de Foya à Solomba pouvaient durer toute une journée en raison du poids des charges, alors qu’il suffisait de 5h en temps normal. Interrogé sur le comportement des commandants qui encadraient ces marches, il a indiqué qu’ils avaient du plaisir à frapper les civils.
Invité à décrire la manière dont les civils étaient réquisitionnés pour ces marches ou d’autres tâches, ENB a rappelé qu’il y avait un couvre-feu. Pendant la journée, les soldats frappaient à la porte des civils et les faisaient sortir. Le matin, il arrivait que les soldats envoient des enfants soldats qui surprenaient les civils lorsqu’ils sortaient de chez eux. Il arrivait également que les soldats demandent au chef traditionnel de fournir des hommes. Afin de rassembler les gens sans susciter la suspicion, le chef traditionnel criait « general cleaning » et c’était seulement lorsque les civils commençaient à travailler que les soldats venaient les chercher.
Sur question, ENB a confirmé avoir assisté à l’échange entre DN et les blancs, mais non à l’arrestation de DN.
Interrogé sur les mesures mises en place par l’ULIMO, ENB a confirmé l’existence d’un couvre-feu et de laissez-passer délivrés par le bureau S2. Il a expliqué que les civils qui étaient à Foya possédaient des fermes dans la brousse et ont demandé la permission à Deku de pouvoir s’y rendre pour aller chercher de la nourriture. Deku a donné son accord à condition que les civils soient munis d’un laissez-passer.
Invité à se déterminer sur les déclarations de TSKF, selon lesquelles certaines personnes victimes de marches forcées renonçaient à parler par crainte de représailles, ENB les a confirmées et a précisé qu’ils étaient beaucoup à avoir peur de parler.
La défense questionne ENB :
L’avocate de la défense a interrogé ENB avec insistance sur les raisons pour lesquelles il impliquait Kunti Kamara dans la mort de DN et les marches forcées, alors qu’à chaque fois que la question lui a été posée, il a répondu qu’il ne le connaissait pas. Le témoin a rétorqué que beaucoup de gens ont entendu parler de Kundi sans jamais l’avoir rencontré pour autant. Il a ajouté selon lui que les exactions commises sous les ordres de Kundi relevaient de sa responsabilité et affirmé : « Je ne l’ai pas vu, mais j’ai vu des gens tuer en son nom ». Il a précisé que les soldats disaient qu’ils venaient sur ordre de Kundi et Deku.
L’avocat de la défense a ensuite questionné ENB sur son âge. Ce dernier a indiqué qu’il était âgé de 42 ou 43 ans et l’avocat de la défense s’est offusqué en disant que le témoin avait déclaré devant la police libérienne qu’il était né en 1972 et devait par conséquent être âgé d’une cinquantaine d’années. L’avocat de la défense a déclaré qu’il ignorait si le témoin était bien la personne auditionnée au Libéria compte tenu de ces inexactitudes et que cela était inadmissible. Le Président est intervenu pour rappeler qu’il pouvait y avoir des inexactitudes sur les dates de naissance qu’il fallait parfois rectifier en audience, dans la mesure où il n’y avait pas de registres d’état civil à l’époque. Le témoin a été invité à confirmer les informations figurant sur la fiche des témoins et à présenter sa carte professionnelle, indiquant qu’il est né en 1974.
Projection d’un film de 2008 concernant les auditions devant la Commission Vérité et Réconciliation
Le film a été versé à la procédure sur demande de l’avocate des parties civiles. Diverses auditions de témoins par la CVR y sont présentées, notamment en lien avec des marches forcées et des exactions commises durant les guerres civiles. Interrogé sur les commandants de l’ULIMO, un témoin d’origine Kissi cite les noms de Ugly Boy et C.O. Kundi.
A l’issue du visionnage, le Président a demandé confirmation qu’il avait bien entendu le nom C.O. Kundi cité par un témoin. L’avocate des parties civiles a précisé que le témoin a effectivement mentionné le nom de divers commandants, dont C.O. Kundi.
Interrogatoire au fond de Kunti Kamara sur ces faits
La Cour interroge Kunti Karama :
Interrogé sur les différentes personnes ayant évoqué les marches forcées, outre JTC, Kunti Kamara a déclaré qu’il ne les connaissait pas, quand bien même celles-ci ont affirmé le connaître personnellement et indiqué qu’il avait un poste de commandement à Foya. Questionné sur le témoin Kissi qui a mentionné les noms de Ugly Boy et C.O. Kundi dans la vidéo sur la CVR, Kunti Kamara a déclaré qu’il n’avait pas connaissance de l’existence de cette vidéo.
