[10/27/2022] Jour 14: Kamara parle
Le Président a souscrit à la demande de certains jurés et a demandé au chef de la police de faire venir Kunti Kamara quelques instants au centre de la salle d’audience, afin que les jurés puissent apprécier son apparence physique.
Interrogatoire au fond récapitulatif de l’accusé Kunti Kamara
La Cour interroge Kunti Kamara :
Dans un premier temps, le Président a demandé à l’accusé de simples confirmations sur un certain nombre d’affirmations et l’a invité, cas échéant, à manifester son désaccord.
Kunti Kamara a d'abord confirmé avoir fui en Guinée en 1989 en raison des massacres commis par Charles Taylor dans son comté et être retourné au Libéria en 1992, avant d’intégrer les troupes ULIMO de Kromah, au sein desquelles il y avait des Krahns et des Mandingues à cette époque. Kunti Kamara a également confirmé que l’ULIMO s’était scindé en 1994 et qu’il était resté dans l’ULIMO-K avec les Mandingues. Il a par ailleurs confirmé avoir quitté définitivement le Libéria en 1997 pour se rendre d’abord en Guinée, puis aux Pays-Bas en 2001, en Belgique en 2013, et enfin en France en 2016.
Kunti Kamara a ensuite confirmé qu’il se trouvait sur le territoire libérien entre 1992 et 1997, sous réserve de quelques incursions temporaires en Sierra Leone et en Guinée. Le Président a déclaré que l’ULIMO contrôlait le Lofa et le Bomi en 1993-1994 et qu’à partir de 1994, l’ULIMO-K était dans le Lofa, alors que l’ULIMO-J occupait le Bomi, ce Kunti Kamara a confirmé. Interrogé sur la localisation du front de combat contre le NPFL en 1993-1994, Kunti Kamara a indiqué que le front se situait dans les comtés de Lofa et de Gbarnga et précisé qu’il y avait un front à St-Paul Bridge.
Le Président est ensuite revenu sur la carrière militaire de l’accusé entre 1992 et 1997, soit lorsqu’il avait entre 18 et 23-24 ans. Kunti Kamara a confirmé qu’il était né en 1974 et qu’il avait entre 19 et 20 ans en 1993-1994 et environ 23 ans en 1997 lorsqu’il a quitté le pays. Sur question, Kunti Kamara a indiqué avoir suivi une formation militaire de deux ou trois mois au Libéria au moment de rejoindre l’ULIMO en 1992.
Interrogé sur la provenance des uniformes et des armes utilisés par l’ULIMO, Kunti Kamara a déclaré qu’il n’avait pas d’informations à ce sujet, mais lorsque le Lofa a été capturé, les fournitures venaient de Guinée. Il a précisé que lorsqu’il a rejoint l’ULIMO, la guerre était en cours et les troupes étaient déjà armées. Questionné sur le matériel qu’il a reçu au moment d’intégrer l’ULIMO, Kunti Kamara a indiqué qu’on l’avait affecté à un peloton (« platoon ») et que le commandant lui a donné un uniforme.
Interrogé sur ses débuts au sein de l’ULIMO, Kunti Kamara a déclaré qu’il avait commencé au sein de la section « Iron Red » , qui comptait 45 hommes avec le commandant. Le Président a ensuite indiqué qu’il avait déclaré devant le juge d’instruction qu’il était par la suite devenu officier flottant (« floating officer ») de la section « Black Devil » , ce que l’accusé a confirmé en précisant que c’était à Foya. Questionné sur la hiérarchie entre un floating officer et un bodyguard, Kunti Kamara a indiqué qu’il était possible d’être l’un et l’autre en même temps. Sur question, il a précisé qu’un floating officer n’avait pas de mission spécifique, mais était assigné à quelqu'un pour être son bodyguard. bodyguard.
Kunti Kamara a ensuite confirmé que la section « Black Devil » avait deux missions, à savoir protéger la frontière entre la Sierra Leone et le Libéria et prendre la ville de Foya. Sur question, il a indiqué que la prise de Foya avait eu lieu en 1993 selon lui.
Interrogé sur l’affectation de battlefront commander, Kunti Kamara a expliqué que le battlefront commander était chargé de tendre des embuscades et avait un rôle d’éclaireur en se positionnant 200 mètres à l’avant des troupes afin d’alerter les soldats en cas d’embuscade. Il a ajouté que si le commandant tombait entre les mains de l’ennemi, il n’était pas tué car l’ennemi savait que ses soldats étaient derrière.
Le Président a demandé à l’accusé de confirmer ses déclarations devant le juge d’instruction, selon lesquelles il pouvait contrôler jusqu’à deux sections de 44 hommes au front, soit 88 hommes au total. Kunti Kamara a d’abord déclaré qu’il avait dit au juge d’instruction que la plupart du temps, il y avait deux sections sur le front, avant d’affirmer qu’il ne commandait pas de section sur le front. Il a indiqué qu’il n’était pas possible qu’un battlefront commander soit responsable d’un peloton (« platoon »). (« platoon »)Le Président lui a indiqué qu’il avait dit le contraire non seulement durant le procès, mais également devant le juge d’instruction, auquel il a déclaré qu’il donnait des ordres à deux sections manœuvrant sur la ligne de front. L’accusé a alors expliqué qu’il travaillait main dans la main avec le commandant de section, qui était responsable des tranchées. Il a ajouté qu’il avait le droit de demander au commandant de section de lui fournir des hommes pour tendre des embuscades à l’ennemi. Il a également indiqué que lorsqu’ils capturaient des ennemis, l’information la plus importante était de savoir où se trouvaient les armes des ennemis. Le Président a demandé à l’accusé de confirmer ses déclarations devant le juge d’instruction, selon lesquelles il pouvait contrôler jusqu’à deux sections de 44 hommes au front, soit 88 hommes au total. Kunti Kamara a d’abord déclaré qu’il avait dit au juge d’instruction que la plupart du temps, il y avait deux sections sur le front, avant d’affirmer qu’il ne commandait pas de section sur le front. Il a indiqué qu’il n’était pas possible qu’un battlefront commander soit responsable d’un peloton (« platoon »). Le Président lui a indiqué qu’il avait dit le contraire non seulement durant le procès, mais également devant le juge d’instruction, auquel il a déclaré qu’il donnait des ordres à deux sections manœuvrant sur la ligne de front. L’accusé a alors expliqué qu’il travaillait main dans la main avec le commandant de section, qui était responsable des tranchées. Il a ajouté qu’il avait le droit de demander au commandant de section de lui fournir des hommes pour tendre des embuscades à l’ennemi. Il a également indiqué que lorsqu’ils capturaient des ennemis, l’information la plus importante était de savoir où se trouvaient les armes des ennemis.