Interrogé sur les marches forcées, il a répondu qu’il n’en avait pas connaissance non plus et qu’il avait passé 4 mois à Mendekoma, à la frontière avec le Sierra Leone. Il a précisé qu’il avait trop de travail et n’avait pas le temps de voir cela.
Questionné sur le pillage de la centrale électrique de Foya, l’accusé a indiqué qu’il ne pouvait rien dire sur Foya et ignorait s’il y avait une centrale, puisqu’il y avait été basé une ou deux semaines tout au plus.
Interrogé sur la marche forcée évoquée par le témoin JTC, qui aurait été commandée par Kundi, ce dernier s’est dit choqué et confus que quelqu'un l’accuse sans le connaître. Questionné sur la présence de Deku lors de cette marche, Kunti Kamara a répondu que Deku venait le trouver au front.
Interrogé sur les échanges commerciaux entre la Guinée et le Libéria, notamment dans le Lofa, l’accusé a indiqué qu’il y avait un marché à Voinjama et que Guinéens et Libériens s’y échangeaient des marchandises dans les années 1995-1996. Le Président l’a alors confronté à ses déclarations devant le juge d’instruction, selon lesquelles après la prise de Voinjama, la frontière avec la Guinée a été ouverte et tous les Libériens sont revenus à Foya. Il a déclaré au surplus devant le juge d’instruction qu’il y avait également des Guinéens à Foya qui achetaient du cacao et du café pour l’envoyer en Guinée. Le Président a relevé que les témoins entendus jusqu’à présent ont déclaré que lorsque la région de Foya était sous le contrôle de l’ULIMO, personne ne pouvait se déplacer sans laissez-passer et aucun habitant n’était autorisé à traverser la frontière avec la Guinée. Le Président a donc demandé à l’accusé comment il était possible de faire du commerce avec les Guinéens. Kunti Kamara a indiqué qu’il était confus et qu’il essayait simplement d’expliquer qu’en 1995-1996, la situation était normale. Sur question du Président, l’accusé a confirmé qu’il ne pouvait pas se prononcer sur les échanges commerciaux ayant eu lieu en 1993 avec la Guinée, car il avait quitté Foya à cette époque. Interrogé à nouveau sur les marches forcées, il a déclaré qu’il n’avait pas le temps pour les civils, car il était au front. A la question de savoir s’il en avait entendu parler, il a répondu qu’il s’agissait de rumeurs et que si lui-même avait vu quelqu'un forcer des civils, il le dirait.
Le Président a ensuite interrogé Kunti Kamara sur les excuses présentées par le général Kromah à la population de Foya. L’accusé a répondu que le général Kromah était venu à Foya après le désarmement, au moment de la préparation des élections.
Interrogé sur l’absence de rémunération des soldats de l’ULIMO et sur leurs moyens de subsistance, Kunti Kamara a déclaré que les soldats étaient des résistants et recevaient des armes et de la nourriture en provenance de Guinée. Il a précisé qu’il n’était pas concerné par les fournisseurs de nourriture. A la question de savoir si les populations locales, notamment les Kissis, acceptaient volontiers de donner de la nourriture aux soldats, l’accusé a répondu qu’il n’était pas concerné et ne pouvait rien dire à ce propos.
Le Président a demandé à Kunti Kamara s’il était toujours resté sur le front entre 1989 et 1997. L’accusé a répondu que lorsqu’il était à Gbarnga, il faisait des allers-retours entre Voinjama et le pont sur la rivière St-Paul qui séparait l’ULIMO des forces de Taylor.
Interrogé sur les raisons pour lesquelles Alieu Kosiah l’a cité comme témoin dans le cadre de son procès en Suisse, Kunti Kamara a répondu qu’il l’ignorait.
La partie civile interroge Kunti Kamara :
L’avocate des parties civiles a réinterrogé Kunti Kamara sur son séjour à Foya. L’accusé a indiqué qu’il se rappelait avoir passé quatre mois à Foya, avant de se rendre à Voinjama. Il a également indiqué que Kosiah avait passé deux semaines à Foya.
Confronté à ses déclarations devant le juge d’instruction selon lesquelles il connaissait Solomba, Kaké et la rivière qu’il fallait traverser avec des canoës, Kunti Kamara a confirmé qu’il y avait une rivière à Solomba. En revanche, il a déclaré qu’il ne se souvenait avoir parlé ni de canoës ni d’un dénommé Kaké. Il a ajouté qu’en 1996, il était allé à la frontière chercher de l’essence. L’avocate des parties civiles s’est déclarée surprise qu’il ait une connaissance si précise des lieux en s’y étant rendu à une seule reprise.