Interrogé sur son tempérament en tant que soldat, notamment s’il se considérait comme courageux, Kunti Kamara a déclaré avoir rejoint l’ULIMO dans le but de résister au NPFL. Il a ajouté qu’il était tout le temps sur le front pour résister à Charles Taylor, qu’il a qualifié de criminel qui a tué toute sa famille, et qu’en tant que Libérien, il ne pouvait pas partir en exil. Le Président a indiqué qu’il s’était décrit comme déterminé, opiniâtre, pas idiot, régulier et fiable, et lui a demandé s’il pensait avoir une autorité naturelle pour commander d’autres hommes. L’accusé a confirmé qu’il était doté de ces qualités. A la question de savoir s’il était respecté par ses hommes, Kunti Kamara a déclaré que lorsqu’un soldat se blessait, il ne le laissait pas derrière. Sur question, il a confirmé qu’il était courageux et indiqué qu’il n’était pas craint par ses hommes, mais plutôt apprécié et respecté.
Kunti Kamara a ensuite confirmé qu’il était bien C.O. Kundi. Interrogé sur sa promotion en tant que colonel en 1995, il a expliqué qu’après la capture du quartier-général de Taylor, tous les soldats impliqués dans cette opération ont obtenu une promotion. Étant donné qu’il était sur le front le jour de la promotion, il a été informé qu’il avait été promu colonel. A la question de savoir s’il avait obtenu un grade plus élevé que Kosiah, Kunti Kamara a répondu qu’il l’ignorait. Il a indiqué qu’il arrivait que des soldats soient appelés colonel ou capitaine pour les encourager sur le front, alors qu’ils n’avaient en réalité pas obtenu de tels grades.
Le Président a précisé que l’accusé avait également indiqué au juge d’instruction qu’il avait obtenu le grade de colonel après l’attaque menée contre Taylor en 1995 et reçu deux gallons (sous forme d’oiseaux) en guise de recommandation du siège.
Le Président est ensuite revenu sur la hiérarchie entre les hauts gradés de l’ULIMO. Sur question, Kunti Kamara a confirmé avoir déjà rencontré le général Kromah et précisé que le chef d’état-major était le général Dombuyah. Interrogé sur Jungle Jabah, l’accusé a indiqué qu’il était parti à Bomi et se disputait la position de commandant général (commanding general) avec Pepper & Salt. Sur question, Kunti Kamara a précisé que Dombuyah était plus haut placé que Pepper & Salt. Questionné sur Deku, il a indiqué qu’il était area commander de Foya en 1993, puis a été promu area commander de Foya en 1993, puis a été promu general commander..
Le Président a indiqué que Kunti Kamara avait déclaré devant le juge d’instruction que le chef d’état-major lui donnait des ordres sur le front et que lui-même reportait à Deku. Le Président a alors demandé comment Deku pouvait lui donner des ordres alors que l’accusé était au front. Kunti Kamara a répondu que Deku était en-dessous de Pepper & Salt.
Interrogé sur les fonctions de Mami Wata et d’Ugly Boy, l’accusé a indiqué que Mami Wata était commandant de section et qu’Ugly Boy était « nulle part ». Le Président a rétorqué qu’il avait plutôt l’impression qu’Ugly Boy était partout.
Interrogé sur ses affectations militaires de 1992 à 1994, Kunti Kamara a indiqué avoir rejoint l’ULIMO en tant que garde du corps dans la section « Iron Red » . Sur question, il a précisé qu’il était à Bomi et Cape Mount en 1992, puis dans le Lofa en 1993-1994. Il a indiqué avoir passé 4 mois à Foya et avoir été assigné au pont entre le comté de Lofa et le comté de Bong. Questionné sur son séjour à Voinjama, Kunti Kamara a déclaré ne pas y être resté longtemps et avoir poussé les rebelles du NPFL depuis Zorzor jusqu’à la frontière à Mendekoma, en passant par Foya. Il a ajouté que beaucoup de rebelles du NPFL sont entrés en Sierra Leone. Sur question, il a précisé que Mendekoma se situait à 20 km de Foya. Le Président lui a ensuite demandé si son rôle consistait à empêcher les rebelles du NPFL de revenir dans le Lofa. Kunti Kamara a répondu que lui et les autres soldats n’avaient pas de temps pour eux-mêmes, mais uniquement pour les rebelles de Taylor. Sur question, il a précisé qu’il était à Bomi et Cape Mount en 1992, puis dans le Lofa en 1993-1994. Il a indiqué avoir passé 4 mois à Foya et avoir été assigné au pont entre le comté de Lofa et le comté de Bong. Questionné sur son séjour à Voinjama, Kunti Kamara a déclaré ne pas y être resté longtemps et avoir poussé les rebelles du NPFL depuis Zorzor jusqu’à la frontière à Mendekoma, en passant par Foya. Il a ajouté que beaucoup de rebelles du NPFL sont entrés en Sierra Leone. Sur question, il a précisé que Mendekoma se situait à 20 km de Foya. Le Président lui a ensuite demandé si son rôle consistait à empêcher les rebelles du NPFL de revenir dans le Lofa. Kunti Kamara a répondu que lui et les autres soldats n’avaient pas de temps pour eux-mêmes, mais uniquement pour les rebelles de Taylor.
Sur question, il a indiqué qu’il ignorait s’il y avait des rebelles de Taylor en Guinée. Le Président a indiqué qu’il y avait visiblement eu des échanges de marchandises avec la Guinée et demandé à l’accusé quelle était la situation en Guinée, notamment s’il y avait une guérilla. Kunti Kamara a déclaré que tout ce qu’il savait, c’était que Taylor était un criminel et avait formé le Lofa Defense Force, qui est entré en Guinée.
Interrogé sur Alieu Kosiah, Kunti Kamara a confirmé que ce dernier était peu présent avec lui sur le front. Questionné sur sa rencontre avec Kosiah, l’accusé a expliqué qu’ils avaient reçu l’ordre d’attaquer Foya et que le groupe de Deku et Kosiah se trouvait derrière le sien. Son groupe avait pour mission d’aller jusqu’à la frontière et est resté basé à Mendekoma. Kunti Kamara a ajouté avoir appris qu’Alieu Kosiah était retourné combattre à Voinjama et indiqué être allé à sa rencontre en traversant le pont où se trouvaient les rebelles de Taylor.
Le Président a ensuite demandé à l’accusé comment il expliquait le fait que beaucoup de gens de Foya le connaissaient, pouvaient le décrire physiquement ou étaient capables de chanter des chansons à sa gloire. L’accusé s’est dit extrêmement choqué et a précisé qu’il avait passé tout son temps sur le front lorsqu’il se trouvait dans les comtés de Lofa et de Bong. Il s’est également étonné qu’aucune de ces personnes ne soit venue se plaindre de lui à l’époque.
Le Président a indiqué que 12 témoins et 8 parties civiles l’avaient identifié très précisément. L’avocate de la défense est intervenue et a souligné que plusieurs d’entre eux avaient identifié Kunti Kamara seulement après l’avoir vu dans le box des accusés. Elle a également relevé que certains d’entre eux ont affirmé qu’il louchait alors que tel n’était pas le cas selon elle. Le Président a nuancé ses propos en disant que 20 personnes avaient identifié l’accusé plus ou moins précisément, ce qui laissait penser que ces gens l’avaient manifestement côtoyé à Foya. Kunti Kamara a répété qu’il ne connaissait pas ces gens et ne savait pas de quoi ils parlaient.
Le Président est ensuite revenu sur le témoignage d’Abraham Towah, qui a indiqué avoir été le small soldier d’Alieu Kosiah, qu’il considérait comme son père. Le Président a rappelé que lors de son audition devant le juge d’instruction, Abraham Towah a indiqué qu’il connaissait Kundi, qu’ils étaient amis et avaient passé du temps ensemble à Voinjama et à Foya. Il a également déclaré avoir dormi dans la maison de Kundi à Foya. Kunti Kamara a déclaré que Kosiah n’était pas présent lors de la prise de Foya et s’est dit confus par rapport aux déclarations d’Abraham Towah. Sur question, il a déclaré qu’il n’était pas à Foya avec Abraham Towah, ce que Deku aurait pu attester s’il était encore vivant, et n’avait aucune idée de ce que Abraham Towah avait raconté.
Un juge assesseur a demandé à l’accusé s’il était resté 4 mois à Foya après la prise de la ville, soit de juillet 1993 jusqu’au mois de novembre 1993. Kunti Kamara a confirmé en précisant qu’il se trouvait dans le district de Foya, et non dans la ville de Foya.
La partie civile questionne Kunti Kamara:
L’avocate des parties civiles s’est référée à une précédente audition de l’accusé lors de laquelle ce dernier a indiqué qu’il lui était arrivé de tuer des ennemis sur le front. L’avocate des parties civile lui a demandé s’il savait combien de personnes il avait tuées. Kunti Kamara a répondu qu’il l’ignorait et ne pouvait pas non plus donner une estimation. L’avocate des parties civiles s’est étonnée que l’accusé ne soit pas capable de dire s’il avait tué beaucoup ou peu de gens. Kunti Kamara a rétorqué : « La guerre, c’est la guerre. On se tire dessus, je ne peux pas vous dire ».
L’avocate des parties civiles s’est étonnée des propos de l’accusé puisqu’il semblait désormais suggérer qu’il était perpétuellement en danger de mort alors qu’il a indiqué précédemment qu’il avait le statut d’éclaireur sur le champ de bataille et ne risquait pas d’être tué. Kunti Kamara a répondu qu’il s’attendait à mourir à chaque instant et était surpris d’être encore en vie aujourd'hui.
L’avocate des parties civiles lui a ensuite demandé comment il s’y prenait pour interroger les soldats capturés. Kunti Kamara a indiqué qu’ils étaient amenés à l’arrière du front et que les principales informations qui leur étaient soutirées concernaient leur localisation ainsi que l’emplacement de leurs munitions, de leurs médicaments et de leur nourriture. A la question de savoir si les soldats capturés livraient facilement ces informations, Kunti Kamara a répondu qu’il l’ignorait, car les commandants se chargeaient de ces interrogatoires alors que lui était front. Il a ajouté que s’il s’était fait capturer, il aurait eu peur et aurait répondu aux questions.
L’avocate des parties civiles a indiqué que l’accusé a déclaré lors de l’un de ses interrogatoires que l’ULIMO remettait les rebelles aux ONG. Le Président est intervenu et a précisé que, selon lui, l’accusé avait fait de telles déclarations pendant l’audience en indiquant que les rebelles étaient remis à l’ECOMOG. Kunti Kamara a manifesté sa surprise et rétorqué que l’ECOMOG n’était pas dans le Lofa.
L’avocate des parties civiles a ensuite demandé à l’accusé comment il expliquait le fait qu’Alieu Kosiah ait reconnu que Mami Wata avait découpé des soldats du NPFL et mis leurs corps dans des brouettes. Kunti Kamara a répondu qu’il n’avait aucune idée de cela.
Interrogé sur ses relations avec sa petite amie qui se trouvait à Kolahun alors qu’il était constamment sur le front à Mendekoma, Kunti Kamara a déclaré que la distance séparant Kolahun de Mendekoma n’était pas longue et pouvait être parcourue en moins d’une journée. L’avocate des parties civiles a précisé que pour aller à Kolahun, il fallait passer par Foya. L’accusé a enfin confirmé qu’il avait une voiture.
Le Ministère public questionne Kunti Kamara:
Interrogé sur l’expédition visant à ramener le chef TT à Foya, à laquelle il a déclaré avoir participé, Kunti Kamara a indiqué qu’elle avait duré une journée, mais que les négociations avaient duré plus longtemps. Sur question, il a précisé que TT se trouvait à la frontière entre la Guinée, le Libéria et la Sierra Leone et a d’abord été ramené à Mendekoma après que Pepper & Salt eut négocié avec l’ONG. Il a ajouté qu’il avait alors été chargé de les escorter jusqu’à Foya. Sur question, Kunti Kamara a confirmé que cette expédition avait eu lieu après la prise de Foya en 1993.
Les avocates générales ont ensuite demandé à l’accusé si la traque d’un chef suprême dans la brousse faisait partie des missions d’un commandant au front. Kunti Kamara a répondu qu’il n’était pas responsable de cette expédition et que l’endroit où se trouvait TT était sous menace. Sur question, il a confirmé que selon lui, faire revenir TT dans son village était une mission humanitaire. Il a ajouté que Pepper & Salt avait discuté avec les ONG et donné l’assurance que les villageois pouvaient quitter la brousse et revenir en ville en toute sécurité, alors que lui avait été appelé pour assurer leur sécurité.
Interrogé sur Ugly Boy, Kunti Kamara a affirmé avoir seulement entendu son nom pendant la guerre et n’avoir jamais combattu avec lui. Les avocates générales ont alors rappelé à l’accusé que lors de son interrogatoire devant le juge d’instruction, il avait donné beaucoup de détails sur Ugly Boy pour quelqu'un qui le connaissait à peine. Kunti Kamara a rétorqué avoir été constant dans ses déclarations et a répété qu’il ne l’avait pas vu à Foya. Il a expliqué avoir vu Ugly Boy pour la première à la frontière vers Solomba, lorsqu’il (Kunti) a quitté Foya en 1995-1996 pour aller au Lofa Bridge. La seconde fois qu’il l’avait vu, c’était à Voinjama.
Les avocates générales ont demandé à l’accusé de confirmer qu’il était resté à Foya jusqu’en 1995-1996. Kunti Kamara a répondu qu’il était passé par Foya pour aller à la frontière à Solomba et qu’il avait vu Ugly Boy ce jour-là pour la première fois. Il a ajouté qu’il n’avait jamais dit être resté à Foya jusqu’en 1995-1996.
Interrogé sur le lieu où Deku était basé, Kunti Kamara a répondu Foya. Les avocates générales ont relevé que devant le juge d’instruction, l’accusé a indiqué que Deku était basé à Voinjama. Kunti Kamara a expliqué que Deku les avait emmenés à Foya depuis Voinjama et qu’il se déplaçait entre Foya et Voinjama. Selon lui, Deku était le premier commandant lors de la prise de Foya.
Les avocates générales ont indiqué que selon ses déclarations, l’accusé n’était plus à Foya entre 1994 et 1996, mais à la frontière entre le comté de Lofa et le comté de Bong. Elles lui ont demandé comment il expliquait qu’Alieu Kosiah ait déclaré l’avoir vu à Foya City en 1994. Kunti Kamara a indiqué qu’Alieu Kosiah ne savait rien de Mendekoma et de la ligne de front. Les avocates générales ont demandé à l’accusé pourquoi Alieu Kosiah ne savait rien alors qu’il était basé à Foya. Kunti Kamara a répondu qu’il y avait beaucoup de généraux au sein de l’ULIMO qui n’avaient pas de mission et précisé que Kosiah n’était pas son commandant.