Invité à dater le désarmement, l’accusé a affirmé que le désarmement avait eu lieu entre 1996 et 1997 et avait précédé la mise en place d’un gouvernement de transition auquel toutes les factions avaient participé. Il a précisé que les élections avaient eu lieu dans un second temps. L’avocate des parties civiles a interrogé Kunti Kamara sur le lien de connexité entre la venue de Kromah à Foya pour présenter des excuses à la population et la période de campagne électorale. L’accusé a répondu qu’il avait entendu dire que Kromah était venu à Foya pendant qu’il faisait campagne.
Interrogé sur le complot fomenté contre lui, Kunti Kamara a confirmé l’existence d’un grand réseau ligué contre lui sous la houlette de HB, un mandingue, FW, un Kissi, et l’ONG GJRP. L’avocate des parties civile a rappelé que l’ONG avait été créée en 2012 et a demandé à Kunti Kamara comment il expliquait le fait qu’un témoin le mentionne devant la CVR dans une vidéo datant de 2008 et alors même que son nom ne figurait pas sur la liste répertoriant les auteurs des crimes. L’accusé a réitéré qu’il s’agissait de complots secrets. Il a expliqué qu’il y avait beaucoup de rumeurs et que l’intérêt des personnes venues témoigner contre lui était d’obtenir l’asile en Europe et de faire venir leurs familles.
Le Ministère public interroge Kunti Kamara :
Sur question, Kunti Kamara a confirmé qu’il avait séjourné quatre mois à Foya. Les avocates générales ont alors rappelé que la prise de Foya était datée de juillet 1993 et considéré que l’accusé y était donc demeuré jusqu’en novembre 1993, soit la période durant laquelle les exactions relatées notamment par JTC, telles les marches forcées, ont été commises. Kunti Kamara a rétorqué qu’il avait passé tout son temps sur le front à Mendekoma en raison des combats. Il a répété qu’il n’était pas basé à Foya.
Interrogé sur les déclarations de plusieurs témoins, selon lesquelles il avait des enfants soldats sous ses ordres, l’accusé a nié avoir eu des enfants soldats comme gardes du corps à Foya. Il a déclaré qu’il n’avait jamais entendu le nom de Saddam Hussein. Concernant l’enrôlement d’enfants soldats par d’autres membres de l’ULIMO, l’accusé s’est souvenu de deux jeunes soldats âgés de 16-17 ans capturés par Pepper & Salt. Ces jeunes portaient des uniformes, mais il ne les avait jamais vus sur le front.
L’accusé a ensuite été interrogé sur les expressions « Any bush shake » et « Till go ». Il a indiqué qu’il n’était pas au courant, mais que selon lui, la première expression était utilisée au front pour inciter les des soldats à réagir lorsqu’il y avait du mouvement dans la brousse. Quant à « Till Go », c’était selon lui une expression militaire qui indiquait aux soldats qu’il ne fallait pas reculer, mais continuer jusqu’à atteindre l’objectif, comme l’expression « No retreat ».
Les avocates générales ont lu les déclarations de Kwamex Fofana, un haut gradé de l’ULIMO, sur les marches et travaux forcés. Ce dernier a déclaré que les civils avaient été forcés à transporter des marchandises pillées vers la Guinée, telles que du café, de l’huile de palme, des moteurs, dans le cadre d’échanges commerciaux entre le Lofa et la Guinée. Kunti Kamara a rétorqué ne rien savoir à ce propos.
A la question de savoir s’il connaissait les expressions « help yourslef » et « pay yourself », l’accusé a répondu être entré dans la guerre de son plein gré dans le but de résister à Charles Taylor, et non pour être payé.
Questionné sur ses déplacements dans le Lofa, il a précisé qu’il utilisait une voiture qui avait été confisquée au NPFL et que Deku lui fournissait l’essence. Les avocates générales l’ont alors confronté à ses déclarations devant le juge d’instruction selon lesquelles c’était une période de guerre et qu’il n’y avait pas d’essence. Kunti Kamara a déclaré que le juge lui a demandé comment il se déplaçait et il a répondu qu’il allait au marché à Kolahun à proximité d’où sa femme habitait. Sous contrôle des parties, les avocates générales ont indiqué que ce n’était pas ce que l’accusé avait déclaré.
La défense interroge Kunti Karama :
Se référant à la carte du Libéria, l’avocat de la défense a relevé que Mendekoma et Foya se trouvaient dans le district de Foya et demandé à Kunti Kamara s’il faisait référence au district de Foya lorsqu’il a déclaré avoir passé quatre à Foya. L’accusé a confirmé qu’il avait passé quatre mois non pas dans la ville de Foya, mais dans le district de Foya.