Les avocates générales ont ensuite rappelé que l’accusé a expliqué que sa fille était née à Foya en 1995, ce qui aurait rendu d’autant plus logique sa présence à Foya en 1994, et que sa femme venait le voir sur le front près de la rivière St-Paul. L’accusé a démenti ces allégations et expliqué que sa femme l’avait rejoint à Voinjama, avant qu’il l’emmène à Monrovia. Les avocates générales ont remis en question la possibilité pour l’accusé d’être à la fois à Voinjama et à la fois constamment sur la ligne de front. Kunti Kamara a expliqué qu’il allait parfois rendre visite à sa femme à Kolahun, et parfois cette dernière venait à Voinjama. Il a ajouté qu’il n’avait pas assisté à la naissance de sa fille et que sa femme était allée voir Deku pour demander de l’aide.
Les avocates générales ont souligné que l’accusé n’avait fait aucune mention de Voinjama précédemment, ce qui a été contesté par Kunti Kamara et son avocate. L’accusé a précisé avoir déclaré précédemment qu’il venait se reposer à Voinjama lorsqu’il était au front. Les avocates générales ont alors indiqué qu’Alieu Kosiah avait quant à lui évoqué Foya comme lieu de repos des soldats de l’ULIMO. Kunti Kamara a déclaré que la ville de Foya ne se trouvait pas dans sa direction et qu’il y était passé une seule fois après avoir quitté Foya. Cette affirmation a surpris les avocates générales, puisque l’avocate des parties civiles venait à peine de faire remarquer à l’accusé qu’il devait passer par Foya pour aller voir sa femme à Kolahun. Kunti Kamara a répondu que, quand il allait voir sa femme, cette dernière lui préparait à manger avec les choses qu’elle achetait au marché. Les avocates générales ont alors demandé à l’accusé avec quel argent il achetait des marchandises, puisqu’il n’était pas payé. Kunti Kamara a simplement répondu que sa femme l’aidait.
Interrogé sur sa rencontre avec Papa (Abraham Towah), Kunti Kamara a affirmé l’avoir vu pour la première fois au quartier-général à Voinjama, où était basé Pepper & Salt, et qu’à ce moment-là, il ignorait que Papa était soldat. Il a ajouté ne pas être un menteur et rester dans l’attente d’être jugé devant Dieu.
Les avocates générales lui ont demandé s’il était la seule personne à n’avoir jamais menti, contrairement à Alieu Kosiah, Abraham Towah et tous les témoins et parties civiles. Kunti Kamara a répondu qu’il n’avait pas nié connaître Kosiah, mais qu’il ne pouvait pas dire des choses qu’il ignorait.
La défense interroge Kunti Kamara ::
L’avocate de la défense a rappelé qu’à aucun moment lors de l’instruction il n’a été demandé à l’accusé de faire la distinction entre Foya City et Foya District. Elle a ajouté qu’elle aurait apprécié que les contradictions entre les différents témoignages des témoins et parties civiles soient mises en exergue.
L’avocate de la défense a ensuite demandé à Kunti Kamara d’expliquer en quoi consistait la vie d’un soldat sur le front pendant la guerre civile au Libéria. Kunti Kamara a déclaré que la vie pendant la guerre était désespérée et qu’il s’attendait à mourir à tout moment. Il a précisé qu’avant que Taylor tue sa mère, sa tante et son beau-père de sang-froid, il allait à l’école et apprenait un métier. Il a raconté que la vie de réfugiés en Guinée était trop difficile et qu’ils étaient considérés partout comme des étrangers. Sa sœur s’est prostituée pour leur permettre de vivre et a eu cinq enfants avec des hommes différents. Il a déclaré que ce n’était pas une vie et qu’il ne pouvait pas trouver la paix. Il voulait être enterré au Libéria s’il mourait et c’était ce qui lui avait donné le courage de rejoindre l’ULIMO, quand bien même il ne voulait pas devenir soldat. Il a ajouté qu’il avait rejoint l’ULIMO pour une cause et répété que la vie sur le front était désespérée, en précisant qu’il avait vu tous les jours des amis mourir à côté de lui. Il a déclaré : « Ce n’était pas mon but de combattre. […] La vie sur le front n’était pas facile du tout, c’est tout ce que je sais ».
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Interrogatoire au fond récapitulatif de l’accusé Kunti Kamara (suite)
La Cour interroge Kunti Kamara :
Le Président a sollicité de l’accusé des réponses précises sur les faits qui lui sont reprochés, en commençant par ceux concernant DN.
Faits commis au préjudice de DN
Le Président a rappelé que DN, enseignant à la Borma Mission, aurait été torturé et brutalisé par des soldats de l’ULIMO sur la piste d’atterrissage de Foya. Le protagoniste principal serait Ugly Boy, qui aurait tué DN avec une hache, ouvert son thorax et arraché son cœur. Le cœur aurait ensuite été cuisiné dans la maison d’Ugly Boy, découpé en morceaux, et consommé par plusieurs soldats de l’ULIMO sous les yeux de la population. Le Président a précisé qu’il était reproché à Kunti Kamara d’avoir participé au lynchage de DN, notamment en lui donnant des coups de pieds à la tête alors qu’il était au sol, les mains liées derrière le dos. Le Président a ajouté qu’une scène de liesse avait été décrite par les témoins, qui ont indiqué avoir vu l’accusé manger un morceau du cœur de DN.
Le Président a rappelé que JTC et SK ont été entendus sur ces faits et que SK a déclaré que Kunti Kamara était un des leaders avec Ugly Boy et qu’ils avaient tous le même comportement. SK a également indiqué que Mami Wata avait certes tué plus de personnes que Kunti Kamara, mais Kunti Kamara faisait néanmoins partie de ce groupe. Le Président a ajouté que d’autres témoins ont rapporté ces faits, tout en indiquant qu’ils n’avaient pas assisté à la scène. Le Président a demandé à l’accusé s’il était présent lors du meurtre de DN. Kunti Kamara a répondu qu’il n’était pas présent puisqu’il se trouvait sur le front, et qu’il n’avait jamais entendu parler de cela.
Le Président a précisé qu’il y avait un article de journal documentant non seulement la mort de DN, mais également celle de TKo. Il a ajouté que la fille du révérend TKo a également été entendue et a déclaré que Kundi était présent lors de la mort de son père. Kunti Kamara a continué de clamer son innocence.
Interrogé sur sa présence à Foya à l’époque des faits, l’accusé a répondu qu’il était au front et que Foya se trouvait à proximité de Mendekoma. Le Président a ensuite demandé à Kunti Kamara si la mort de DN avait eu un retentissement particulier à Foya, étant donné qu’il s’agissait de quelqu'un d’important. Kunti Kamara a répondu qu’il n’avait jamais entendu parler de la mort de DN auparavant.
Des faits commis au préjudice de KT
Le Président est ensuite revenu sur la mort de KT, que Kunti Kamara aurait accusée d’être une sorcière. Les faits se seraient déroulés dans le village de Foya Dundu, situé à 30 minutes à pied de Foya. Le Président a rappelé que le bébé de KT était décédé d’une maladie la veille au soir et enterré le matin-même. Selon le Président, les témoins ont indiqué que Kunti Kamara passait dans la ville de Foya Dundu et a rencontré le chef du village, auquel il a donné 100 dollars libériens en faveur de la famille endeuillée. Plusieurs témoins ont déclaré qu’après être reparti en direction de Foya, Kundi est revenu en colère à Foya Dundu et s’est approché de la maison de FG. Il aurait tiré la jeune femme hors de la maison ou ordonné à ses gardes du corps de le faire – cela est contesté – alors qu’elle était particulièrement vulnérable en raison de sa maladie. Le Président a précisé que selon les témoins, KT ne pouvait presque plus parler et sa peau partait en lambeaux. Kunti Kamara l’aurait tuée d’une rafale de mitraillette dans la tête, avant de brûler son corps avec de la paille qui avait été descendue du toit d’une cuisine. Kunti Kamara aurait suggéré que c’était la seule manière d’empêcher que le mauvais esprit de la sorcière se répande.
Le Président a rappelé que la Cour disposait des témoignages de FG, le frère de la victime, et de NS, son mari, qui devait malheureusement être rapatrié au Libéria pour des raisons de santé. Le Président a ajouté que les témoins FP, TK, EzP et d’autres personnes avaient également évoqué « le meurtre de la sorcière ». Selon le Président, il a été dit que l’accusé passait régulièrement à Foya Dundu, car il était ami avec Mohammed, le commandant local.
Sur question, Kunti Kamara a déclaré qu’il ne connaissait pas Foya Dundu et ignorait si des soldats y avaient été affectés. Le Président a confronté l’accusé aux déclarations de TK, qui a qualifié Kundi d’imprévisible mais sympathique avec lui, et qui a confirmé l’avoir vu tuer KT. Kunti Kamara a répondu qu’il ne connaissait pas TK et que c’était la première fois qu’il voyait toutes les personnes venues témoigner.
Le Président a demandé à Kunti Kamara comment était-ce possible que vingt de personnes le reconnaissent et le désignent, alors que lui était le seul à ne pas les reconnaître. Kunti Kamara s’est dit confus, a répété qu’il ne connaissait personne et s’est comparé à un éléphant mort, dont chacun voulait un morceau.
Des faits commis au préjudice de JTC et de SFC
Le Président a ensuite abordé les marches forcées et les personnes réduites en esclavage en rappelant que plusieurs témoins avaient été entendus à cet égard, dont JTC, SFC, TSKF, EB, SB et RSK, et que chacun d’entre eux avait évoqué les marches forcées imposées par l’ULIMO. Le Président a indiqué qu’il s’agissait de marches effectuées durant la saison des pluies sur des routes impraticables, à destination de la frontière guinéenne à Solomba, sur une distance d’environ 23 km. Le Président a précisé que l’accusé n’était pas mis en cause pour l’ensemble des marches forcées. En revanche, les témoins le désignent lui, personnellement, en ce qui concerne la marche du générateur électrique de Foya. Ils accusent également Kunti Kamara d’avoir organisé des portages de victuailles (café, huile, riz) en précisant que d’autres marches avaient été ordonnées par d’autres commandants.
Le Président a déclaré que les personnes entendues ne paraissaient pas excessives dans leurs déclarations et a demandé à l’accusé s’il avait connaissance de ces marches forcées. Kunti Kamara a indiqué que le district de Foya comptait plusieurs frontières, mais qu’il n’avait pas entendu parler de marches forcées, sans exclure que cela ait pu arriver. Le Président a rappelé que ces marches forcées ont été documentées par la CVR et sont mentionnées dans plusieurs documents de contexte remis à la Cour. Le Président a demandé à l’accusé comment il pouvait ne pas en avoir entendu parler. Kunti Kamara a répondu que ce n’était pas sa mission à l’époque, puisqu’il était sur le front.
Des faits commis au préjudice de LSM
Le Président est ensuite revenu sur les faits concernant LSM, qui a évoqué les marches forcées et déclaré avoir été tabé par Kunti Kamara et Alieu Kosiah à proximité de l’ancien marché. LSM a indiqué avoir été capturé avec six autres personnes, qui ont été tabées et tuées. Le Président a précisé que l’on comprenait du témoignage de LSM que ces six personnes avaient été jetées dans un puits. LSM aurait quant à lui été épargné grâce à l’arrivée de Deku, qui était très en colère. LSM a indiqué que c’était peut-être grâce à l’intervention de Fine Boy qu’il avait été épargné. SS pense quant à elle que LSM a eu la vie sauve car il a imploré les autres de ne pas le tuer et parce qu’il était grand et musclé. LSM a montré à la Cour sa cicatrice dans le dos qui aurait été causée par un coup de couteau donné par Kunti Kamara ou Alieu Kosiah. Le Président a ajouté que ce qui était notable dans le témoignage de LSM, c’était qu’il avait ensuite rejoint l’ULIMO et encadré des marches forcées, notamment la marche du générateur électrique. Le Président a précisé que LSM avait également été entendu par les autorités suisses, étant donné qu’il avait également mis en cause Alieu Kosiah.
Interrogé sur sa propre mise en cause en lien avec les sévices subis par LSM, Kunti Kamara a déclaré qu’il était impossible d’expliquer que quelqu'un qu’il ne connaissait pas l’accuse.
Faits commis au préjudice de RSK et EFNS
Le Président a continué l’interrogatoire de l’accusé en abordant les faits de complicité de viols aggravés commis au préjudice de RSK et de EFNS. Le Président a précisé que l’une et l’autre mettaient en cause Kunti Kamara pour des faits qui ne le concernaient pas lui à titre principal, mais ses gardes du corps, et en particulier B s’agissant du témoignage de EFNS. Le Président a ajouté que RSK et EFNS étaient adolescentes à l’époque des faits, en précisant que EFNS était un peu plus âgée que RSK et avait déjà un enfant.
Selon le Président, RSK a déclaré avoir été violée pendant plusieurs jours par deux soldats, chaque fois qu’ils en éprouvaient le besoin. Elle a indiqué avoir imploré Kundi en sa qualité de commandant en lui disant : « Dis-leur d’arrêter, je suis trop petite ». L’accusé se serait contenté de rire et de dire que ce n’était pas important. RSK a considéré que l’attitude de Kunti Kamara laissait libre cours aux pratiques de ces soldats. Elle serait allée dire à son amie EFNS qu’elle n’en pouvait plus et aurait été contrainte à prendre la fuite.
Quant à EFNS, elle aurait été violée régulièrement par le prétendu garde du corps de Kunti Kamara, un dénommé B, qui s’en prenait à elle lorsqu’il fumait de la marijuana. Selon le Président, B apparaît quelque peu comme un psychopathe dans ce dossier. Le Président a rappelé qu’il n’avait pas été possible de mener l’audition de EFNS à son terme, car cette dernière s’est effondrée dans la salle d’audience et n’a pas souhaité revenir pour continuer son récit. Elle a rapporté dans son témoignage qu’elle avait été violée avec une baïonnette recouverte de sel qui a été introduite dans son vagin. Elle en conserverait de lourdes séquelles gynécologiques et psychologiques.
Interrogé sur ces faits, Kunti Kamara a déclaré que rien ne l’avait choqué autant depuis sa naissance et qu’il n’avait pas connaissance de ces faits. Il a ajouté qu’il ne fumait pas et qu’il ne buvait pas d’alcool. Le Président lui a demandé si EFNS et RSK mentaient comme tous les autres. Kunti Kamara a répondu qu’il n’avait pas de garde du corps à Foya.
Parcours de l’accusé
Le Président a ensuite interrogé Kunti Kamara sur certains points précis du dossier.
Le Président a rappelé que l’accusé était parti en Guinée en 1997 lors d’une période de cessez-le-feu et lui a demandé s’il avait eu peur de Taylor et du NPFL. Kunti Kamara a indiqué que la situation s’était dégradée lorsque Charles Taylor a remporté les élections et que les anciens soldats de l’ULIMO étaient réquisitionnés pour aller combattre en Guinée.
Le Président a ensuite évoqué le témoignage d’un témoin anonyme dans le procès de Taylor en Sierra Leone, qui a décrit une vente d’armes par Kundi après le désarmement en 1997. L’accusé a manifesté sa surprise et précisé que les soldats de l’ULIMO étaient désarmés. Il s’est demandé comment il aurait pu vendre des armes vu qu’il n’en avait pas.
Le Président a évoqué brièvement les fausses déclarations que Kunti Kamara a reconnu avoir faites afin d’obtenir l’asile politique aux Pays-Bas. Le Président a rappelé que l’accusé avait ensuite quitté les Pays-Bas alors qu’il avait obtenu l’asile, puis la nationalité, et avait un emploi. Kunti Kamara a rétorqué qu’il n’avait pas de travail lorsqu’il a quitté le territoire néerlandais. Le Président a indiqué qu’il avait évoqué avoir du mal à parler la langue et le fait que les autorités néerlandaises refusaient d’accorder un regroupement familial, ce que l’accusé a confirmé en précisant qu’il avait quitté les Pays-Bas à l’instar de nombreux autres Libériens.
Le Président est ensuite revenu sur les écoutes téléphoniques mises en place dans le cadre de l’enquête préliminaire et en particulier sur une communication du 1er septembre 2018 interceptée alors que l’accusé se trouvait à Bobigny. Kunti Kamara a dit à son interlocuteur : « J’ai un ami en prison, Alieu Kosiah. Il n’y a personne qui se lève pour sa cause, il est détenu. […] Tu connais les mécréants, ils l’ont pris, il faut que je le libère. […] J’avais le passeport néerlandais, je suis citoyen néerlandais. J’étais là-bas, je travaillais là-bas, ils m’ont fait sortir de là-bas ». Invité à préciser l’identité de ceux qui l’avaient « fait sortir » des Pays-Bas, Kunti Kamara a déclaré qu’il ne se souvenait pas de cette conversation et qu’il était allé en Belgique. Il a ajouté qu’il faisait peut-être référence aux autorités néerlandaises, car il avait tout fait pour faire venir sa famille, sans succès.
Le Président a déclaré avoir plutôt l’impression que c’était l’enquête menée sur lui par Civitas Maxima qui avait fait fuir l’accusé. Kunti Kamara a rétorqué que s’il avait pris la fuite, il n’aurait eu ni adresse ni contrat de travail en Belgique. L’avocate de la défense a ajouté que Kunti Kamara avait quitté les Pays-Bas en 2013, soit avant l’ouverture de l’instruction contre Alieu Kosiah. Elle a ajouté que selon les propos d’Alain Werner, le nom de Kunti Kamara a été mentionné pour la première fois lors de l’instruction ouverte contre Alieu Kosiah.
Le Président a ensuite rappelé que l’accusé était parti vivre à Évreux où les gendarmes sont venus le chercher. Il s’est alors enfui à Bobigny et a été interpellé alors qu’il planifiait de rejoindre le Portugal en car pour ensuite s’envoler vers la Guinée au moyen de faux-papiers guinéens. Le Président a demandé à l’accusé si ces éléments ne reflétaient pas un parcours sinueux pour échapper aux forces de l’ordre. Kunti Kamara a répondu qu’il avait un domicile et une adresse officielle en France. Il a ajouté qu’il avait combattu pendant la guerre et n’avait pas peur, mais avait peur en revanche des complots contre lui.
A la question de savoir s’il s’était senti menacé lorsqu’il a appris l’arrestation d’Alieu Kosiah, Kunti Kamara a répondu que non. Il a déclaré avoir appris l’existence d’un complot contre les anciens soldats de l’ULIMO et avoir décidé de l’ignorer car il estimait qu’il n’avait rien à se reprocher. Il a expliqué avoir appris que la police le recherchait alors qu’il était en train de chercher du travail dans un supermarché. Il a indiqué qu’il recevait beaucoup d’appels téléphoniques à cette époque, au cours desquels il a non seulement été informé que le procès d’Alieu Kosiah n’était pas un procès juste et équitable, mais aussi été mis en garde au sujet de l’existence d’un complot contre les anciens soldats de l’ULIMO. On lui a également raconté que HB se rendait dans les hatay shops pour écouter les conversations et rechercher des témoins disposés à témoigner contre Kundi. Selon l’accusé, certains témoins ont été amenés au Ghana afin d’être briefés sur leurs témoignages. Il a déclaré qu’on lui avait également conseillé de quitter l’Europe sous peine d’être jugé de manière injuste.
Le Président a rappelé qu’Alieu Kosiah considérait que son procès en Suisse était pire qu’un procès en Corée du Nord. Le Président s’est quant à lui déclaré surpris de la qualité des procès suisses et a indiqué comprendre pourquoi l’actuel Ministre de la Justice, Éric Dupond-Moretti, avait souvent vanté la procédure suisse dans ses plaidoiries. Kunti Kamara a précisé qu’il s’était contenté de répéter des rumeurs qui lui avaient été rapportées du Libéria, notamment le fait que HB aurait payé un témoin pour l'inciter à témoigner. L’accusé a ajouté : « J’avais peur et quand on a peur, on peut faire n’importe quoi ».
Le Président a ensuite souligné que HB était un mandingue comme l’accusé et avait participé à plusieurs procès contre d’anciens membres du NPFL. Kunti Kamara a répondu qu’en ce qui concerne les Libériens, l’argent pouvait tout faire.
Interrogé sur ses projets d’avenir, Kunti Kamara a déclaré qu’à son arrivée en France, il avait le projet d’apprendre le français et de reprendre son métier d’électricien. Il a précisé que depuis son incarcération, il a suivi des cours de français et passé le premier niveau. Il a ajouté vouloir retourner au Libéria, en précisant qu’il n’avait rien à craindre là-bas. Il a expliqué que son père possédait une exploitation de coco et de café au Libéria et que ses frères s’étaient lancés dans la culture de soja grâce à son aide. Il a précisé que depuis qu’il était en Europe, il se livrait à l’export de véhicules au Libéria et soutenait financièrement sa sœur. Il lui a notamment acheté une maison en Guinée, car cette dernière ne souhaitait pas retourner au Libéria à cause de ce qu’elle y a vécu.
La juge assesseure a indiqué que selon sa compréhension, l’accusé avait pris la fuite car il s’estimait victime d’un complot et craignait d’être traduit devant un tribunal et être mal jugé. La juge assesseure a demandé à Kunti Kamara de livrer ses impressions sur son procès, et en particulier s’il considérait avoir été entendu de manière sereine et équitable et avoir pu s’exprimer autant qu’il le souhaitait. Kunti Kamara a répondu par l’affirmative. Le Président a ironisé en se disant rassuré de ne pas être en Corée du Nord. Kunti Kamara a alors déclaré qu’il n’accusait pas la justice française d’être inéquitable, mais qu’il s’agissait de rumeurs qui lui avaient été rapportées. Il a enfin précisé vouloir faire comprendre à la Cour qu’il était innocent et vivait tranquillement lorsque, du jour au lendemain, le NPFL a massacré tout le monde.
La partie civile interroge Kunti Kamara :
Dans un premier temps, l’avocate des parties civiles a indiqué que les autorités suisses avaient localisé le puits mentionné dans le témoignage de LSM.
L’avocate des civiles a ensuite relevé que le matin-même l’accusé a déclaré qu’il aurait eu peur s’il avait été capturé par le NPFL et aurait livré toutes les informations demandées, alors qu’il venait de dire qu’il n’avait pas peur de la guerre. L’avocate des parties civiles a déclaré que l’accusé avait visiblement peur des gendarmes, puisqu’il avait pris la fuite sans savoir ce qu’ils lui voulaient. Kunti Kamara a répété qu’il n’avait pas peur de la guerre, mais peur des complots.
Questionné sur la raison pour laquelle il n’avait pas rejoint le LURD formé en 1998 pour combattre son ennemi juré Charles Taylor, Kunti Kamara a expliqué que Alhaji Kromah, qui l’avait encouragé à rejoindre l’ULIMO à l’époque, lui avait dit que la guerre était finie et qu’il fallait déposer les armes.
L’avocate des parties civiles a ensuite rappelé que la Cour avait entendu Alieu Kosiah et a indiqué que selon elle, l’accusé avait allègrement repris sa rhétorique. L’avocate des parties civiles a déclaré avoir eu le sentiment que l’accusé cherchait à protéger Alieu Kosiah alors même que ce dernier n’avait pas hésité à donner le nom de Kundi pour servir ses propres intérêts, en lui faisant courir le risque d’être poursuivi en justice. Sur question, Kunti Kamara a confirmé qu’il se rendait compte que c’était à cause d’Alieu Kosiah qu’il était devant la justice. Il a précisé qu’avant que Kosiah ne mentionne son nom, personne ne le connaissait. Il a expliqué qu’il y avait des différends entre les soldats de l’ULIMO et que beaucoup d’entre eux avaient rejoint Charles Taylor pour des raisons financières, alors que lui-même et Alieu Kosiah étaient restés dignes. Selon lui, Alieu Kosiah ne trouvait personne pour témoigner en sa faveur et c’était la raison pour laquelle il avait fait appel à lui. Il a ajouté qu’à son avis, les anciens généraux de l’ULIMO ne seraient pas venus témoigner si Kosiah les avait cités car ils avaient peur. Kunti Kamara a souligné que si Alieu Kosiah mentait, il le dirait, et a déclaré : « On a voulu que je dise qu’il n’était pas à Foya, mais je ne peux pas dire ce que je ne sais pas ».
Après avoir déclaré ne pas remettre en cause les événements difficiles vécus par l’accusé, qui ont motivé son parcours, l’avocate des parties civiles a interrogé Kunti Kamara sur son incapacité à reconnaître la souffrance des témoins et des parties civiles, et les raisons pour lesquelles il n’avait eu de cesse de répéter que ces personnes mentaient et qu’il était victime d’un complot. L’accusé a proposé une analogie entre les atrocités subies par le peuple mandingue et la guerre entre la Russie et l’Ukraine, en disant que lorsque la guerre sera terminée, les Ukrainiens ne pourront pas être jugés car ils se sont défendus. Il a déclaré que les mandingues sont une minorité qui a tenté de résister aux criminels et sont considérés comme des étrangers dans leur propre pays. Il a ajouté qu’il s’était battu dans le seul but de libérer son peuple, qu’il ignorait tout de ce que les témoins et les parties civiles étaient venus dire et qu’il était innocent de toutes les accusations portées contre lui.
Le Ministère public interroge Kunti Kamara :
Interrogé sur la raison pour laquelle les anciens généraux de l’ULIMO avaient peur de venir témoigner alors que, selon ses déclarations, ils n’auraient commis aucun crime contre les civils, Kunti Kamara a expliqué que certains d’entre eux vivaient en Europe et suivaient ce qui se passait concernant les anciens de l’ULIMO. Kunti Kamara a ajouté qu’ils savaient que les gens qui venaient ici étaient des « grands menteurs ».
Concernant les faits relatifs à KT, les avocates générales ont rappelé que l’accusé a déclaré qu’il était innocent et ne connaissait ni KT ni le village de Foya Dundu, alors qu’il avait indiqué précédemment avoir traversé Foya Dundu. Sur question, Kunti Kamara a indiqué se souvenir d’être passé à Foya Dundu, mais ne pas avoir connaissance d’une tuerie dans ce village. Il a ajouté qu’il était possible de traverser une ville sans la connaître pour autant.
S’agissant de LSM, les avocates générales ont rappelé que LSM avait mis en cause l’accusé et Alieu Kosiah pour des faits de torture, alors que ces derniers considèrent que LSM ment pour recevoir de l’argent ou obtenir l’asile. Selon la compréhension des avocates générales, LSM n’a jamais demandé. l’asile, n’a pas reçu de compensation financière des tribunaux suisses et a été agressé physiquement en revenant du Libéria. Les avocates générales ont donc demandé à l’accusé ce que LSM avait à gagner à les dénoncer lui et Alieu Kosiah. Kunti Kamara a déclaré qu’il n’avait pas de réponse et qu’il appartenait à la Cour de juger si les personnes venues témoigner mentaient ou disaient vérité et si elles étaient venues pour des raisons financières ou d’autres raisons. Il a ajouté que la femme de DN et la sœur de RSK avaient expressément demandé une aide financière à la Cour. Il a également déclaré avoir compris des déclarations d’Alain Werner que ce dernier avait promis de payer ces gens, ce que les avocates générales ont contesté.
Questionné sur le besoin de justice exprimé par AN, FG, SFC et JTC, Kunti Kamara a déclaré qu’il ne pouvait pas s’expliquer sur des faits dont il ne savait rien.
Interrogé sur l’administration mise en place lors de la prise d’une ville par les ULIMO et les mesures qui en découlent, telles que le couvre-feu, les laissez-passer et les réunions, Kunti Kamara a déclaré qu’il n’en avait aucune idée et que cela ne faisait pas partie de sa fonction. Interrogé sur les checkpoints, il a indiqué que le seul checkpoint qu’il avait vu se situait à la frontière avec la Guinée et servait à contrôler les guinéens qui entraient au Libéria. Sur question, Kunti Kamara a confirmé avoir vu des checkpoints lorsqu’il se déplaçait dans le district de Foya ou à Voinjama.
En s’appuyant sur diverses auditions de Kunti Kamra et ses confrontations notamment avec JTC et RSK, les avocates générales sont revenues sur les accusations systématiques portées par l’accusé contre la communauté Kissi, qui serait à l’origine d’un complot contre lui. Les avocates générales ont relevé que, paradoxalement, les témoins n’ont jamais mis en avant leur appartenance à un groupe ou le supposé conflit avec les Mandingues. Kunti Kamara a expliqué qu’il n’accusait pas tous les Kissis, mais uniquement ceux qui étaient venus porter de fausses accusations contre lui. Il a ajouté que dans chaque tribu, il y avait des bons et des mauvais et qu’il était choqué que ces gens portent des accusations contre lui alors qu’il ne les avait jamais vus.
Les avocates générales ont demandé à l’accusé si, après avoir entendu ces gens, il pensait toujours qu’ils étaient des criminels. Kunti Kamara a répondu qu’il n’était pas là pour tromper la Cour et que, selon lui, il s’agissait d’un réseau de témoins Kissis, qui communiquaient entre eux. Il a ajouté : « Pour couper court, même si je dois passer cent ans en prison, je m’en remets à Dieu et j’insiste pour dire que je ne connais pas ces gens, ni aujourd'hui, ni demain ».
Les avocates générales ont ensuite indiqué que les crimes reprochés à Kunti Kamara étaient similaires aux exactions commises par l’ULIMO à la même période dans d’autres endroits du comté du Lofa. èmeElles ont ajouté qu’indépendamment de la responsabilité de l’accusé, le Lofa a été le 3ème comté le plus touché selon le rapport de la CVR. Selon les avocates générales, cette réalité rejoint tous les témoignages entendus dans le cadre de ce procès. Elles ont demandé à l’accusé comment il expliquait le décalage immense entre son récit de la guerre dans le Lofa et la réalité des crimes commis dans ce comté sous l’occupation de l’ULIMO. L’avocate de la défense est intervenue en soulignant que le rapport de la CVR n’indiquait pas le nombre d’infractions imputables à chaque faction dans le comté de Lofa. Kunti Kamara a quant à lui expliqué qu’il était d’usage que des atrocités soient commises pendant la guerre et qu’il y avait beaucoup de “on dit”, mais qu’en ce qui le concernait, il ne faisait qu’expliquer ce qu’il avait vu. Il a déclaré qu’il n’avait pas assisté à des massacres dans le Lofa car son commandant était strict.
Se référant aux déclarations d’Abraham Towah, qui a indiqué en vouloir aux commandants de l’ULIMO de l’avoir enrôlé dans cette guerre dont il se considère comme victime, les avocates générales ont demandé à l’accusé s’il avait avancé dans sa réflexion concernant son engagement au sein de l’ULIMO et s’il le regrettait. Kunti Kamara a répondu que lors de son enrôlement dans l’ULIMO, ses préoccupations étaient la paix au Libéria et les générations futures. Il a déclaré que sans paix, il n’y avait pas d’unité, et que les biens mandingues étaient aujourd'hui encore pillés par les hommes de Taylor.
Kunti Kamara a également déclaré que les autorités françaises ne s’étaient pas rendues dans son comté au Nimba pour demander à sa famille qui était Kunti Kamara et quelle était sa personnalité. Le Président est intervenu en lui expliquant qu’il aurait pu faire citer les témoins. L’avocate de la défense a expliqué avoir donné des noms, mais que les personnes n’avaient pas été trouvées, et précisé que les demandes n’avaient pas porté pas sur des membres de la famille de l’accusé.
La défense interroge Kunti Kamara :
L’avocate de la défense a indiqué avoir deux remarques. Elle a d’abord précisé que dans l’article de journal relatant la mort de DN et du révérend TKo, cité par le Président, il est mentionné que leurs corps ont été découpés et mis dans des brouettes. La seconde remarque concerne le certificat médical produit par EFNS. L’avocate de la défense a indiqué avoir déchiffré que EFNS avait des kystes ovariens et des fibromes utérins. L’avocate des parties civiles est intervenue en rappelant que le Libéria était classé 181ème sur 185 sur l’indice de développement et que EFNS avait indiqué qu’elle ne pouvait pas avoir d’enfants et que son corps était pourri de l’intérieur.
Le Président a souhaité poser une dernière question à l’accusé concernant ses déclarations, selon lesquelles son nom était inconnu avant que l’affaire Kosiah éclate. Le Président a demandé à Kunti Kamara comment il expliquait le fait que le nom de CO Kundi ait été cité par des personnes du Lofa dans un documentaire sur la CVR datant d’avant 2009, soit plus de cinq ans avant que les autorités suisses se saisissent de la procédure contre Alieu Kosiah. Kundi Kamara a répondu que le complot existait depuis longtemps et que FW travaillait avec HB.
Lectures complémentaires
Le Président a invité les parties à procéder à des lectures complémentaires si elles le souhaitaient, en précisant que s’il était fait référence pendant les plaidoiries à des éléments qui n’avaient pas été portés à la connaissance des jurés, les débats devraient être rouverts.
Les avocates générales ont donné lecture de certains passages du rapport de contexte établi par les autorités suisses, qui ont notamment fait une genèse du fonctionnement de l’ULIMO (scission, Black Friday Black Friday en mars 1994). Les avocates générales ont indiqué qu’elles n’étaient pas certaines que le Black Friday correspondait à la scission à défaut de date précise. En revanche, il semblait clair que la scission avait causé de nombreux massacres. Les avocates générales ont ensuite donné lecture d’un autre passage du rapport qui fait état du manque de discipline dans le Lofa. Elles ont également indiqué qu’une autre partie du rapport était consacrée aux exactions commises par les belligérants dans le comté de Lofa, parmi lesquelles des actes de cannibalisme et l’éviscération des femmes enceintes. L’avocate des parties civiles a ensuite donné lecture d’un passage concernant les violences sexuelles. Selon les avocates générales, le rapport fait une chronologie des exactions commises par l’ULIMO, ce qui permet de compléter le rapport de la CVR. Le Président a précisé avoir lu dans le rapport que 46 personnes avaient été tuées à Foya City en 1993.
Les avocates générales ont également donné lecture d’un extrait du memorandum rendu dans le procès aux USA concernant Mohamed Jabateh.
L’avocate de la défense a finalement versé aux débats un tableau issu d’un rapport de la CVR qui répertorie une cinquantaine de massacres au Libéria. L’avocate de la défense a précisé que ce tableau n’était pas exhaustif et que le Lofa n’y figurait pas. Elle a également attiré l’attention des parties sur un tableau répertoriant les violations par groupe armé. L’avocate des parties civiles a précisé qu’il s’agissait d’un pourcentage sur les deux guerres civiles. L’avocate de la défense a indiqué que le pourcentage des violations commises par l’ULIMO s’élevait à 13%. L’avocate des parties civiles a précisé que pour être exhaustif, il fallait rajouter l’ULIMO-K, l’ULIMO-J et le LURD.